Angola : le président Lourenço poursuit sa purge dans le clan Dos Santos

Le président angolais a démis de ses fonctions, José Filoméno Dos Santos, fils de son prédécesseur à la tête du pays et qui était jusque-là à la tête du Fonds d’investissement souverain. Cette décision qui intervient quelques mois après celle de l’autre fille de l’ex-Chef de l’Etat, Isabel Dos Santos, de la direction de la puissante compagnie pétrolière du pays, Sonangol, a l’allure d’une véritable purge dans les rangs du clan de José Eduardo Dos Santos. Ce que nie la présidence angolaise qui parle plutôt d’opération de lutte contre la corruption.
Une affiche de campagne à Luanda mettant en avant la candidature de José Eduardo Dos Santos lors du scrutin de 2012. Non sans ironie, l'on peut lire L'Angola va grandir et mieux distribuer.
Une affiche de campagne à Luanda mettant en avant la candidature de José Eduardo Dos Santos lors du scrutin de 2012. Non sans ironie, l'on peut lire "L'Angola va grandir et mieux distribuer". (Crédits : Reuters)

L'opération d'assainissement promise par Joao Lourenço prend de plus en plus l'allure d'une chasse aux sorcières visant le clan Dos Santos même si le chef de l'Etat angolais s'en défend. Le président angolais vient pourtant de démettre de ses fonctions le PDG du Fonds d'investissements souverain, José Filomeno dos Santos, alias « Zenu », qui n'est autre que le fils de l'ancien chef de l'Etat José Eduardo Dos Santos qui a trôné durant 38 ans à la tête du pays. La décision a été actée le mercredi dernier et c'est un ancien ministre des Finances, Carlos Alberto Lopes, qui prend désormais la direction de la gestion du fonds, l'un des plus importants du continent qui a été lancé en 2011 avec un capital de départ de 5 milliards de dollars.

Dans un communiqué publié ce jeudi et rapporté par l'agence officielle Angop, le ministère angolais des finances a expliqué les raisons qui ont motivé le départ de « Zenu ». Entre autres griefs reprochés au désormais ex-PDG, l'existence d'un risque élevé provenant de l'exposition engendrée par le volume d'actifs placé sous la gestion d'une seule entité extérieure.

« De l'évaluation faite, avec l'appui d'un cabinet de consultation international, sur l'allocation des actifs et structure de gouvernance corporative du Fonds souverain de l'Angola, le gouvernement a noté qu'il y a eu des rapports inadéquats ainsi qu'un faible contrôle et un manque de supervision adapté des activités de l'institution par les autorités gouvernementales », poursuit la même source.

Par ailleurs, le ministère des Finances a également relevé avoir décelé « une absence de vision stratégique et de plans d'investissements solides et transparents », et a donc estimé nécessaire la révision du modèle de gouvernance du Fonds. A la fin, le gouvernement, à travers le ministère des finances, envisage de restructurer les activités du fonds souverain, « en vue de créer une stratégie adéquate et un plan d'investissements pour assurer une large transparence et un contrôle de l'institution en conformité avec les meilleures pratiques internationales ».

C'est donc une procédure de contrôle des plus normales au cours de laquelle il a été constaté plusieurs manquements qui a officiellement eu raison du fils de l'ancien président qui a d'ailleurs été mis en cause en 2017, dans le scandale des "Paradise Papers". Selon ces révélations impliquant des sociétés offshore, des multinationales et de nombreuses personnalités issues de plusieurs pays, le fonds d'investissement souverain de l'Angola aurait versé des dizaines de millions de dollars à l'homme d'affaires suisse Jean-Claude Bastos, un proche José Filomeno Dos Santos.

Limogeage en série dans le clan Santos

Cette décision du président Lourenço intervient quelques mois à peine après celle du limogeage de Isabel Dos Santos, l'autre fille de l'ancien chef d'Etat qui était jusqu'en novembre dernier à la tête de la puissante Sonangol, la compagnie pétrolière publique de l'un des plus gros producteurs d'or noir du continent.

Lire aussi : Angola : Isabel dos Santos est-elle déjà tombée en disgrâce ?

Le gouvernement a également mis fin à des contrats attribués par des groupes de presse publiques à deux autres fils de Dos Santos en plus de renvoyer parallèlement, plusieurs autres responsables d'institutions publiques de premier plan en poste sous l'ancien régime notamment l'ex-responsable de la Banque centrale angolaise.

Cette série de limogeages a été qualifiée par certains de « chasse aux sorcières » et l'ancien président a même qualifié ces décisions de son successeur de « radicales ». Ce que rejette la présidence angolaise. Début janvier lors de la présentation des bilans de ses 100 premiers jours à la tête de l'Angola, Joao Lourenço a déclaré qu'il n y a aucune tension entre lui et l'ancien chef de l'Etat, qui reste le président du MPLA, le parti au pouvoir.

« Je ne vois aucune tension dans nos relations. Le président du Parti est guidé par les statuts du parti et moi en tant que président de la République, je cherche à respecter et à obéir à la Constitution ». Joao Lourenço

Lutte contre la corruption

Le chef de l'Etat angolais a toutefois réaffirmé son engagement à poursuivre son opération d'assainissement et de lutte contre la corruption, des promesses avec lesquelles il est venu à la tête du pays en septembre dernier.

Ces décisions montrent en tout cas que Lourenço n'entend point se comporter comme le « faire-valoir » de Dos Santos même si certains observateurs estiment qu'il prend de plus en plus de risques, l'ancien président disposant encore de relais au sein du pouvoir de Luanda surtout dans les rangs de l'armée. D'autres analystes estiment que cette purge vise justement pour Lourenço à atténuer l'emprise de l'ancien président sur le parti et ainsi avoir les coudées franches pour son mandat. Il reste à savoir si Joao Lourenço ira jusqu'au bout de ses promesses, c'est-à-dire traduire les responsables visés par des enquêtes devant la justice et c'est là où il va jouer sa survie politique même s'il a déjà démontré sa capacité à s'affranchir du clan Dos Santos.

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