Ghana : le pays du « Beyond Aid » finit par se tourner vers le FMI

Surendetté, terrassé par les effets ravageurs de la pandémie du Covid-19 et de la guerre en Ukraine, le pays de Nana Akoufo Addo se déclare en défaut. Appelé à la rescousse, le FMI vient d'approuve un montant de 3 milliards de dollars à titre de crédit, dont 600 millions pourraient être décaissés immédiatement par le Ghana.
Mounir El Figuigui
Au mois de juillet 2017, le président ghanéen Nana Akoufo Addo annonçait sa décision de renoncer au programme d'aide du FMI qui devait être reconduit en 2018.
Au mois de juillet 2017, le président ghanéen Nana Akoufo Addo annonçait sa décision de renoncer au programme d'aide du FMI qui devait être reconduit en 2018. (Crédits : DR)

18 juillet 2017. Alors qu'il présente le bilan d'étape de ses six premiers mois à la tête du pays, le président Nana Akufo-Addo fait une annonce pour le moins étonnante à l'adresse des marchés financiers: le programme d'aide du FMI dont bénéficie le Ghana ne sera pas reconduit à son expiration en avril 2018. Fierté nationale, afro-optimisme poussé à l'extrême... Les analyses vont bon train. Mais c'était sans compter la crise qui allait s'abattre deux années plus tard sur l'économie mondiale.

Affecté par la pandémie de Covid-19, le Ghana voit  son économie se contracter de 3,2 % sur un an au deuxième trimestre de2020, une première depuis 1983. « Pour la première fois en 37 ans, l'économie du Ghana s'est contracté de 3,2% », déclarait à des journalistes Samuel Kobina Annim, le statisticien en chef du GSS, l'institut national des statistiques, alors qu'à la même période une année auparavant, la croissance était de 5,7%.

La fin du « Ghana sans aides »

Tous les voyants sont au rouge et la perturbation des chaînes d'approvisionnement impacte directement les exportations ghanéennes, centrées sur les matières premières (cacao, or et pétrole). Le pays perd également l'accès au marché international et doit composer avec un financement intérieur de plus en plus restreint ainsi qu'avec une dépendance au financement monétaire du budget. La crise sera plus accentuée par la diminution des réserves internationales, la dépréciation de la monnaie (Cedi), la hausse de l'inflation et la détérioration de la confiance des investisseurs nationaux,...

En décembre 2022, le pays se déclare en défaut, incapable de rembourser ses dettes. Les autorités monétaires entament alors des négociations avec le Fonds monétaire international pour un plan de sauvetage. C'est la fin du « Ghana Beyond Aid » (Ghana sans aides) tant prôné par Akoufo Addo.

Après une facilité de crédit élargie de trois déjà accordée en 2015 (916 millions de dollars sur trios ans), le conseil d'administration de l'institution de Bretton Woods approuve la semaine dernière un nouvel accord sur 36 mois au titre de la facilité élargie de crédit  de 2,242 milliards de DTS (soit environ 3 milliards de dollars) en faveur du Ghana. La décision permettra de décaisser immédiatement l'équivalent de 451,4 millions de DTS (soit environ 600 millions de dollars).

« Le programme économique des autorités, soutenu par l'accord au titre de la FEC, s'appuie sur le programme postpandémie mis en place par le pays pour stimuler la croissance économique, qui vise à rétablir la stabilité macroéconomique et la viabilité de la dette en mettant en œuvre des réformes de grande envergure qui renforcent la résilience et posent les bases d'une croissance plus forte et plus inclusive » , explique le CA du FMI dans un communiqué.

Une batterie de réformes

Avec cette aide du FMI, le Ghana s'est dit prêt à appliquer un plan d'austérité afin de surmonter les difficultés économiques majeures, notamment en accélérant le rééquilibrage des finances publiques. UNE restructuration complète de la dette a été d'ailleurs lancée pour faire face aux graves contraintes de financement et au problème de viabilité de la dette. Le FMI annonce déjà qu'il sera « essentiel de conclure en temps voulu des accords de restructuration de la dette avec les créanciers extérieurs pour réussir la mise en œuvre du nouvel accord au titre de la FEC ».

Le Ghana est-il en train de vivre le scénario tunisien ? Le rétablissement de la stabilité macroéconomique et la viabilité de la dette ne seront palpables que dans quelques années et le gouvernement ghanéen doit désormais composer avec les tensions sociales et les réformes de grande envergure pour renforcer la résilience et espérer une reprise rapide de la croissance.

Mounir El Figuigui

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