Crise de l’emploi au Sénégal : à l’heure de la hauteur d’esprit

Un des problèmes les plus cruciaux auxquels le Sénégal est confronté est celui de l'emploi. Et quand, lassée de végéter face à un horizon bouché, la jeunesse prend la rue, on ne peut que souligner une colère légitime. Mais si on s'essayait à voir en toute objectivité les efforts du gouvernement, que verrait-on ?
(Crédits : Reuters)

L'un des grands malheurs de l'Afrique est qu'elle se divise entre une minorité qui agit et une majorité qui critique. Le vacarme des seconds porte plus fort : privilège de ceux qui ne tentent rien. Le Sénégal constitue un superbe cas d'école de cette dichotomie. Il ne viendrait à l'esprit de personne de dire du régime de Macky Sall qu'il est parfait : aucune œuvre humaine ne l'est. Mais l'esprit objectif ne peut lire que de la mauvaise foi quand on le voit accusé de tous les maux qui frappent le pays de la Terranga.

Certes, l'un des problèmes les plus cruciaux auxquels le Sénégal est confronté est celui de l'emploi. Alors que 70% de la population a moins de 35 ans, le marché du travail accueille 300 000 nouveaux demandeurs d'emploi chaque année. Deux jeunes sénégalais sur trois se retrouveront à un moment ou à un autre sans emploi. Et quand, lassée de végéter face à un horizon bouché, la jeunesse prend la rue, on ne peut que souligner une colère légitime. Mais si on s'essayait à voir en toute objectivité les efforts du gouvernement, que verrait-on ?

On verrait un exécutif à l'écoute, qui initie un Conseil présidentiel pour l'insertion et l'emploi des jeunes, moins d'un mois après les émeutes. Entre autres décisions fortes, on relèvera la mise en place d'un plan d'urgence de 450 milliards Fcfa, dédié aux problèmes de la jeunesse. Cette mesure ambitieuse, qui s'étend sur trois ans, vise à créer 500 000 emplois. Faut-il rappeler que l'initiative intervient, alors même que le continent n'a pas encore tourné la page de la crise du coronavirus ? Et qui pour parler du recrutement de 65 000 jeunes qui s'ouvre au mois de mai ?

« Opportunisme ! », s'empressent de crier les contempteurs. Mais qui pour leur rappeler qu'au mois de décembre dernier déjà, le Sénégal lançait les travaux pour l'élaboration d'une nouvelle stratégie de développement du secteur privé ? L'objectif clairement affiché était d'améliorer la participation de cet acteur important au développement du pays et donc à la lutte contre le chômage. Qui pour souligner que la Délégation générale à l'entrepreneuriat rapide des femmes et des jeunes a accompagné 106 000 bénéficiaires entre 2017 et 2020 ?

Alors que la jeunesse manifeste son impatience légitime, il est temps d'essayer autre chose. Et cela tombe bien, car aider à l'émergence d'un secteur privé fort et capable d'absorber la masse des demandeurs d'emploi du Sénégal est plus qu'un vœu pieux. Aujourd'hui, cette ambition est l'une des priorités de la phase 2 du plan Sénégal émergent (PSE).

Pour l'opposition, la situation actuelle est un aveu d'échec pour Macky Sall, après neuf ans à la tête du pays. Mais qui pour demander si avant l'arrivée de Macky Sall au pouvoir, le Sénégal était un pays de cocagne où régnait le plein-emploi ? Qui pour demander où sont les idées de cette opposition brillante et prompte à désigner le coupable à la vindicte ? Ledit coupable a permis au pays de passer d'une croissance de 3 à 4% entre 2008 et 2013 à 6,4% jusqu'en 2019.

Aujourd'hui, il s'agit moins de sauver ou condamner le soldat Macky que de poser un diagnostic juste des pathologies du patient Sénégal. Le président Macky Sall semble l'avoir compris. « Je serai toujours à vos côtés à la recherche de solutions et nous vous assurons de notre engagement volontariste en attendant que les efforts envisagés puissent porter leurs fruits... », dit-il. Et ces mots que les jeunes ont besoin d'entendre, seul lui aujourd'hui les prononce.

Alors, peut-être que pour que le Sénégal porte bien son nom (« notre pirogue »), il est temps que toutes ses forces vives rament enfin ensemble, dans la même direction.

(*) Journaliste, spécialiste des questions de gestion publique.

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