Espionnage : le siège de l’UA à Addis-Abeba, cheval de Troie de la Chine en Afrique

Par La Tribune Afrique  |   |  512  mots
En plus de la construction du siège de l'Union Africaine à Addis-Abeba, Pékin avait « gracieusement » offert le système informatique à l'UA. (Crédits : Reuters)
Le soft power chinois en Afrique et les bonnes relations entre Pékin et la majorité des Etats africains n’a pas empêché le gouvernement chinois d’offrir un cadeau empoisonné aux pays africains. En effet, une enquête de notre notre confrère "Le Monde Afrique" révèle que le siège de l’Union africaine à Addis-Abeba, qui a été "offert gracieusement" par Pékin et inauguré en 2012, était truffé de micros et ses serveurs trafiqués. Une faille majeure de la sécurité qui a duré de janvier 2012 à janvier 2017.

Le caractère confidentiel des échanges entre les différents chefs d'Etats africains et leurs délégations respectives qui se tiennent au siège éthiopien de l'Union africaine pourrait se révéler entièrement compromis. Offerte par la Chine en 2012, la tour de verre et ses dépendances qui doit abriter les 28 et 29 janvier prochains, le trentième sommet de l'organisation panafricaine, serait un gigantesque cheval de Troie que les agents des services de renseignements chinois ont truffé de micros lors de sa construction.

Cheval de Troie

En plus de la construction des bâtiments, Pékin avait « gracieusement » offert le système informatique à l'UA. Selon une enquête de notre confrère Le Monde Afrique, c'est justement en janvier 2017 que les informaticiens de l'organisation ont constatés une « étrange » saturation des serveurs de l'UA entre minuit et 2h du matin. Une anomalie qui après investigation s'est avérée être due à des transferts massifs de données internes de l'UA vers des serveurs hébergés dans les environs de Shanghai; la mégapole chinoise.

Cette découverte a permis d'identifier des backdoors laissés volontairement par les ingénieurs chinois en 2012 et qui offraient un accès discret et privilégiés à l'intégralité des échanges et productions internes de l'organisation. Cette gigantesque fuite de données aurait duré depuis 2012 jusqu'à la découverte du pot aux roses en janvier 2017. Les services de l'UA ont opté pour la discrétion dans cette affaire, se limitant à remercier les ingénieurs chinois qui étaient toujours détachés au siège, à acquérir leurs propres serveurs et décliner l'offre de Pékin de reconfigurer les serveurs compromis.

Bureaux et murs truffés de micros

Les télécommunications transitant par le siège de l'UA seraient désormais cryptées et ne passerait même plus par l'opérateur public éthiopien. Le dernier sommet qui s'est tenu en juillet dernier a également vu la découverte par des équipes algériennes et éthiopiennes de micros placés sous bureaux et dans les murs. Avec un budget de 10 millions de dollars allouée à l'informatique, la cybersécurité de l'Union africaine est une passoire qui ne compte que sur le soutien financier de la Banque mondiale.

Les opérations d'espionnage qui ciblent l'UA ne se limitent pas à la Chine, pour rappel les documents d'Edward Snowden prouvent que le GCHQ (service de cyber espionnage britannique) ont intercepté des courriers et appels de responsables panafricains entre 2009 et 2010, là où les services français privilégient le renseignement humain au sein de l'UA, allant jusqu'à tenter le recrutement de personnalités à la tête de la Commission.

Face à ses révélations, la réforme attendue de l'organisation confiée au président rwandais devrait tenir compte de cette faiblesse des contre-mesure de sécurité électronique, reste à savoir quelles seront les moyens qui seront mis en œuvre pour remédier à cette situation. Pour l'heure, seule une nouvelle architecture informatique « indépendante » de l'installation chinoise fonctionnant par câbles a été déployée.