« Huànying lài dào Casablanca ! »

Au Maroc, les décisions prises ces dernières années au sommet de l'Etat comme par les institutions et opérateurs publics ont permis un rapprochement de taille entre le Royaume et la Chine.
Me Driss Debbagh est avocat au Barreau de Casablanca.
Me Driss Debbagh est avocat au Barreau de Casablanca. (Crédits : DR.)

Un proverbe chinois bien connu dit qu'un ami c'est une route, un ennemi, c'est un mur. En août dernier, Royal Air Maroc (RAM) annonçait le lancement d'une liaison directe Casablanca-Pékin à compter de janvier 2020. L'itinéraire sera exploité par des Boeing 789-9 Dreamliner. Les vols prendront le départ à partir de l'aéroport Mohammed V de Casablanca et les vols retour décolleront de Pékin, à raison de trois fois par semaine pour les premiers, comme pour les seconds.

Au-delà d'une simple ligne commerciale, il s'agit de la première liaison directe avec l'Asie depuis le Maghreb et l'Afrique de l'Ouest. Après l'ouverture de la ligne Casablanca Miami en avril 2019, la RAM fait du Maroc un pont stratégique et donne ainsi le « la » à la vision marocaine axée sur la « Stratégie Chine ». Cette nouvelle route aérienne viendra consolider les relations sino-marocaines. Abdelhamid Addou, PDG de la compagnie arienne marocaine, explique que cette ligne « permettra de répondre à un besoin fort exprimé par les opérateurs économiques des deux pays et participera à renforcer davantage les relations commerciales et économiques entre le Maroc et la Chine »Via son hub de Casablanca, le transporteur aérien marocain boostera l'afflux touristique chinois.

Conscients des opportunités qu'ouvre cette nouvelle ligne, l'Office national marocain du tourisme et le mastodonte chinois CTRIP ont signé un protocole d'accord pour promouvoir, auprès du premier pourvoyeur de touristes au monde, la destination Maroc. La décision royale de supprimer le visa pour les ressortissants chinois, prise en 2016 suite à la visite d'Etat du souverain à Pékin, avait déjà permis de recevoir près de 200 000 touristes chinois par an. Désormais, les autorités marocaines visent les 500 000 touristes par an, sachant que ceux-ci représentent 20 % des dépenses touristiques mondiales.

La Chine profitera également de cette nouvelle connexion qui lui permettra de relier Pékin à une centaine de destinations à travers le monde. En effet, les sujets d'intérêts communs ne se limitent pas aux volets économique et politique. Les dirigeants des deux pays s'intéressent aussi à la coopération culturelle. L'inauguration du Centre culturel de Chine à Rabat en 2018, la célébration du festival du printemps chinois à Chefchaouen, ville touristique au nord du Maroc en 2019, ou encore l'événement à venir Année du Maroc en Chine en 2020 confortent la voie d'échanges humains et culturels dans les deux sens.

La proximité sino-marocaine a insufflé un nouvel élan aux relations bilatérales depuis 2017. Durant cette année, le Royaume a accueilli la 2e édition du China-Africa Investment Forum et a pris part activement à l'initiative chinoise de ce développement mutuel en adhérant au projet des Nouvelles Routes de la Soie. Plusieurs conventions bilatérales ont été signées dans les domaines de l'économie, la culture, l'énergie, les infrastructures et même dans le domaine judiciaire et celui de la santé.

Les deux pays ont initié leur nouvelle coopération lors de la visite royale par le lancement du mégaprojet Cité Mohammed VI Tanger Tech. Ce projet consiste en la construction d'une nouvelle cité industrielle qui abritera des sociétés et industries chinoises pour la production de biens à destination de la population chinoise, mais avec une main-d'œuvre marocaine. Le promoteur du projet n'est autre que Othmane Benjelloun, PDG du Groupe BMCE Bank of Africa,qui généralement « n'aime pas parler d'un projet avant qu'il ne soit achevé ».

Plusieurs partenaires potentiels à l'international se sont manifestés pour s'implanter au Maroc. L'on peut citer le constructeur automobile BYD Auto Industry qui compte investir 360 millions de dollars ; l'équipementier en systèmes de direction Nexteer Automotive ; le fabricant de jantes en aluminium Citic Dicastralou encore l'un des plus grands investisseurs en Chine, la China State Construction Engineering Corporation.

D'autres grands projets sont au stade de l'étude, telle la Zone industrielle de Fès, la ligne de TGV Marrakech-Agadir, des projets de ports, de centrales électriques, d'énergies renouvelables, et de télécommunications avec notamment la nouvelle génération des standards de la téléphonie mobile 5G marquent la détermination commune des deux pays pour le renforcement de la coopération bilatérale et le développement économique de l'ensemble du continent africain.

Les deux pays font ainsi fait preuve de leurs ambitions d'élargir leurs relations extraterritoriales et de s'imposer mutuellement et conjointement comme partenaires politiques et acteurs économiques indispensables en Afrique. Evoquant cette coopération au niveau continental, Li Li, ambassadeur de Chine à Rabat, affirme que le Royaume demeure un pays fondamental dans la vision africaine de la Chine.

Ce relèvement accéléré des liens entre Rabat et Pékin mettra davantage en synergie l'initiative chinoise « One Belt, One Road ». À travers les liens tissés par le pavillon aérien national, vecteur tant économique que diplomatique, cette accélération posera les fondements de la nouvelle voie de coopération triangulaire Chine-Maroc-Afrique qui se dessine progressivement dans le prolongement de la péninsule ibérique vers l'Afrique atlantique jusqu'au Golfe de Guinée.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.