« Grâce à cette acquisition, nous assurons une présence sur le terrain, en apportant des réponses sur un marché en pleine transformation, où les besoins sont considérables. Notre objectif est de répondre à la demande des populations africaines, d'accéder à des produits de santé de qualité » explique Bertrand Talbotier, le président de PIEX Group au lendemain du rachat d'Apexfarma, le spécialiste espagnol de la promotion de produits pharmaceutiques en Afrique subsaharienne et en Asie du Sud.

Fondée en 1979 par Robert Jamain, PIEX est rachetée en 2017, à la suite d'une opération menée par Bertrand Talbotier et soutenue par un groupe d'investisseurs, au premier plan desquels LBO France, l'un des plus gros fonds de private equity français, et intégrant Bpifrance, AfricInvest et Trocadéro Capital Partners comme actionnaires. En 2019, PIEX réalise sa première opération de croissance externe en rachetant Pharma CDI, un distributeur de médicaments implantés en Afrique de l'Ouest, qui enregistre alors plus de 20 millions d'euros de chiffre d'affaires. Aujourd'hui, l'entreprise qui compte une cinquantaine de collaborateurs franchit un nouveau cap en acquérant Apexfarma, pour quelques dizaines de millions d'euros. Cette opération a été rendue possible grâce à une croissance soutenue depuis l'arrivée de Bertrand Talbotier à la tête de PIEX en 2017, le chiffre d'affaires de la société étant passé de 79 millions d'euros avant le rachat, à plus de 150 millions d'euros aujourd'hui. Parallèlement, l'entreprise opérant depuis sa création dans les régions d'Afrique francophone, s'est simultanément orientée vers l'Est anglophone du continent.

Aujourd'hui, PIEX Group gère l'import-export de produits pharmaceutiques et de bien-être vers plus d'une cinquantaine de pays à travers le monde, principalement sur le continent africain. « En rachetant Apexfarma, notre offre intégrera l'aspect réglementaire, le marketing, l'analyse des marchés, la promotion, les services logistiques et la distribution. Par ailleurs, PIEX Group bénéficiera du relais des 350 délégués d'Apexfarma répartis dans une quinzaine de pays d'Afrique francophone » explique son dirigeant. Avec cette nouvelle opération de croissance externe, l'entreprise présente dans 35 pays africains, bénéficiera de l'expertise marketing et du réseau commercial local développé par la société barcelonaise fondée par Carlos Pijoan en 1995, qui assure la promotion d'une cinquantaine de marques en Afrique subsaharienne francophone.

Un engagement pour lutter contre le trafic de faux médicaments

« L'un des objectifs de PIEX est de lutter activement contre les trafics de faux médicaments, en assurant une traçabilité et une qualité d'information qui soient disponibles pour tous les professionnels de santé, dans les pays où nous sommes présents » assure Bertrand Talbotier.

Le commerce de faux médicaments sur le continent représente un véritable fléau qui atteindrait jusqu'à 200 milliards de dollars par an, selon l'Organisation mondiale de la Santé (OMS). L'Afrique demeure la région du monde la plus affectée par ce phénomène qui génère plus d'argent que tous les trafics de drogues réunies d'après l'Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC). Au Sahel, le trafic de produits médicamenteux atteindrait jusqu'à 50% des médicaments distribués selon un rapport publié le 31 janvier 2023 par l'ONUDC. Cette situation s'explique en partie, par les prix pratiqués par l'industrie pharmaceutique dans les marchés publics d'Afrique francophone, auxquels PIEX propose une alternative en distribuant des médicaments, notamment génériques, à des tarifs compétitifs.

« Dans l'industrie pharmaceutique, les marges sont souvent très élevées. Sur les marchés privés où la concurrence des acteurs favorise le prix final pour les consommateurs, nous avons réduit le nombre d'intermédiaires pour faire baisser les coûts » explique Bertrand Talbotier qui cherche avant tout à s'adapter au pouvoir d'achat des ménages africains.

Les antipaludéens et les médicaments contre les maladies cardio-vasculaires comptent parmi les principaux traitements distribués par l'entreprise française, qui collabore avec près de 75 laboratoires essentiellement basés en Europe. A ce jour, les médicaments antipaludiques contrefaits ou de qualité inférieure tueraient environ de 267.000 Sahéliens chaque année. Selon l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), la prise en charge des personnes ayant utilisé des produits médicaux falsifiés ou de qualité inférieure pour le traitement du paludisme en Afrique subsaharienne, en coûterait jusqu'à 44,7 millions de dollars par an, au continent.

Une alternative après le départ des Big Pharma

« Par cette alliance avec Apexfarma, PIEX Group franchit une nouvelle étape de son développement et se donne les moyens de devenir le leader de la distribution de produits de santé et de bien-être en Afrique. Accompagné par les équipes opérationnelles de LBO France, PIEX Group poursuit une stratégie ESG ambitieuse en faveur de l'accès aux médicaments pour tous, sur un territoire qui présente un très grand potentiel de croissance » se félicitait Jean-Marie Leroy, Partner en charge de l'activité Small Cap chez LBO France, par voie de communiqué, au lendemain du rachat d'Apexfarma par PIEX Group.

Avec Apexfarma, PIEX acquiert également sa filiale suisse, Cross Pharm, ce qui lui permet de devenir détenteur d'autorisations de mise sur le marché (AMM) et du droit d'exploitation de marques, souvent longues et fastidieuses. PIEX pourra désormais accompagner l'enregistrement des produits auprès des autorités de santé locales, assurer leur lancement et leur promotion auprès des médecins et des professionnels de santé et procéder à leur mise à disposition dans les officines africaines. Cross Pharm permettra également à PIEX d'accéder à certaines molécules pour répondre à des pathologies récurrentes en Afrique. Pour le directeur général de l'entreprise française, il s'agit d'un impératif à l'heure où les Big Pharma comme GsK ou Pfizer ont quitté l'Afrique et s'en remettent à des partenaires comme PIEX. C'est d'ailleurs dans ce contexte que l'entreprise française est devenue le distributeur unique des produits du géant Bayer en Afrique francophone (hors Afrique du Sud) depuis 2023. Le 2 avril 2024, PIEX distribuera également les produits du groupe BAYER en Afrique anglophone (hors Afrique du Sud), après avoir remporté à un second appel d'offre.

« Depuis environ 5 ans, la plupart des Big Pharma, ont décidé de quitter l'Afrique car c'est un continent complexe qui compte 54 pays et autant de problématiques et de réglementations différentes, pour de maigres profits. Les géants pharmaceutiques ont estimé que les investissements étaient trop importants par rapport aux risques encourus et à la taille de marchés » explique le DG de PIEX Group qui voit dans ce positionnement, une forme « d'indécence » au regard des besoins du continent, qui compte « 20% de la population mondiale et qui ne représente que 3% du marché pharmaceutique ».

A titre illustratif, fin 2015, Sanofi annonçait l'arrêt de la production du sérum anti-venin Fav-Afrique, jugé peu rentable. Le sérum coûtait entre 100 et 500 euros par personne, selon les données recueillies par Médecins sans Frontières (MSF). Or, la majorité des morsures de serpents se produisaient dans les zones rurales où les populations n'avaient pas les moyens de s'offrir le fameux sérum, préférant se tourner vers des remèdes traditionnels.

Accompagner le renforcement de l'écosystème africain

La nature ayant horreur du vide, le retrait des géants pharmaceutiques s'est accompagné de l'arrivée de nouveaux acteurs « midsize » venus d'Europe ou d'Asie. PIEX Group compte d'ailleurs parmi ses partenaires des laboratoires comme Almirall et Ferrer (respectivement n°1 et n°2 en Espagne) « Ces laboratoires réalisent à ce jour, moins de 10% de leur chiffre d'affaires en Afrique, mais ils croient au développement de ces marchés. Ils continueront à investir et nous seront là pour les accompagner » assure Bertrand Talbotier.

Parallèlement, la pandémie de Covid-19, a poussé un certain nombre de pays africains à réduire leur dépendance aux importations de médicaments venus de Chine et d'Inde, en particulier. En 2021, près de 95 % de tous les médicaments distribués en Afrique étaient encore importés selon l'OMS. Désormais, plusieurs pays se sont lancés dans la production locale de vaccins et de médicaments. L'Afrique du Sud, l'Égypte, le Kenya, le Nigéria, le Sénégal et la Tunisie ont été choisis par les Nations unies pour développer leurs propres unités de production, afin d'enrayer de nouvelles vagues de coronavirus et pour lutter contre d'autres pathologies récurrentes. Pour le directeur général de PIEX, « il est indispensable d'accompagner cette tendance afin que les Africains développent leurs propres médicaments, et qu'ils ne dépendent plus des aléas de la conjoncture économique ou sanitaire mondiale ».

Si le groupe n'envisage pas pour l'instant d'ouvrir ses propres laboratoires en Afrique, il prévoit à terme, de mettre à disposition des médicaments pour des pathologies et des besoins spécifiques à l'Afrique, grâce à l'acquisition de Cross Pharm.

Sur le segment de la parapharmacie qui représente environ 5% de son chiffre d'affaires, l'entreprise compte déjà des marques comme Rogé Cavaillès, U-Labs, Laboratoire Biocyte et Noreva dont les prix sont adaptés à un marché africain en pleine croissance.

Après le rachat le 5 octobre dernier d'Apexfarma, PIEX Group cherche à renforcer sa croissance organique pour s'imposer à terme, dans tous les pays d'Afrique. Après l'Ouest et l'Est du continent, il déploie actuellement ses activités en Afrique du Nord (Maroc et Tunisie), et n'exclut pas de nouvelles opérations de croissance externe dans les 2 prochaines années...