La carte 2018 des présidentielles à surveiller en Afrique

Les coups d’éclat enregistrés en 2017 pourraient scintiller dans le ciel politique africain de la nouvelle année. Les anciens portraits officiels accrochés dans les palais et les administrations pourraient laisser place à de nouveaux visages. Au vu des enjeux qu’elles posent, ces élections présidentielles sont à surveiller de très près. La Tribune Afrique vous en dresse une liste non exhaustive
Ibrahima Bayo Jr.

Assurément, un vent du changement souffle en Afrique. La tendance mouvementée en 2017 avec une multiplication des crises ou contestations postélectorales, pourrait poursuivre sa vitesse de croisière en 2018. Les électeurs de plusieurs pays du Continent devront choisir un vainqueur dans la compétition politique la plus prisée en Afrique : la présidentielle.

Cameroun : au pouvoir depuis 1982, Paul Biya briguera-t-il un 5ème mandat ?

Paul Biya

Un cinquième mandat pour Paul Biya, au pouvoir depuis 1982 ? Une passation de pouvoir à un dauphin au sein de son propre camp ? Une première alternance au Cameroun ? Toutes les possibilités restent ouvertes tant le président sortant cultive le mutisme et le secret autour de sa candidature. Mais les premières manœuvres exécutées comme le discours-bilan de fin d'année vont dans le sens d'un rempilement en octobre 2018. Dans la foulée de la crise anglophone, de la récession économique en Afrique centrale et de la clameur du changement qui se fait entendre dans d'autres pays d'Afrique, la cote de popularité de Paul Biya tangue.

En indépendant, Akere Muna, avocat, fils d'un ancien Premier ministre et frère d'un candidat malheureux à la présidentielle de 2011, est le plus en vue pour battre le président sortant. Même l'humoriste Dieudonné Mbala Mbala se voit sur le fauteuil à Etoudi tout comme Espoir Matomba, Garga Haman Adji, Paul Éric Kingue, Corantin Talla, Bernard Njonga, Jean Blaise Gwet, Cabral Libii (indépendant) ou encore Olivier Bilé.

Encore floues, les candidatures devront résister à l'épreuve du temps et aux stratégies d'un pouvoir qui a une machine électorale huilée. Mais les prétendants semblent n'affichent aucun cap clair.

Zimbabwe : la récolte de la « transition assistée »

Zimbabwe

Avec les blasons de l'armée, la pression de la Zanu-PF et de la rue puis avec la force législative du parlement, Emmerson Mnangagwa a donné un parfum de conscience à son coup d'Etat contre Robert Mugabe. Au terme de ce que le « Crocodile » a déguisé sous les oripeaux de « transition assistée», le nouveau président a promis d'organiser la présidentielle en 2018, sans date précise.

Mais avec la nomination d'un gouvernement « 100% Lacoste » et d'un vice-président qui a mené le putsch, l'homme qui est aujourd'hui à la tête de la Zanu-PF joue la répétition générale avant la levée de rideau sur son ambition de demeurer le locataire du Palais National d'Harare. La moisson de la « transition » pourrait bien n'être que des fruits d'un « changement dans la continuité ».

Mali : la bataille de la Colline de Koulouba aura-t-elle lieu... à temps?

Quatre anciens Premiers ministres en lice. Deux femmes et une liste d'une trentaine de candidatures sur la table de la Cour constitutionnelle. Il faudra du génie politique à un président sortant qui joue son va-tout pour se faire réélire.

Au sein d'une mouvance présidentielle qui se fissure devant une opposition qui monte, le remaniement de fin d'année est peut-être le point de départ d'une course disputée vers la Colline de Koulouba, après le camouflet de la réforme constitutionnelle. Pour l'avance, Ibrahim Boubacar Keïta alias IBK fera ses premières foulées lors de sa « conférence d'entente nationale » au cours de laquelle il jaugera son opposition.

Avec le report des locales et des législatives, les doutes se sont confirmés sur les difficultés administratives et logistiques à tenir une élection sur toute l'étendue d'un territoire que l'Etat ne contrôle pas totalement. Le calendrier pour tenir la présidentielle entre juillet et août 2018 en sera forcément impacté et les probabilités s'amenuisent de voir la bataille électorale de Koulouba avoir lieu ... à temps!

RDC : élections hypothétiques... jusqu'à preuve du contraire

Une fin d'année sanglante avec des manifestations chrétiennes après messes violemment réprimées par le pouvoir. Comme la fin de l'année 2016 qui coïncidait avec la fin constitutionnelle du mandat du président, il semble que tout est mis en œuvre pour que les élections ne se tiennent pas, en tout cas pas à date échue.

En dépit des promesses, des pressions et sanctions internationales, des manifestations de rue, des récriminations de la puissante église politisée, un brouillard de doutes entoure le 23 décembre 2018, date prévue pour les élections générales.

Face à une opposition minée par les divisions, le pouvoir de Joseph Kabila gagne encore une année de plus et se maintient au Palais de la Nation de Kinshasa. L'année 2018 pourrait cependant être décisive pour dénouer la crise congolaise. Entre temps, Joseph Kabila pourrait trouver un candidat  pour un jeu de chaises à la Poutine ou être contraint de quitter le pays par la force de la rue.

Egypte : Al-Sissi, le polichinelle des urnes

Al Sissi

Qui doute encore que le maréchal Abdel Fattah Al-Sissi va rempiler sur le fauteuil du Palais d'El-Orouba du Caire ? La réponse : personne ! Il faut dire qu'avec le désistement surprise de l'ancien Premier ministre Ahmed Chafik, empêché de quitter son exil à Abu Dhabi puis incarcéré quelques heures après son arrivée au Caire, plus aucun candidat ne peut barrer la route d'un second mandat à Al-Sissi.

Dans une Egypte qui cultive son rapprochement avec les Emirats Arabes Unis, réchauffe ses relations avec Israël, marque son retour sur le Continent et entend peser sur la géopolitique de ses voisins comme la Libye, Abdel Fattah Al-Sissi entend être aux avant-postes. Sauf GROSSE surprise, le maréchal qui écarte un troisième mandat, est bien parti pour décrocher son second. Il devrait être le polichinelle qui sortira des urnes lors d'une présidentielle jouée d'avance et fixée entre le 8 février et le 8 mai 2018.

Sierra-Leone : un stabilisateur pour un des pays les plus pauvres de la planète

Ernest Bai Koroma

Tout ou presque est à refaire dans un des pays les plus pauvres de la planète. La décennie de guerre civile (1991-2002) s'est suivie d'une première alternance pacifique au pouvoir entre Ahmad Tejan Kabbah (2002-2007) et Ernest Bai Koroma. Même si les deux mandats de ce dernier ont apporté un semblant de stabilité politique sous les braises ethniques, l'économie du pays est chétive pour assurer les besoins vitaux et l'épisode d'Ebola a terni l'image du pays. La coulée de boue meurtrière d'août 2017 à Freetown, a montré la fragilité sociale du pays et l'impréparation de l'Etat.

Le Sierra Leone People's Party (SLPP) et le All People Congress (APC, au pouvoir), les deux partis qui dominent la vie politique du pays sont à nouveau sur la ligne de la Course au State House, le 7 mars 2018.

 A 67 ans, Samura Kamara, l'ex-chef de la diplomatie veut conforter l'APC dans le palais. Face à lui, Julius Maada Bio, 54 ans, le chef de l'ex-junte qui s'est brièvement emparée du pouvoir en 1996, veut redorer son blason et celui de son parti. Mais les enjeux politiques risquent de transformer les priorités économiques et les urgences sociales en mouton de sacrifice.

Madagascar : un « Game of Thrones » sur la Grande-Ile

Hery Rajaonarimampianina

25 novembre 2018 ? 25 décembre 2018 ? Entre les deux peut-être ? La date n'est pas certaine. Mais le président Hery Rajaonarimampianina assure que la course pour le palais présidentiel de Iavoloha aura bien lieu cette année. Mais la compétition aura des allures de «Game of Thrones » qui se joue sur la Grande-Ile.

Le président sortant qui a songé à une modification de la constitution, est en lice pour un second mandat. Au milieu de la pléthore de candidats décidés à lui barrer la route dont des indépendants, Marc Ravalomanana veut revenir aux affaires après le putsch qui l'en a chassé. Il compte bien s'appuyer sur le réseau de la mairie de la capitale dirigée par son épouse Lalao Ravalomanana.

Mais la surprise pourrait venir de la déclaration de candidature d'Andry Rajoelina dont le parti ne s'est pas encore prononcé sur nom de son porte-étendard. Mais un tel scénario ouvrirait à nouveau le livre de l'histoire politique du pays pour inspirer un épisode qui ne porterait qu'un seul nom : parfum de revanche.

Sud-Soudan : fin de la guerre pour une démocratie dans le plus jeune Etat au monde

Salva Kiir

Le 9 juillet 2018. C'est le septième anniversaire de son indépendance du nord que Juba a choisi pour tenir la présidentielle. Sans doute aussi est-ce une date pour enterrer la rivalité au sommet de l'Etat, mue en guerre civile depuis son indépendance.

Comme la guerre civile qui oppose le président Salva Kiire et son ancien vice-président, Riek Machar, limogé pour avoir osé annoncer son intention de se présenter en 2005, la présidentielle devrait mettre en lice les mêmes acteurs.

Passé ce délit d'ambitions présidentielles qui a entraîné la guerre, le Sud-Soudan devrait chercher la paix nécessaire à la tenue d'une présidentielle qui devait se tenir en 2015 mais qui ne cesse d'être reportée. Il y va de la viabilité de Juba mais aussi de la vitalité de la démocratie dans le plus jeune Etat au monde.

Ibrahima Bayo Jr.

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