Sidi Tiémoko Touré : « Rien ne s’oppose à la candidature d’Alassane Ouattara »

Sidi Tiémoko Touré, le porte-parole du gouvernement ivoirien et ministre de la Communication et des médias, revient sur la candidature d'Alassane Dramane Ouattara aux élections présidentielles d'octobre prochain. Avec ce choix, le Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix (RHDP) « a joué sa meilleure carte » selon le ministre de la Communication et des Médias, pour qui cette candidature est non seulement légale, mais aussi légitime...
(Crédits : Min. Com. / CI)

La Tribune Afrique - Quel regard portez-vous sur le bilan du président Alassane Dramane Ouattara qui achève son second mandat présidentiel ?

Sidi Tiémoko Touré, Porte-parole du Gouvernement, ministre de la Communication et des Médias: Le bilan du président Ouattara est positif, ce qui nous permet aujourd'hui de demander aux candidats de l'opposition, quel sera leur offre politique afin de juger sur pièce, ce qu'ils peuvent faire pour la Côte d'Ivoire. Que ce soit le PDCI (Parti démocratique de Côte d'Ivoire) de Henri Konan Bédié, le FPI (Front populaire ivoirien) de Laurent Gbagbo ou même le RHDP (Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix, le parti d'Alassane Ouattara) : chaque grande tendance a déjà eu l'opportunité de diriger la Côte d'Ivoire (...) Le président Ouattara est arrivé au pouvoir dans un contexte de crise électorale alors que tous les indicateurs étaient au rouge. Il lui a fallu déployer une force de travail titanesque pour relever la situation. Nous sommes partis d'un taux de croissance négatif en 2011 à près de 7% en moyenne entre 2012 et 2019, selon la Banque mondiale.

Les indicateurs macroéconomiques ne sont pas nécessairement synonymes de richesse partagée et nombre de voix ivoiriennes soulignent le manque d'inclusivité de la croissance nationale. Comment l'expliquez-vous ?

Le taux de pauvreté était de l'ordre de 10% environ en 1985, il atteignait 55% environ en 2011. En 2018, il était passé à 39% et nous comptons atteindre 30% en 2020, dès la réactualisation des indicateurs. Beaucoup d'efforts ont été consentis au niveau social, grâce au Plan national de développement 2011-2015 qui a permis de s'atteler aux problématiques de sortie de crise, intégrant la mise à niveau des infrastructures, la problématique du désarmement et de la réinsertion des soldats, mais aussi un certain nombre de mesures sociales. Un second plan a été mis en place pour la période 2016-2020 qui a boosté les investissements dans les secteurs-clés. Depuis 2 ans, une initiative très forte a été portée par feu l'ancien Premier ministre, Amadou Gon Coulibaly, qui est le Programme social du gouvernement, doté de 1 008 Mds de F.CFA. L'objectif de ce plan est d'apporter la solidarité gouvernementale aux individus les plus défavorisés, en matière d'eau et d'électricité notamment. Aujourd'hui, la problématique de la disponibilité en eau a été réglée sur tout le territoire, et nous sommes en train de régler celle de la distribution...

Qu'est-ce que le président Ouattara peut apporter de plus en briguant un nouveau mandat ?

Premièrement, la consolidation des acquis. Une fois les acquis préservés, nous irons beaucoup plus loin. Le taux de couverture national de l'électricité est passé de 33% en 2011 à plus de 73,6% en 2020. Lorsque vous atteignez ce taux de couverture, il ne vous reste plus qu'une partie limitée à couvrir. Nous nous assurerons qu'il n'y aura bientôt plus de problème de disponibilité en eau ou en électricité en Côte d'Ivoire.

Nous voulons également généraliser les filets sociaux afin qu'ils profitent au plus grand nombre. Au 1er trimestre 2020, le programme des filets sociaux productifs a permis de soutenir quelque 127 000 ménages à travers des transferts monétaires de 144 000 Fcfa par an et par famille. Chaque bénéficiaire dispose de la couverture maladie universelle et de la gratuité de l'école, qui est d'ailleurs obligatoire jusqu'à l'âge de 16 ans. Ce sont tous ces dispositifs qui permettent à la Côte d'Ivoire de sortir la pauvreté.

N'y avait-il pas d'autre candidat au sein du RHDP pour succéder à Alassane Ouattara après le décès d'Amadou Gon Coulibaly ? Le président avait fait part de sa volonté de voir s'affirmer la jeunesse ivoirienne en politique or, le scénario de ces présidentielles 2020 est tout autre...

La question que nous nous sommes posée est la suivante : quelle est la personne qui peut nous garantir l'union et l'unité d'action ? Un parti politique doit gagner les élections. Dans la mesure où Alassane Ouattara a le droit de se représenter dans le cadre de la Constitution de 2016, l'analyse a été faite en interne qu'il était le meilleur candidat. A 4 mois de l'échéance des dépôts de candidatures, après le décès soudain d'Amadou Gon Coulibaly, les cadres du parti se sont concertés et ont décidé de se présenter avec leur meilleure carte. Bien qu'Alassane Ouattara ait manifesté sa volonté de partir pour laisser le pouvoir à de plus jeunes générations, il a finalement accepté de rester, à la demande de tous les cadres du RHDP. Cette décision est parfaitement légitime.

Le débat se poursuit autour de la légalité d'un troisième mandat présidentiel, qui serait le premier de la nouvelle Constitution. Qui est compétent pour trancher sur la légalité de cette candidature ?

C'est le juge du Conseil constitutionnel. Chacun des candidats a été plus ou moins apte à déposer sa candidature, grâce à la nouvelle Constitution. C'est précisément cette nouvelle Constitution qui a permis à Henry Konan Bédié de se présenter, en dépit d'un âge très avancé. Lui-même a réalisé pratiquement 2 mandats. Quant à Laurent Gbagbo, si tant est qu'il ait exprimé le désir de se présenter -bien que sa candidature ait été déposée-, il briguerait un troisième mandat. En réalité, avec cette Constitution les principaux leaders politiques de la Côte d'Ivoire avaient tous la possibilité de faire un troisième mandat...

Cette situation reflète une classe politique qui laisse peu de place à la jeunesse ivoirienne...

Nous espérons tous voir de nouveaux visages émerger néanmoins, les raisons avancées pour remettre en question la candidature d'Alassane Ouattara sont « farfelues ». Rien ne s'oppose à sa candidature pour ce premier mandat d'une nouvelle République. Encore une fois, il voulait prendre du recul, mais ce sont les circonstances qui l'ont obligé à rester.

Laurent Gbagbo est toujours à l'étranger, dans l'attente de son passeport : qu'est-ce qui empêche son retour ?

L'obtention d'un passeport relève d'une procédure connue de tous. Il faut fournir documents, des empreintes, etc. Allez demander aux conseillers de Monsieur Gbagbo pourquoi ils n'arrivent pas à remplir les documents ! S'agissant du passeport ordinaire, la procédure est transparente et nul ne peut s'y soustraire. La procédure pour obtenir un passeport diplomatique relève du pouvoir discrétionnaire du président de la République. La personne qui souhaite obtenir un passeport diplomatique, qui est un document de courtoisie, doit en faire la demande directement auprès du Président de la République. Cela n'a pas été fait à ce jour.

Peut-être savait-il que cela était peine perdue ?

On ne peut pas présupposer de la réponse du Président de la République. Peut-être refuse-t-il au président Ouattara de reconnaître sa qualité de président. Il existe quand même un conflit de positionnement sur les résultats des élections présidentielles qui l'ont conduit à La Haye... Aller demander à une telle personnalité de faire une requête ordinaire au président de la République pour demander un document de courtoisie, c'est renier une position qu'il a tenu et qui a causé 3 000 morts en Côte d'Ivoire.

Qu'en est-il d'un retour prochain de Guillaume Soro en Côte d'Ivoire ?

Nous l'attendons. Il est en exil volontaire. Alors qu'il avait décidé de rentrer en Côte d'Ivoire, il a lui-même pris la décision de dérouter son avion, car il se savait sous le coup d'une information judiciaire, sur la base d'enregistrements audio où il retraçait le parcours d'une déstabilisation de la Côte d'Ivoire. Il a admis les faits. Le juge d'instruction a voulu l'entendre et c'est à ce moment-là qu'il a pris la poudre d'escampette pour s'installer à Paris. S'il rentre, la justice fera son travail.

Propos recueillis par Marie-France Réveillard

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