Algérie : Saïd, la disgrâce du frère Bouteflika le plus puissant

Une volonté de l’humilier en le livrant à la vindicte populaire ? Les images du frère cadet d’Abelaziz Bouteflika, escorté par des hommes en civil pour gravir les marches du tribunal militaire de Blida, ont été largement reprises par tout ce que l’Algérie compte de médias. Autrefois homme presque surpuissant de la République Said Bouteflika dort aujourd’hui dans une prison d’Alger. Du fond de sa cellule où il vient d’être placé provisoirement depuis ce dimanche 5 mai, la menace d’une condamnation de cinq à dix ans de prison ferme plane au-dessus de leur tête. Tout comme Mohamed Mediène, Athmane Tartag, deux ex-chefs des services de renseignements arrêtés en même temps que lui pour répondre de lourdes accusations.
Ibrahima Bayo Jr.
(Crédits : DR)

«Violation de l'autorité de l'armée», «conspiration contre l'autorité de l'État», les accusations sont lourdes. Ce dimanche 5 mai lorsqu'il sort du Tribunal de Blida, Said Bouteflika est directement placé en détention provisoire tel qu'ordonné par le juge d'instruction en charge de son dossier. Mohamed Mediène (alias Toufik), Athmane Tartag (Bachir), deux généraux qui se sont succédé à la tête des services de renseignements ont connu la même mésaventure.

Cinq à dix ans de prison

Ces deux derniers jours n'ont pas été de tout repos pour le trio de puissants dont les noms viennent rallonger la longue liste des dignitaires de l'ancien régime mis aux arrêts depuis la démission d'Abdelaziz Bouteflika. Après leur retentissante arrestation samedi 4 mai, les trois hommes ont été déférés devant le tribunal militaire de Blida qui a décidé de leur maintien détention à titre provisoire pour les besoins l'enquête. Des accusations pour lesquelles ils risquent entre cinq et dix années de prison ferme, selon le Code pénal algérien.

La chute de Said Bouteflika est aussi spectaculaire que son ascension fulgurante, alors qu'hier encore, il était craint en public, mais haï en secret. Symbole de sa disgrâce, la télévision publique a diffusé les images de l'arrivée l'ancien homme fort du Palais de la Mouradia au Tribunal de Blida, sous bonne escorte. Au-delà de la surprise, les prémices de cette arrestation sont à chercher dans la succession d'événements consécutifs à la démission de son présidentiel frère.

Dialogue de sourds entre Gaïd Salah et les manifestants

La vague d'arrestations dans l'entourage de l'ex-président était perçue comme une façon détournée du général Gaïd Salah de procéder à la neutralisation -et même à l'assèchement financier- des proches de Said Bouteflika. Dans la lutte interne contre l'entourage de l'ex-président, le général Gaïd Salah semble être le premier à passer à l'acte.

Peu avant la démission d'Abdelaziz Bouteflika, le chef de l'armée algérienne évoquait déjà, sans citer de noms, des forces invisibles, tapies dans l'ombre, préparant un complot contre l'institution militaire. Le général avait évoqué une réunion secrète tenue par des «individus connus, dont l'identité sera dévoilée en temps opportun».

Que change donc cette série ininterrompue d'arrestations de dignitaires de l'ancien régime dans la crise politique en Algérie? A priori, pas grand-chose. Sauf à faire gagner du temps au général, véritable homme du pouvoir post-Bouteflika. Entre hommes d'affaires et ex-haut fonctionnaires, ces arrestations semblent s'inscrire dans une logique de livrer des responsables pour calmer la colère du peuple.

Pendant ce temps, tout en appelant au dialogue, Gaïd Salah plaide pour le maintien de la date du 4 juillet pour le prochain scrutin présidentiel, là où les manifestants réclament un démantèlement de tout le système. Un vrai dialogue de sourds qui n'annonce pas l'épilogue de la crise politique.

Ibrahima Bayo Jr.

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