Namibie : le président Geingob s’inspire du « Black Economic Empowerment »

Le chef d’Etat namibien a annoncé que son projet de loi sur la promotion d’une autonomisation économique équitable sera prêt d’ici la fin d’année. Malgré les controverses que l’initiative suscite, Hage Geingob estime qu’elle est nécessaire pour corriger certains déséquilibres de l’économie du pays. A terme, il s’agira de parvenir à une répartition plus juste des fruits de la croissance en promouvant la participation des namibiens notamment les noirs à la création des richesses. Une approche qui s’inspire de la même politique mise en œuvre en Afrique du Sud, pays avec lequel la Namibie partage quelques similitudes socioéconomiques.
(Crédits : DR)

Le président namibien ne cède et compte aller jusqu'au bout de l'adoption du nouveau d'autonomisation économique équitable, le "National Equitable Economic Empowerment Framework" (NEEF). Selon Hage Geingob, le projet de loi y afférent serait même prêt d'ici la fin de l'année. Le texte est actuellement en discussion au niveau du gouvernement avant son dépôt au Parlement. C'est ce qu'a fait savoir le chef de l'Etat qui a réuni cette semaine, son cabinet en séminaire gouvernemental sur le projet de loi destiné à favoriser une meilleure répartition des richesses entre les Namibiens et particulièrement les noirs.  «Nous allons nous attaquer aux obstacles structurels sous-jacents qui rendent difficile, voire impossible, la participation effective des Namibiens à l'économie » a expliqué le chef d'Etat namibien dans le discours qu'il a adressé à l'ouverture du séminaire de consultations sur les projets de loi.

« Le gouvernement a la double responsabilité de prendre soin des plus démunis et de créer un environnement où ceux qui ont les capacités peuvent prospérer plutôt que des individus. La répartition de la richesse par le bas est plus durable que la distribution de la richesse vers le haut. C'est le type de modèle que nous aimerions promouvoir en Namibie ».

Selon le président Hage Geingob, cette initiative vient en complément des efforts consentis par le gouvernement pour améliorer les conditions de vies des citoyens notamment les couches les plus défavorisées. Au cours de l'exercice en cours, c'est un montant de 6,7 milliards de dollars namibiens qui a été par exemple alloué par l'administration à la mis en œuvre de divers filets de sécurité sociale a fait savoir le chef de l'Etat que s'est dit «fiers que nous soyons en mesure de répondre aux doléances de la plupart de nos citoyens vulnérables, grâce à des subventions sociales ». Cependant, a-t-il ajouté, « nous ne pouvons pas construire une nation prospère autour de ce modèle » estimant que la NEEEF vise justement à apporter une réponse durable à ces distorsions socioéconomiques du modèle de développement du pays qui ne font qu'aggraver les inégalités.

La NEEF est constituée d'un ensemble de lois qui définit six domaines stratégiques de l'économie du pays par lesquelles le gouvernement entend agir pour accroitre la participation des Namibiens notamment les noirs dans les sociétés privées. La liste comprend notamment le développement des compétences et surtout, l'une des meures phares, l'octroi d'un financement aux défavorisées afin de leur permettre de prendre des participations dans des entreprises. A cette fin, les entreprises étrangères seront par exemple obligées de céder au moins 25% de leur capital à des noirs.

Modèle sud-africain

La « National Equitable Economic Empowerment Framework » du président Geingob s'inspire largement de la «Black Economic Empowerment», une politique mise en œuvre en Afrique du Sud à la fin de l'apartheid. Les pays semblent partager ce lourd héritage de la colonisation avec une domination de la minorité blanche qui ne représente que 6% de la population en Namibie, mais qui contrôle l'essentiel des grandes entreprises et donc de l'économie du pays.

« L'inégalité des revenus est aggravée par notre histoire politique assez singulière, y compris les questions brûlantes des terres. C'est une réalité malheureuse et une expérience quotidienne : les Namibiens noirs continuent de supporter le plus gros de cette période sombre de notre histoire. C'est pourquoi nous intensifierons les interventions correctives pendant la période restante du plan de prospérité Harambee. Plus tard cette année, nous convoquerons la deuxième conférence sur la terre. La conférence visera à traiter des inefficacités et des défis liés à la redistribution des terres ». Hage Geingob

 Dans son allocution le chef d'Etat namibien a d'ailleurs expliqué que cette nouvelle stratégie constitue une intervention nécessaire pour lutter contre l'inégalité structurelle « dont les disparités de revenus et le manque de participation de la majorité noire dans l'économie restent un héritage flagrant de notre passé ». Hage Geingob a profité de l'occasion pour conseiller aux entreprises de ne pas attendre que le projet de loi devienne une loi, mais d'être plutôt «proactif et de commencer à structurer et à mettre en œuvre des mesures d'autonomisation avec leurs employés».

Si les explications du président ne manquent pas de pertinence, la Namibie étant considérée comme un des pays les plus inégalitaires du continent, son initiative n'a pas soulevé des inquiétudes et même des réticences. C'est le cas de la Chambre du commerce namibienne ainsi que de plusieurs opérateurs économiques qui s'inquiètent des conséquences que les nouvelles dispositions risqueront d'engendrer sur l'activité économique déjà mal en point. Au sein de certaines parties de l'opposition et de l'opinion, on s'inquiète du risque de voir des personnalités proches du régime bénéficier des nouvelles facilités qui seront offertes, ce qui ne fera que faire émerger une nouvelle classe de riches dans le pays.

Des accusations que rejette en bloc le président Geingob pour qui il ne s'agit pour l'heure que des consultations avant l'adoption des textes définitifs, ce qui laisse la porte à toutes les propositions. Il a mis d'ailleurs au défi les détracteurs de son projet à proposer mieux s'ils en sont capables maintenant par ailleurs la légalité de son approche.

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