L’AFD plaide pour un nouveau paradigme financier à co-bénéfice climat

A quelques semaines de la COP 27, l'Agence française de développement réaffirme son orientation « 100 % Accord de Paris ». En cinq ans, les financements à co-bénéfice climat de l'AFD ont sensiblement augmenté. Cette tendance devrait se renforcer selon Rémy Rioux, récemment reconduit à la direction générale du groupe, qui plaide pour un changement de paradigme financier face à l'urgence climatique.
(Crédits : Reuters)

« Nous sommes entrés dans une ère de guerre écologique », prévenait Rémy Rioux, directeur général de l'Agence française de développement (AFD), fraîchement reconduit pour un troisième mandat, à l'occasion d'un atelier presse organisé le 29 septembre dernier, au siège du groupe. A ses côtés, Papa Amadou Sarr, nouveau directeur exécutif de la Mobilisation, des partenariats et de la communication ; Thomas Mélonio, directeur exécutif de l'Innovation, de la recherche et des savoirs ; Mathilde Bord-Laurans, responsable de la Division énergie ; et Adama Mariko, secrétaire général du FICS (Sommet Finance en commun), présentaient leurs orientations à quelques semaines de la COP 27. « Nous sommes à l'heure de la vérité et de la prise de conscience (...) Après le pouvoir d'achat, le climat et l'énergie représentent les principales préoccupations des ménages français », a rappelé le directeur général de l'AFD.

« Nous sommes vraisemblablement dans le scénario médian (soit un réchauffement climatique de l'ordre de 3°C, ndlr) présenté dans le dernier rapport du GIEC, qui est très défavorable », ajoute Thomas Mélonio. Parallèlement, frilosité du secteur privé, inflation, poids de la dette et hausse des taux des banques centrales sont autant d'éléments qui pèsent sur « le financement de la transition climatique », rappelle Thomas Mélonio qui estime qu'il faut désormais « intégrer la dimension climatique dans un cadre macroéconomique » et créer de « nouveaux mécanismes de financement ».

L'AFD renforce ses engagements à co-bénéfice climat

Conformément à son mandat d'agence « 100 % accord de Paris », l'AFD a engagé 6 milliards d'euros en 2021 dans la lutte contre le dérèglement climatique, dont 2 milliards pour l'adaptation et 2 milliards pour la préservation de la biodiversité.

Depuis 2017, l'AFD a pris l'engagement de consacrer 50 % de ses financements annuels à des projets à co-bénéfice climat. Parallèlement, l'AFD poursuit l'émission d'obligations climat sur les marchés. Celles-ci représentent aujourd'hui 50 % du financement de l'AFD. « Notre volonté est de porter cette part à 100 % d'ici 3 ans », a annoncé Rémy Rioux. Enfin, le groupe continue de mobiliser ses différents partenaires (l'International Development Finance Club (IDFC) et les banques publiques de développement) via le Sommet Finance en commun (FICS) notamment, qui se tiendra les 19 et 20 octobre prochains, à Abidjan.

En chiffres, l'Afrique a reçu 1,8 milliard d'euros en 2021 (42% pour des projets d'adaptation climatique et 52% pour les projets d'atténuation), l'Asie et le Moyen-Orient, avec 2,6 milliards d'euros arrivent en tête des montants investis par le groupe. En 2021, les engagements financiers de l'AFD ont augmenté de 15% par rapport à l'année précédente.

L'Afrique a reçu 1 milliard d'euros en matière d'atténuation des changements climatiques (sur les 4 milliards investis dans les pays en développement). Enfin, le secteur privé en Afrique a reçu 288 millions d'euros pour des projets à co-bénéfice climat en 2021, soit 43% du montant global alloué par Proparco (filiale dédiée au secteur privé du groupe AFD).

« Pertes et préjudices » : comment définir les responsabilités ?

« Malgré des inquiétudes vis-à-vis de la COP27, il ne faut pas lâcher le cap de l'Accord de Paris », a prévenu Mathilde Bord-Larans, à la veille de la COP 27. « Nous montrerons à Charm-el-Sheikh que, dans ce contexte difficile où les attentes sont encore plus fortes, les choses avancent », a-t-elle ajouté.

Face à la baisse des investissements privés dans un contexte mondial troublé, le directeur général de l'AFD cherche à établir les bases d'une nouvelle donne. « Aujourd'hui, le climat bouleverse le monde de l'aide publique au développement (APD). Tout le monde s'est un peu lassé du discours sur la solidarité, y compris les bénéficiaires eux-mêmes », a-t-il souligné, misant désormais sur « un nouveau cadre de référence du système financier », non sans préciser qu' « avant de penser transition, il faut déjà tenir ses engagements ».

Et c'est bien là où le bât blesse, puisque l'engagement des 100 milliards annuels, promis par les pays industrialisés pour l'atténuation et l'adaptation climatiques dans les pays en développement, n'a pas été tenu, poussant les pays du Sud a réclamé un nouveau mécanisme de financement à Glasgow, pour compenser leurs « pertes et préjudices ».

Or, si les pays développés avaient accepté d'intégrer les pertes et préjudices dans l'Accord de Paris, ils avaient pris la précaution d'écarter tout mécanisme compensatoire. « Il est très difficile de définir les responsabilités et de mesurer les politiques publiques mises en place pour lutter efficacement contre le réchauffement climatique », a déclaré Mathilde Bord-Laurans. « La liste des Etats industrialisés date des années 1990 et la Chine n'y figurait pas alors qu'elle est aujourd'hui, et de loin, la première puissance industrielle au monde », ajoute Thomas Mélonio.

Dans l'attente de définir les responsabilités respectives, l'Afrique a néanmoins besoin de 1.300 à 1 600 milliards de dollars de financement entre 2020 et 2030, pour faire face au changement climatique, d'après le rapport sur les perspectives économiques africaines en 2022 de la Banque africaine de développement (BAD). Autant dire que les financements à co bénéfice climat, devraient ponctuer les débats de la prochaine COP27 à laquelle se prépare activement l'état-major du groupe AFD.

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Commentaire 1
à écrit le 25/10/2022 à 12:05
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Trois grands défis écologiques sont aisément identifiables , la mobilité, l'industrie et le résidentiel. Le 1er, contemporain s'est d'adapter, le second est à protéger pour nourrir la planète, le 3ème doit faire un effort spectaculaire peu impactant,...

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