Le New York Forum Institute rassemble cinq chefs d’Etat pour un nouvel ordre mondial

Mardi 19 mai, le New York Forum Institute (NYF-Institute) organisait une table-ronde virtuelle qui a rassemblé 5 présidents africains. Entre résilience, dette et inquiétudes du monde post Covid-19, les Chefs d'Etat en appellent à un « nouvel ordre mondial » reposant sur davantage de solidarité, dans un plus strict respect de l'environnement.
(Crédits : LTA)

« Pour un monde résilient : l'appel de l'Afrique en faveur d'une nouvelle gouvernance mondiale », la table-ronde du NYF-Institute, a réuni les chefs d'Etat du Kenya (Uhuru Kenyatta), du Sénégal (Macky Sall), de Côte d'Ivoire (Alassane Ouattara), du Niger (Mahamadou Issoufou) et de Sierra Leone (Julius Maada Bio), mais aussi des personnalités africaines telles que Tony Elumelu (UBA Group et Transcorp Limited), Acha Leke (McKinsey Afrique), Ngozi Okonjo-Iweala (Envoyée spéciale de l'UA contre le COVID-19 et présidente du Conseil d'administration, Gavi, l'Alliance du Vaccin), Vera Songwe (Commission économique pour l'Afrique) ou encore les ministres Rania A. Al-Mashat (Egypte) et Amadou Hott (Sénégal).

« Nous avons choisi de donner la parole à ceux qui ont manifesté un engagement fort dès le début de la pandémie, comme ce fut le cas du président du Sénégal, par exemple », déclare Richard Attias, fondateur du NYF- Institute et PDG de Richard Attias & Associates (à la manœuvre dans l'organisation du dernier Sommet de l'Union africaine à Niamey).

Ces échanges online réalisés sur fond d'une crise sanitaire considérée par Tidjane Thiam comme « l'équivalent de la grippe espagnole doublée de la crise de 1929 », ont néanmoins permis aux intervenants d'opposer aux prospectives alarmistes des observateurs internationaux, une certaine forme de résistance africaine face au Coronavirus. « Les mesures barrières n'expliquent pas une telle résilience, car elles n'ont pas mis nos pays à l'abri de la pandémie » s'est d'ailleurs fendu Mahamadou Issoufou, le président du Niger.

Résilience du continent face au virus venu d'ailleurs...

Revenant sur les mesures d'exception prises en Côte d'Ivoire (Plan de soutien économique, social et humanitaire doté d'un budget de 3 milliards de dollars, soit 5% du PIB), Alassane Ouattara affiche sa confiance dans la capacité de « résilience » économique nationale, conforté par les bailleurs internationaux. « Selon les institutions de Bretton Woods, la croissance nationale qui était évaluée à 7% avant la pandémie - devrait se - maintenir entre 3 et 4% malgré le Covid-19 », rassure-t-il.

De son côté, Macky Sall, en exposant les initiatives développées au Sénégal (plan national de riposte contre le Covid-19, recherche et prévention), se réjouit que l'Afrique soit désormais en mesure de produire masques et respirateurs, alors que le président de la Sierra Leone tire les leçons d'un passé récent lié à l'épidémie d'Ebola, pour expliquer la « résilience » de son pays qui a depuis, renforcé ses capacités sanitaires et son dispositif de prévention. Toutefois, Julius Maada Bio a regretté les propos des « Cassandre » et autres oiseaux de mauvais augure qui prédisaient que le pire viendrait en Afrique... En effet, avec moins de 3 000 décès répertoriés dans 54 pays à ce jour, selon le Centre pour la prévention et le contrôle des maladies (CDC) de l'Union africaine (UA), la tendance reste pourtant moins inquiétante sur le continent, que celles qui sont observées actuellement de Paris à New York ou de Wuhan à Rio.

Toutefois, au-delà de la gestion immédiate de l'épidémie de Coronavirus, les Chefs d'Etat africains appréhendent le monde de « l'après-Covid-19 » et en appellent à la solidarité internationale pour surmonter la crise protéiforme à venir. « C'est un phénomène qui est né hors d'Afrique, il est donc naturel de nous aider » a lancé le président du Kenya, Uhuru Kenyatta, remerciant au passage les efforts déjà consentis par la Banque mondiale et le FMI, et l'engagement personnel du président Macron pour soutenir l'Afrique pendant cette crise sanitaire majeure.

Le président du Sénégal a également appelé au partage des responsabilités, interpellant les bailleurs afin qu'ils consentent à certains efforts concernant la dette. Enfin, Macky Sall, regrettant que les Africains continuent à subir « les conséquences de la mondialisation », a profité de ce rendez-vous digital, pour en appeler à une refonte des relations internationales qui reposerait sur un nouvel équilibre.

Annulation de la dette et nouvel ordre mondial

« L'humanité n'a pas été capable de développer une solidarité », a déploré le président Macky Sall. « Quand on voit les milliards levés à travers le monde avec une telle facilité pendant cette pandémie, alors qu'ici on se bat tous les jours... Je plaide pour un renouveau basé sur plus de justice sociale et de solidarité », a-t-il poursuivi, soulignant que la dette de l'Afrique subsaharienne ne représentait que 2% de l'ensemble des ressources mobilisées par les pays du G20 contre le Coronavirus. Un point de vue partagé par le président Alassane Dramane Ouattara qui milite de son côté, pour que les pays industrialisés respectent leurs engagements en consacrant 0.7% de leur PIB à l'Aide publique au développement (APD), précisant qu'à l'heure actuelle, les pays africains consacraient entre 5% et 7% de leur PIB pour faire face à la pandémie de Coronavirus.

Dans un contexte de globalisation, « les petites causes provoquent de graves conséquences » résume prosaïque, le président Issoufou qui demande l'annulation de la dette, mais aussi la mise en place d'un nouveau paradigme reposant sur une gouvernance mondiale « plus démocratique » capable de réduire les inégalités et d'accorder une plus large place aux questions climatiques. Au niveau géopolitique, le président du Niger est revenu sur le manque de représentativité des Africains dans les institutions internationales (ONU et Conseil de sécurité, en particulier) et sur les nécessaires réformes de gouvernance à mener au niveau domestique, pour mobiliser davantage de ressources internes (jusqu'à 24% des impôts contre moins de 20% à ce jour) et externes (à travers la diaspora et les investissements directs étrangers).

Entre résilience des économies africaines et interrogations sur des lendemains qui déchantent, les impacts économiques pourraient être « plus graves que les conséquences sanitaires », a prévenu le président Macky Sall, contre tout triomphalisme.

Ce premier rendez-vous digital du NYF-Institute qui s'est conclu sur la voix de la chanteuse Angélique Kidjo, devrait bientôt être suivi par de nouvelles programmations. « Nous travaillons actuellement sur la ligne éditoriale du contenu des différentes tables rondes virtuelles que le New York Forum Institute compte organiser prochainement », déclare Richard Attias à La Tribune Afrique.

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Commentaire 1
à écrit le 24/05/2020 à 23:48
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l'Afrique n'a nullement besoin de tendre la main à l'occident pour demander de l'aide. Ce dont a besoin l'Afrique c'est de voir les armées occidentales quitter l'Afrique. C'est de voir cesser les tensions allumées par l'occident pour venir ensuite jo...

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