Les régions arabes et africaines doivent saisir les opportunités commerciales réciproques [Tribune]

Etablir des liens commerciaux et économiques solides entre les régions arabe et africaine est relativement simple mais il y a des enjeux importants. Un rapide aperçu sur le secteur agricole illustre ce point.
Hani Salem Sonbol, directeur général de l'ITFC.
Hani Salem Sonbol, directeur général de l'ITFC. (Crédits : DR)

L'agriculture en Afrique est le premier employeur du continent et contribue pour environ 15% au PIB de la région (OCDE). La plupart des pays arabes membres de l'Organisation de la Coopération Islamique (OCI) - y compris des membres géographiquement proches comme les pays du Conseil de Coopération du Golfe (CCG), importent une grande partie de leurs besoins agricoles. Pourtant, les échanges de produits agricoles entre les deux régions restent modestes.

Une étude du Centre du commerce international (ITC) demandée par la Société Internationale Islamique de Financement du Commerce (ITFC) a révélé qu'en 2016, l'Afrique subsaharienne, l'Afrique du Nord et le Moyen-Orient représentaient ensemble 15,1% du commerce mondial des produits agricoles. Toutefois, les échanges interrégionaux entre pays arabes et africains ne représentaient que 0,3% du volume total des échanges agricoles mondiaux. Cela démontre également l'énorme différence de capacités d'exportation entre les deux régions. Les marchés arabes de l'OCI exportent 1,06 trillions de dollars vers le monde, contre 0,16 trillions de dollars à destination d'Afrique subsaharienne, dont 70% des exportations sont relatives aux produits pétroliers.

Il est évident que le niveau des échanges commerciaux entre les deux régions de l'OCI ne reflète pas le potentiel existant entre les deux marchés. Compte tenu de la croissance démographique des jeunes et de ses besoins imminents en création d'emplois, sécurité alimentaire et diversification économique, les pays membres de l'OCI ont plus que jamais un rôle collectif à jouer pour renforcer le commerce entre les pays arabes et les pays d'Afrique sub saharienne.

Des opportunités imminentes à saisir

Les domaines de collaboration les plus prometteurs se trouvent dans les secteurs à fort potentiel de partenariats commerciaux et d'investissement entre les deux régions. L'étude ITFC-ITC révèle que les pays arabes ont le potentiel d'exporter des polymères, du ciment, des structures en fer / acier et des bâtiments préfabriqués, des produits nécessaires pour soutenir le développement des infrastructures en Afrique Sub-saharienne. Les industries agro-alimentaires telles que la canne à sucre, la farine de blé, le lait et la crème, les sardines en conserve et les boissons non alcoolisées ont également un potentiel d'exportation élevé, mais ne sont pas encore pleinement exploitées.

D'un autre côté, les pays d'Afrique Sub-Saharienne ont un potentiel élevé d'exportation de semences de bétail, de café et de sésame vers la région arabe. D'autre produits agro-alimentaires bénéficient d'un grand potentiel d'exportation vers la région arabe tels que les produits à base de cacao et les produits de la pêche, mais les échanges commerciaux de ces produits se limitent actuellement à l'Afrique Sub-Saharienne. Ce qui est évident, c'est que les industries agroalimentaires, les secteurs de la santé et de la pharmacie, les matériaux de construction, les machines et le matériel électrique ont un potentiel élevé de développement du commerce entre l'Afrique et les pays arabes.

Pourtant, les volumes d'échanges interrégionaux entre les pays arabes et africains de l'OCI ne représentent qu'une fraction des échanges commerciaux avec les marchés européens et, plus récemment, asiatiques.

Des solutions pratiques pour stimuler le commerce entre l'Afrique et les pays Arabes

Dans ce contexte, ITFC a lancé en 2017 le programme   « Arab Africa Trade Bridges (AATB) ». Le programme vise à faire face à certains des nombreux défis qu'affrontent les milieux d'affaires des pays arabes et d'Afrique subsaharienne et d'exploiter pleinement le potentiel commercial existant entre les deux régions.

Le programme aspire à faciliter la création de nouveaux partenariats pour le commerce, l'investissement et le transfert de technologie entre les deux régions. Favoriser la création de tels partenariats se fera par l'amélioration du climat général des affaires et des investissements, la promotion de la coopération public-privé au niveau régional et le soutient des chaînes de valeur interrégionales dans les secteurs économiques stratégiques.

Depuis son lancement, le programme AATB a mis en œuvre des programmes visant à accroître les échanges commerciaux entre les PMEs des deux régions. Il a également lancé des initiatives qui offrent des possibilités de financement du commerce et d'assurance aux crédits aux exportateurs des deux régions. En facilitant la coopération entre les institutions d'appui au commerce et aux investissements et en faisant directement appel au secteur privé, le programme AATB vise à favoriser le partage d'informations sur un éventail de problématiques cruciales pour les entreprises, telles que le manque d'information sur les marchés et la réglementation commerciale. Les partenariats avec le secteur privé et les institutions du secteur public permettent de fournir une assistance technique pour renforcer les capacités humaines et institutionnelles en matière de commerce et d'investissement. Plus important encore, le programme ouvre de nouvelles portes au financement du commerce islamique.

Financement du commerce islamique et commerce arabo-africain

Compte tenu de son mandat de promotion du commerce entre les pays membres de l'OCI et avec le monde, ITFC, par le biais du programme AATB, a établi des partenariats avec des institutions financières de la région arabe et d'Afrique subsaharienne afin d'offrir des lignes de financement incitatives à l'appui des flux commerciaux entre les régions.

Parmi ceux-ci, le Programme Arabo-Africain de financement du commerce (AATFP) qui propose une approche globale de financement du commerce à travers la mise en place d'une plateforme d'atténuation des risques et de ligne de soutien de la trésorerie. Il s'agit de lignes de crédit à court terme et de mécanismes de partage des risques proposés aux institutions financières opérant dans les pays d'Afrique subsaharienne et des pays arabes afin de faciliter leurs propres opérations de financement du commerce.

En 2017, ITFC a noué de nouveaux partenariats avec la Banque Centrale Populaire du Maroc (BCP) afin de soutenir sa filiale ouest-africaine, la Banque Atlantique, pour un montant de 40 millions d'euros. Il a également mis en place avec AFREXIMBANK une ligne Murabaha en deux étapes d'un montant de 150 millions de dollars américains, dédiée au financement des exportations de produits de base de 13 pays de l'Afrique subsaharienne et des importations de trois pays arabes.

La fourniture de solutions pratiques telles que la finance, la promotion du commerce, la connaissance du marché, le renforcement des capacités et la mise en relation commerciale ouvre de nouvelles perspectives et ouvre la voie aux entreprises souhaitant tirer parti de deux régions voisines présentant un potentiel d'exportation énorme.

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