Comment l’enseignement supérieur participe à la construction d’un écosystème entrepreneurial florissant en Afrique

Avec un total de 5,2 milliards de dollars investis dans ses startups en 2021, l'Afrique attire par sa créativité et son fort capital humain désireux d'entreprendre. Mais pour assurer la réussite de ces nombreux projets, les propositions de formations et d'accompagnement doivent se multiplier et se renforcer.
(Crédits : DR.)

2,5 milliards, ce sera le nombre d'habitants en Afrique en 2050. Soit une population presque doublée en moins de 30 ans. Cette croissance démographique, si elle est synonyme d'opportunités, porte également en elle de nombreux défis. Atout social fort, le nouveau ratio actifs/enfants et personnes âgées sera donc plus équilibré, accroissant dès lors le revenu par personne dépendante, tout en étant un fort levier de croissance économique. Cependant, cette démographie africaine se traduira également par l'arrivée chaque année de 30 millions de jeunes sur le marché de l'emploi d'ici 2030, selon les estimations. Il importe donc que le marché soit suffisamment inclusif pour mettre à profit ce capital humain. En effet, les pays africains doivent relever dès aujourd'hui des défis décisifs, comme l'accès à l'emploi, mais également à l'éducation et à la formation.

Une appétence croissante pour l'entrepreneuriat

En matière d'insertion professionnelle, les diplômés sans emploi sont loin de n'être que des cas isolés en Afrique. Selon le Centre africain pour la transformation économique, près de 50 % des diplômés universitaires ne trouvent pas d'emploi à la sortie de leurs études. Au vu de tels débouchés salariaux peu engageants, nombreux sont les jeunes à voir l'entrepreneuriat comme une alternative prometteuse. En effet, 72 % d'entre eux se disent « attirés » par cette perspective.

Un sentiment que les investisseurs étrangers ont bien identifié et accompagnent, l'Union européenne en tête. Avec un investissement de plus de 30 milliards d'euros jusqu'en 2030 au service du « développement d'un écosystème entrepreneurial », ce sont plus largement 150 milliards d'euros qui ont été annoncés jusqu'en 2027, via le programme Global Gateway Afrique-Europe. Ce programme a pour but de favoriser un « partenariat pour la postérité ». Une part de ces investissements sera directement dédiée « à l'accélération d'une croissance durable et à la création d'emplois décents ainsi qu'à l'amélioration de l'éducation et la formation », signaient le président du Sénégal, Macky Sall, et le président du Conseil Européen, Charles Michel, dans une tribune conjointe.

Forts de cette attraction, plusieurs pays africains se sont invités à la table des « startups nations » ces dernières années. De 11 en 2020, ce sont désormais 14 pays du continent qui intègrent le top 100 en 2021, révèle le Global Startup Ecosystem Index 2022 de StartupBlink. L'Afrique du Sud confirmant sa position dans le top 50.

Au total, les startups africaines auront battu tous les records, en mobilisant en 2021 des investissements équivalents aux sept années précédentes cumulées, selon le rapport de l'Association africaine de capital investissement et de capital-risque (AVCA), soit 5,2 milliards de dollars. Fait notable depuis quelques années : la confirmation de « méga-deals », des opérations de levées de plus de 100 millions de dollars réalisées par des entreprises technologiques.

Mais sans formation, l'entrepreneuriat reste un miroir aux alouettes

Si l'entrepreneuriat apparaît donc nettement comme une alternative à l'emploi salarié, cette voie n'évite en rien le besoin de formation, bien au contraire nécessaire à sa réussite. En effet, l'enseignement supérieur a un impact déterminant sur le chemin de l'entrepreneuriat, conférant les bons réflexes et des repères essentiels aux jeunes entrepreneurs. C'est également l'occasion pour eux de se créer un réseau, de prendre du recul sur leur futur projet, de le consolider, et même d'obtenir des labels reconnus, ouvrant les portes des acteurs financiers et des organismes publics, dont ils dépendent parfois.

Conscients de ces enjeux, et désireux d'accompagner l'élan entrepreneurial africain, de nouveaux acteurs participent à la création ou à l'implantation d'écoles sur le continent depuis plusieurs années, proposant des programmes de formation et d'accompagnement dédiés. C'est le cas d'HEC Paris, qui a notamment créé en 2019 Lead Campus Sustainable Leadership in Africa, en partenariat avec l'Agence Française de Développement (AFD), l'Université marocaine Mohammed VI Polytechnique, l'UCT GSB (Graduate School of Business de l'Université de Cape Town) et le fonds d'investissement Investisseurs et Partenaires (I&P). Panafricain, ce programme vise à former et accompagner leaders et futurs leaders africains dans le développement de leurs compétences et de leurs projets au service d'une croissance durable et inclusive pour l'Afrique. Autre programme d'envergure adapté aux réalités et spécificités africaines : HEC Challenge + Afrique.

Lancé en octobre 2021 à Abidjan, celui-ci ouvre ses portes aux entrepreneurs de tout horizon sur le continent, porteurs de projets innovants et à fort impact pour le développement socio-économique africain. Fort d'une première cohorte de 19 participants (15 porteurs et 4 co-porteurs de projets), ces derniers présenteront leur projet entrepreneurial le 6 octobre prochain, lors du HEC Start-Up Demo Day, à Abidjan.

Animée d'une forte ambition sociale et environnementale, la business school lancera prochainement d'autres programmes de formation, tels que Stand-Up qui ouvrira ses portes aux femmes entrepreneurs en Côte d'Ivoire au cours de l'année 2023.

Bien sûr, de nombreux efforts attendent encore le continent, notamment en matière d'accès à l'enseignement supérieur. D'après l'UNESCO, 207 millions d'enfants tous âges confondus étaient scolarisés en 2018. Une participation scolaire élevée, mais avec un taux d'achèvement faible : malgré les 23 % de dépenses récurrentes du budget des États, qui font pourtant de l'éducation leur 1er poste de dépense, seuls 69 % des enfants complètent leur parcours primaire, et 44 % leur cycle secondaire. Peu d'Africains arrivent donc aux portes de l'enseignement supérieur, le taux s'élevant à 18%. Pourtant, la formation a un réel impact sur la pérennité et le potentiel de développement de projets innovants. Les programmes développés par des établissements d'enseignement supérieur comme HEC Paris apparaissent donc comme des composantes clés de ces écosystèmes d'innovation.

(*) Co-directeur académique du programme HEC Challenge + Afrique.

(**) Directeur du Bureau Afrique de l'Ouest et Afrique Centrale de HEC Paris.

(***) Président des Alumni d'HEC Paris en Côte d'Ivoire.

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