RDC : l’homélie au vitriol de l’Eglise contre Kabila

Le miracle de Noël n'a pas eu lieu en RDC. Les évêques de la Cenco ont prononcé les bénédicités de Noël sans offrir à la population un accord de sortie de crise en guise de cadeau. A défaut de ce présent, ils ont montré leur mécontentement en tapant du poing sur l'autel. Le message de l'homélie de Noël a donc pris des allures de diatribe contre Joseph Kabila.
Ibrahima Bayo Jr.

Après un énième report des négociations sous l'égide de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO), l'Eglise congolaise a servi un cadeau de Noël très politique à Joseph Kabila. Les évêques de le Cenco espéraient un miracle de Noël en faisant signer un nouvel accord à la date du 24 décembre. Mais le locataire du Palais de la Nation n'a visiblement pas montré la bonne volonté nécessaire pour parvenir à un nouvel accord vers une transition politique après l'expiration de son mandat constitutionnel, le 19 décembre dernier. La messe de Noël a donc été une excellente tribune pour envoyer un message à Joseph Kabila.

Une homélie remplie de messages de paix et de mises en garde politiques à Kabila

Et l'Eglise ne s'est pas privée d'une homélie au vitriol pour envoyer un énième avertissement en direction du « président » congolais. A l'ambon de l'Archidiocèse de Kinshasa pour prononcer ce sermon critique, Laurent Monsengwo Pasinya, cardinal et archevêque de Kinshasa. Sans langue de bois et dans une rhétorique très imagée appuyée de références bibliques, le prélat a adressé, sans le nommer, une mise garde à l'« héritier du Mzee » sur la situation politique de la RDC.

« Il est plus facile de tuer que de ne pas tuer. Il est plus facile de céder à la violence que de résister à la force. Il est plus beau d'être artisan de paix qu'artisan de la violence. Il n'y a pas de grandeur à manier les armes pour tuer les gens. Le fait de prendre le pouvoir par les armes ne justifie pas qu'on ne puisse le quitter que par les armes », a admonesté le cardinal connu pour son franc-parler avant d'asséner le coup de grâce dans une référence tirée de la bible. « Qui tue par l'épée, périra par l'épée ».

Un funeste présage à Joseph Kabila qui a acté son maintien au pouvoir sous les protestations d'une partie de l'opposition et de mouvements citoyens de jeunesse. Depuis le 20 décembre, le pays vit au ralenti et sa situation sociale et politique est rythmée par les troubles, les arrestations d'opposants et d'activistes. Les villes quant à elles sont quadrillées par l'armée.

Le « Noël ensanglanté » du Nord-Kivu... et l'espoir d'un accord

Rappelant le message du Pape François lors de leur entrevue, le 21 décembre dernier, l'archevêque de Kinshasa appelle, « [...] tous les congolais à être des artisans de réconciliation et de paix et que tous ceux qui ont des responsabilités politiques écoutent la voix de leur propre conscience, sachant voir les souffrances cruelles de leurs compatriotes et aient à cœur le bien commun », a ajouté le cardinal

 « La paix de Noël exclut les assassinats, les tueries, la violence. Elle implique la justice, l'amour, la vérité, sans lesquels on s'expose à des mécontentements, des frustrations, des troubles sinon à des émeutes ; contraires à l'harmonie sociale, indispensable à la réconciliation : celui qui respecte la constitution n'a rien à craindre de la justice. Celui dont les droits sont bafoués se sent protégé par la même constitution »

Le cardinal a de quoi prêcher la paix dans cette période trouble. Au moment même où Laurent Monsengwo Pasinya prononçait son homélie, c'est un Noël ensanglanté que passaient les populations du Nord-Kivu. Au moins 22 civils ont été massacrés à l'arme blanche à Eringeti situé dans le territoire de Beni (Nord-Kivu). Une attaque imputée par les autorités congolaises aux Forces démocratiques alliées (AFD), des rebelles ougandais qui terrorisent la région depuis deux décennies. La situation qui prévaut dans la capitale et dans les grandes villes a fait oublier le sort de cette région où en deux ans, plus de 700 personnes ont été tuées. A Eringeti, plus qu'ailleurs, on espère un retour à la normale dans la situation politique du pays pour permettre aux autorités de prendre les pleines mesures.

Toutes les espérances se tournent désormais vers le jeudi 29 décembre, date de la reprise des négociations entre le pouvoir et l'opposition pour une sortie de crise. Les évêques de la Cenco troqueront à nouveau leur soutane pour un costume de médiateurs de la paix pour espérer offrir le cadeau espéré pour Noël pour le Nouvel An !

Ibrahima Bayo Jr.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.