Face à cette situation, il incombe aux pouvoirs publics et aux laboratoires pharmaceutiques de trouver des solutions pour rendre les médicaments de qualité, accessibles à tous et ainsi réduire l'usage des médicaments contrefaits ou de qualité inférieure. Une solution existe pourtant déjà : les médicaments génériques. Parfois redoutés et méconnus, les médicaments génériques de qualité sont pourtant très contrôlés : les processus de fabrication sont soumis à des tests de qualité réguliers et les bonnes pratiques de fabrication sont suivies avec précision pour garantir la même efficacité et la même sécurité que le médicament de référence. Ils offrent également l'avantage d'être au moins 30% moins chers que le médicament de référence, tout en étant aussi efficaces, offrant ainsi une alternative économique aux populations désireuses de se soigner avec des traitements de qualité. Alors, comment les laboratoires peuvent-ils promouvoir l'usage des médicaments génériques ?
Encourager la production locale de médicaments génériques
Si les médicaments de qualité, issus de circuits de distribution vérifiés, sont parfois moins abordables que les médicaments de la rue, c'est aussi parce qu'ils sont très souvent importés. L'Afrique est très dépendante des importations de médicaments : selon l'OMS, 95% de tous les médicaments utilisés sont importés et le continent ne représente que 3% de la production mondiale de médicaments[1]. Cette forte dépendance aux importations donne lieu à plusieurs problématiques : les médicaments importés sont proposés à des coûts plus élevés et l'offre de médicaments des laboratoires étrangers est parfois en inadéquation avec les besoins locaux.
Il est donc indispensable d'encourager la production locale de médicaments et plus particulièrement de médicaments génériques. Plusieurs pays se sont lancés dans la fabrication de médicaments : les autorités publiques de l'Afrique du Sud, du Maroc, de l'Égypte et du Kenya indiquent couvrir entre 70% et 80% de leurs besoins.
Il existe également de nombreuses initiatives privées : par exemple Swiss Pharma Nigeria Limited (SWIPHA), a récemment reçu une préqualification de l'OMS pour la production de son comprimé de zinc dispersible et doit prochainement être certifiée pour un antipaludéen. SWIPHA est la première entreprise au Nigéria et en Afrique subsaharienne à obtenir cette certification de l'OMS, distinction qui souligne la qualité des infrastructures et des médicaments produits par le laboratoire et qui témoigne de la capacité de l'Afrique à produire des médicaments génériques de qualité.
Les institutions internationales participent aussi à cette dynamique de développement de la production locale : Proparco, la filiale dédiée au secteur privé de l'Agence française de Développement (AFD), a ainsi accordé un prêt de 10 millions de dollars à un fabricant et distributeur indien de produits pharmaceutiques génériques, pour l'aider à accroître ses capacités de production sur le continent africain.
Ne pas choisir le prix au détriment de la qualité
Si l'émergence de laboratoires de médicaments génériques locaux est une première piste, la seconde vise à encourager les laboratoires pharmaceutiques à mettre sur le marché des médicaments génériques de qualité, à des prix abordables, afin de démontrer aux patients qu'ils ne doivent pas choisir le prix, au détriment de la qualité. Ainsi, les pouvoirs publics ne doivent agréer que les laboratoires qui s'engagent à ne produire et distribuer que des médicaments sûrs et efficaces, qui respectent les plus stricts standards internationaux de production et qui distribuent leurs médicaments dans des pharmacies agréées par les Etats.
Si chacun a le droit de bénéficier de traitements de qualité, encore faut-il que ces derniers ne représentent pas une part trop importante des dépenses des foyers. Selon l'ONG Santé Diabète, au Mali, 56% des ménages accueillant des personnes diabétiques dans leur foyer consacrent plus de 40% de leurs revenus aux dépenses de santé[4]. Une charge immense pour les ménages, que nous devons tous nous engager à faire baisser. Les médicaments génériques, en étant au moins 30% moins chers que le médicament de référence, offrent une solution de choix à cette problématique.
Un exemple significatif de l'impact des médicaments génériques concerne l'évolution des prix des médicaments antirétroviraux qui permettent de traiter le VIH. Selon l'OMS, le coût de la thérapie par patient et par an a chuté de 10 000 dollars à moins de 100 dollars suite à l'introduction sur le marché de médicaments génériques, ce qui a permis d'accroître considérablement l'accès au traitement : en 2003, seulement 500 000 personnes bénéficiaient de ces soins, contre 15,8 millions en 2015.
Accompagner et former
Si les médicaments génériques sont parfois redoutés, c'est aussi car ils sont méconnus. A ce sujet, il est nécessaire que pouvoirs publics et laboratoires pharmaceutiques s'associent pour accompagner et former à la fois les patients et les professionnels de santé. De vastes campagnes d'informations doivent être mises en place par les diverses instances gouvernementales pour informer les populations du fait que des solutions abordables et qualitatives existent en matière de soins et pour les rassurer sur l'utilisation des médicaments génériques et en démocratiser l'usage. Il est également indispensable de faire de la sensibilisation pour pousser chacun à avoir une forte exigence en matière de santé et encourager l'achat de médicaments en pharmacie et en circuits sécurisés plutôt que dans des circuits parallèles.
En ce qui concerne les professionnels de santé, il est nécessaire de les accompagner et de les former à l'utilisation et à la dispensation des médicaments génériques, afin de les soutenir dans ce changement de paradigme. Sur le continent africain, des initiatives qui permettent aux professionnels de santé de se former gratuitement sur diverses thématiques de santé pour garantir une prise en charge optimale de leurs patients existent déjà.
Les laboratoires pharmaceutiques et plus particulièrement les laboratoires de médicaments génériques ont tous un rôle à jouer en Afrique pour améliorer l'accès à des soins de qualité. Ce n'est qu'avec le concours de tous les acteurs, et ce, à tous les niveaux, que nous parviendrons à garantir ce droit fondamental et universel : permettre à chacun de se soigner avec des traitements de qualité.
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