Le digital, une révolution en marche pour les entrepreneurs africains

La révolution digitale peut faciliter la vie des entreprises et les aider à se développer, parfois de façon exponentielle...
(Crédits : Pixabay)

L'Afrique est une terre d'entrepreneurs. Peu d'entreprises pouvant offrir des emplois salariés, les habitants montent leur affaire pour vivre. De la cantinière installée en bord de route sous le parasol de son « garbadrôme » d'Abidjan, à la PME proposant des services informatiques au Nigeria, beaucoup se lancent ainsi dans l'entrepreneuriat. Celui-ci est clé pour la création d'emplois sur le continent : la population croît de façon exponentielle, et 450 millions de jeunes s'ajouteront aux actifs dans les 20 ou 30 prochaines années.

Mais comme le dit Jean-Michel Severino, pour réussir « les entrepreneurs africains doivent déplacer des montagnes » : les coûts d'infrastructure sont élevés (énergie, logistique), l'accès aux marchés pas toujours évident. L'obtention de financements peut vite tourner au cauchemar. En outre, la majorité des entrepreneurs sont « informels » : ils paient peu d'impôts, ne reçoivent aucune aide, pâtissant par ailleurs d'un climat des affaires globalement désastreux.

Dans ce contexte, une bonne nouvelle : la révolution digitale peut faciliter la vie des entreprises et les aider à se développer, parfois de façon exponentielle !

Un financement en 10 secondes grâce au digital

90% des entreprises africaines sont des PME/TPE. Elles assurent 60% des emplois du continent mais 80% ne reçoivent aucun financement. Dans ce contexte, le crédit digital a toute sa place. Les banques et institutions de microfinance permettent notamment aux clients d'effectuer leur demande de crédit en ligne grâce à leur smartphone, permettant des décaissements très rapides. Orange Bank Africa offre ainsi depuis 2020 en Côte d'Ivoire un crédit d'un montant minimal de 5000 FCFA sur un mois, renouvelé autant de fois que le client le demande, tant qu'il rembourse à temps. La demande est traitée en 10 secondes ! Les sociétés traditionnelles de micro-finance, comme Advans, présent dans 6 pays africains, se sont réinventées afin d'offrir des prêts digitaux. A l'est, le Kenya est en train de devenir un hub mondial des services financiers digitaux 4.0, avec une vingtaine d'applications permettant aux entreprises de se financer en ligne.

Des ventes en direct sur Instagram

Pour atteindre plus de clients, internet est un formidable outil. Les sites de e-commerce permettent aux vendeurs de proposer leurs produits à une cible élargie. Chari, plateforme marocaine B2B, également implantée en Tunisie, permet aux commerces de proximité (le réseau bien maillé des épiciers traditionnels) de commander leur stock en ligne et d'être livrés en moins de 24 heures. L'entreprise vise un chiffre d'affaires de 25 millions de dollars en 2021 et a levé 5 millions de dollars pour poursuivre son expansion en Afrique francophone. Trade Depot, au Nigéria, propose des services similaires auprès de 40 000 distributeurs (des femmes vendant sur des stands de rue). Au Kenya, Twiga Foods, la plateforme électronique de distribution alimentaire interentreprises, vient de clôturer un tour de table de 50 millions de dollars, notamment auprès de Creadev.

Par ailleurs, le marketing digital à destination des particuliers (B2C) connaît un essor considérable, et les réseaux sociaux constituent un vecteur de visibilité inégalé pour les entrepreneurs. Lactacare, société kenyane vendant des cookies stimulant la production du lait maternel, s'est développée grâce à Facebook et Instagram : elles permettent de communiquer autour du produit en mettant en avant les avis clients, de faire des publicités peu coûteuses et de vendre en ligne, sans nécessairement ouvrir de boutique physique.

Vers des administrations africaines 4.0 ?

Les démarches administratives de création d'entreprise sont lourdes et coûteuses. Elles impliquent souvent de devoir se déplacer auprès d'administrations lentes et ayant mise en place des systèmes parfois kafkaïens. Mais leur digitalisation avance aussi : au Ghana, depuis l'adoption de la nouvelle loi sur les sociétés en 2019, les entreprises peuvent effectuer en ligne l'intégralité de leurs démarches relatives au registre de commerce. Au Sénégal, les entreprises pourront dès cette année effectuer leur déclaration de revenus en ligne, et la fintech InTouch permet d'ores et déjà de payer toutes ses factures liées aux services publics et essentiels en ligne (eau, électricité, téléphone, etc.).

De jeunes entrepreneurs africains montent des licornes

Cette révolution digitale se fait particulièrement sentir dans quatre pays : l'Egypte, le Nigeria, le Kenya et l'Afrique du Sud, où sont apparues ces dernières années sept fameuses « licornes », ces start-ups valorisées à plus d'un milliard de dollars. Fawry en Egypte, OPay au Nigeria, et même Wave au Sénégal, montrent la voie aux entrepreneurs africains grands et petits : même si tous les entrepreneurs ne sont pas destinés à monter des fintechs d'ampleur mondiale, des modèles de réussite existent, qui peuvent inspirer les générations à venir.

(*) Ex-responsable juridique Groupe Advans.

(**) Co-fondateur Okan Partners.

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