Rétrospective 2017 (2/3) : paix et sécurité, annus horribilis pour l'Afrique

En termes de paix et de sécurité, l'année 2017 est à oublier. Les terroristes n'ont pas épargné de leur terreur le continent africain, loin de là... Les pays au front tournent leurs attentes vers 2018, espérant que l'éternelle problématique du financement puisse être résolue.
(Crédits : Reuters)

Terreur extrême en Somalie

Somalie Attentat

Rongée par une guerre civile qui semble interminable et par une partition de fait, la Somalie a été ébranlée par l'attentat le plus meurtrier de son histoire, le 14 octobre dernier. Ce jour-là, un camion piégé garé devant un grand hôtel, contenant pas moins de 2 tonnes d'explosives a été actionné au cœur du district commercial de Hodan, situé à Mogadiscio. Résultat, un bilan macabre de de 512 morts et 295 blessés ! Il aura fallu plus d'un mois aux autorités locales pour finaliser ce macabre décompte.

Pour le président somalien, Mohamed Abdullahi, pas de place au doute, la responsabilité du carnage incombe aux Shebabs. Il s'est empressé de se rendre au Kenya et en Ouganda pour rallier les deux pays à sa croisade anti-Shebabs. Affiliés à Al Qaïda, ce mouvement de rébellion continue à narguer le président Abdullahi, les 22.000 hommes de l'Amisom, les black ops menées par l'Africom et les incursions des armées kényanes et éthiopiennes. Cette attaque a également donné lieu à une polémique sur le peu de réactions et de marques de solidarité exprimées par les palais présidentiels et les chancelleries africaines. Seul, le tchadien Moussa Faki Mahamat, président de la Commission de l'Union africaine réagira le lendemain du drame, suivi par le président Burkinabé Roch Marc Christian Kaboré le jour même. Un silence qui a fait naître un profond sentiment d'indignation.

Esclavage, guerre civile, chaos politique... la Libye s'enfonce

Libye

La fin d'année 2017 restera marquée par la vidéo de migrants vendus en Libye diffusée le 15 novembre par la chaîne américaine CNN. Un reportage qui a permis à l'opinion publique de voir la face sombre de la lutte contre la migration qui bat son plein en méditerranée. Aveuglés par une vision purement sécuritaire de la question migratoire, différents pays européens ont préféré sous-traiter aux « gardes côtes » libyens, en réalité des milices contrôlant des ports ou ayant mis la main sur l'équipement de la marine de Kadhafi. Pour ces milices, la crise migratoire représente une aubaine leur permettant de s'enrichir facilement, encaissant l'argent européen et revendant, rackettant et enlevant les migrants.

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Pour les européens, cette option leur permettait de s'épargner les coûts considérables issus de la mobilisation d'une flotte aéronavale pour surveiller leur littoral et de devoir financer les centres de détention et de tri de migrants. Pour l'heure, les différents pays comptant des ressortissants retenus en Libye ont mobilisé leurs diplomaties pour leur assurer un rapatriement, alors que la fameuse mission de secours promise par le président français Emmanuel Macron se fait attendre.

En attendant le pays reste en proie à l'anarchie avec une stabilisation des différents fronts, malgré la supposée supériorité militaire de sa milice, la faction du Maréchal Haftar peine toujours à venir à bout des forces de Misrata, alors que le Sud libyen enregistre des micro-conflits entre tribus arabes et amazighs. Le conflit connait également des interventions de forces étrangères notamment égyptiennes et émiraties, alors que la Russie s'est rangé du côté de Haftar. Le gouvernement d'union nationale dirigé par Fayez el-Sarraj compte de son côté organiser des élections en 2018 et compte sur le soutien de l'Elysée. Paris a ainsi joué les médiateurs le 25 juillet entre Sarraj et Haftar pour décrocher l'accord du maréchal.

Egypte : un ennemi nommé Daesh

Le vendredi 24 novembre, l'Egypte a connu l'attentat le plus meurtrier de son histoire. 305 fidèles dont une vingtaine d'enfant réunis dans une mosquée de Bir Al-Abeb, dans le nord Sinaï, s'est ont péri dans une attaque revendiqué par Daech. L'émotion était à son comble dans le pays mais aussi au niveau mondial d'autant plus que ce n'est pas la première tragédie du genre orchestrée par Daesh dans le pays. Les attaques et attentats du groupe terroriste visaient jusque-là les forces de sécurité et surtout les chrétiens coptes, une minorité du pays, mais avec le massacre du 24 novembre, c'est l'Etat égyptien qui peinait encore à se relever d'une longue crise politique et surtout économique dans laquelle il végétait depuis des années. Le président Abdel Fattah Al-Sissi a certes promis de  « venger les martyrs » et une quinzaine de « jihadistes » ont été exécutés à quelques jours de la fin d'année pour un autre attentat commis en 2013 mais les attaques n'ont point baissé en intensité et les fêtes de fin d'année se déroulent dans une psychose presque généralisée au sein de la population et des touristes.

Mali : soldats impuissants et casques bleus à découvert

L'année 2017 se termine comme elle a commencé au Mali : avec la multiplication des attaques attribuées aux multiples groupes terroristes qui pullulent dans le pays. Avec comme principale cible, les forces maliennes et surtout les casques bleus de la Mission des nations unis pour la stabilisation du Mali (MINSUMA). Ces derniers, dépourvus de mandat offensif ne peuvent que faire le décompte macabre des soldats « tombés sur le champ d'honneur » et compter sur l'appui tactique de l'opération française Barkhane pour neutraliser les « jihadistes ».

L'armée malienne encore incapable de contenir les assauts et de se déployer sur toute l'étendue du territoire, le Mali a fini par devenir le foyer d'une menace sécuritaire régionale sans précédents qui s'étend depuis aux pays voisins. Le Burkina et surtout le Niger subissent régulièrement les attaques meurtrières des filiales locales de l'Etat islamique ou de AQMI qui semblent désormais narguer les forces régulières présentes sur le sol malien. Une impuissance qui a le don d'agacer la population, laquelle commence à manifester contre les différentes missions militaires présentes dans le pays. Ces dernières dans l'incapacité de ramener la paix dans le pays qui attend encore de stabiliser sa situation pour mettre effectivement en œuvre l'Accord d'Alger visant à tourner la page de la rébellion et des groupes irrédentistes touarègues qui revendiquent l'indépendance de l'Azawad, la moitié nord du pays.

G5 Sahel : en quête de fonds

Le 2 septembre dernier, l'opération « Hawbi » composée des soldats maliens, nigériens et burkinabés qui étaient épaulés par la force française Barkhane finissaient leur premier déploiement dans la zone. Un coup d'éclat symbolique pour la force conjointe mixte mise en place par les 5 Etats membres du G5 Sahel pou faire face aux menaces sécuritaires qui ne cessent de s'amplifier dans la zone. Il faut dire que même le budget de la première année de l'opérationnalisation de la force n'a pas été encore bouclé. Lancée en 2014, l'initiative s'est heurtée à la réticence des Etats-Unis qui ont saboté la demande des pays du G5 Sahel soutenus par la France, d'obtenir un mandat et par conséquent un financement du Conseil de sécurité des nations unies.

Dépourvus de moyens et la France trouvant par là l'occasion de lever le pied au Sahel, le G5 Sahel n'a depuis cessé de plaider sa cause et de chercher l'argent nécessaire ailleurs. Le 13 décembre, le président Emmanuel Macron a organisé à Paris un mini-sommet qui marque un tournant dans l'opérationnalisation de cette force. Des pays du Golfe notamment l'Arabie Saoudite ont mis la main à la poche et désormais la « dead-line » fixée par le chef d'Etat français est d'enregistrer des « victoires militaires » dès le premier trimestre 2018.

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