Afrique du Sud : un an pour convaincre [Tribune]

Chaque année, Saxo Bank publie sa liste des 10 cygnes noirs. Cet exercice vise à anticiper des évènements extrêmes qui n'ont pas été pris en compte par les investisseurs et qui, en cas de réalisation, peuvent avoir un impact majeur.
(Crédits : DR)

Fin 2017, nous annoncions à nos clients l'imminence d'un «printemps africain» : «La destitution de Robert Mugabe au Zimbabwe déclenche une vague de changements politiques dans les autres pays africains déçus par leurs dirigeants. En Afrique du Sud, le président Jacob Zuma est destitué ce qui entraîne une renaissance politique et économique inattendue du pays».

Cette prévision s'est en partie réalisée. Cyril Ramaphosa, ancien syndicaliste et homme d'affaires apprécié des investisseurs internationaux, est le nouveau président et possède une nette majorité au Parlement pour réformer. Il bénéficie d'un a priori positif, mais il lui faudra agir rapidement afin que la population et les investisseurs internationaux voient des changements concrets avant l'élection présidentielle prévue en mai 2019.

La mission ne sera pas aisée tant les stigmates de l'ère Zuma sont encore visibles sur l'économie du pays. Dans son classement 2018 des pays ayant «les économies les plus misérables du monde», l'Afrique du Sud, qui était, il y a encore quelques années, présentée comme une terre d'opportunités, figure en deuxième position, juste derrière le Venezuela. Le taux de chômage atteint 27% et cache des disparités importantes, puisque seuls 6% de la population blanche est sans emploi, contre près de 31% de la population noire. La dette atteint le niveau de 60% du PIB, accentuant au passage le coût du capital, et la confiance des consommateurs et des chefs d'entreprise est en chute libre depuis la crise financière mondiale. A l'inverse de la très large majorité des pays développés et émergents, l'Afrique du Sud n'a pas profité du retour synchronisé de la croissance au niveau mondial.

Pire, la décélération de la croissance que l'on observe depuis quelques années a toutes les chances de se poursuivre à moyen terme. Notre indicateur favori, le credit impulse, qui mesure l'évolution des flux de crédit en pourcentage du PIB, est en territoire négatif depuis le printemps 2016. Comme il s'agit d'un indicateur avancé de neuf à douze mois par rapport à l'économie réelle, cela signifie concrètement que la croissance atone risque d'être la norme, au moins jusqu'à l'année prochaine, compliquant d'autant la tâche du nouvel Exécutif.

L'Afrique du Sud a la capacité de revenir dans le club prisé des pays émergents à fort potentiel, à condition de réformer vite et bien. Les premières pistes esquissées lors de la présentation du budget le 21 février dernier (hausse de la TVA et baisse des dépenses de 85 milliards de rands au cours des trois prochaines années) ont été applaudies par les agences de notation, le marché de la dette et le marché des changes. Il est encore trop tôt pour savoir si le gouvernement a convaincu. Le premier vrai test sera le 23 mars prochain lorsque Moody's va revoir la note du pays qui court toujours le risque d'être classée en catégorie spéculative.

A plus long terme, le gouvernement devra réorienter sa politique afin de ne pas traiter simplement la question de la dette, mais aussi la crise inégalitaire à laquelle fait face le pays et qui mine sa croissance potentielle. Dans une économie de la connaissance, la seule manière de traiter ce défi est de miser sur l'éducation en favorisant notamment un accès équitable et gratuit pour tous à l'enseignement primaire.

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Commentaire 1
à écrit le 10/03/2018 à 16:25
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Un an pour convaincre qui? Pourtant Les chiffres sont clairs...une immigration des pays limitrophes estimée a 400 000 par an et un exode massif des afrikaners de 35000 par an. depuis 10 ans, il reste quoi ?: un pays africain en train de devenir comm...

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