Les femmes, nouvelles richesses de la croissance africaine

Pour fonctionner, la coopération entre les deux continents a besoin de tous les talents, notamment féminins. Anino Emuwa, directrice d'Avandis Consulting et fondatrice d'Africa Women CEOs Network, Inès Leonarduzzi, fondatrice et présidente de l'ONG Digital For The Planet et Donia Kaouach, directrice générale des Leaders pour la paix, sont venues le mardi 16 mai à Marseille témoigner de leur engagement et de leur contribution à ces relations à l'occasion du Forum Europe-Afrique organisé par La Tribune.
Anino Emuwa (Avandis Consulting), Inès Leonarduzzi (Digital for The Planet), et Donia Kaouach (Leaders pour la paix).
Anino Emuwa (Avandis Consulting), Inès Leonarduzzi (Digital for The Planet), et Donia Kaouach (Leaders pour la paix). (Crédits : DR)

Lorsque Anino Emuwa, directrice d'Avandis Consulting et fondatrice de l'organisation Africa Women CEOs Network, s'est penchée sur les données relatives aux femmes cheffes d'entreprises en Afrique, elle a réalisé que « les top 20 PDG dirigeaient des entreprises réalisant au moins 100 millions d'euros de chiffre d'affaires ». Et qu'au total, « ces 20 femmes géraient des recettes supérieures à 60 milliards de dollars ».

Malgré cette bonne dynamique, les femmes leaders restent encore souvent considérées comme « une anomalie », estime cette ex-banquière, spécialiste de l'entrepreneuriat, passée par la London School of Economics. Tout l'objectif de son organisation est donc de donner aux femmes CEOs davantage de visibilité, leur ouvrir des portes sur la scène internationale à travers des initiatives telles 100Women@Davos, et leur fournir un réseau. Anino Emuwa en est convaincue : « Les organisations où le leadership est équilibré entre les hommes et les femmes sont plus performantes et les critères ESG davantage pris au sérieux », dit-elle. De quoi renforcer aussi leur rôle dans l'innovation qui fleurit en Afrique, des industries culturelles aux énergies renouvelables.

Un numérique responsable

Inès Leonarduzzi crée elle aussi des ponts entre les continents. La fondatrice de l'ONG Digital for The Planet, basée à Paris, New York, Berlin et Le Cap et qui œuvre en faveur d'un numérique responsable, à travers ses antennes dans 14 pays, en éduquant les jeunes à l'écologie numérique et aux dangers de son impact sur la planète mais aussi sur le cerveau et la société - les trois, pour elle, étant liés. De même, en faisant du lobbying citoyen auprès des gouvernements en ce qui concerne leurs politiques environnementale et sociale. Son cheval de bataille, entre autres : l'extraction de minerais tel le coltan, en République Démocratique du Congo (RDC), nécessaires à la fabrication des smartphones, par exemple. « L'extraction de ces minerais occasionne des conflits armés et surtout, la mise en danger des femmes et des enfants », prévient l'auteure de « Réparer le futur ». Une problématique complexe, puisque des mines responsables « se tiennent à 30 mètres d'une mine non responsable, avec des policiers qui brutalisent les enfants venant travailler dans celle-ci parce qu'ils ont besoin de gagner de l'argent », témoigne-t-elle. Pour Inès Leonarduzzi, le véritable enjeu n'est pas de se donner bonne conscience, mais de s'interroger sur l'action à mener sur toute la chaîne de valeur. « Ce qui est important pour moi, c'est de créer des ponts avec des femmes, des hommes, et mes homologues dans chaque pays africain - et notamment des pays qui posent problème sur des conflits de minerais - afin de voir comment nous pouvons faire en sorte de parler à un maximum de leaders », dit-elle, pour les convaincre de changer.

Former les futurs leaders

Enfin, pour se développer économiquement, quel que soit le secteur porteur de croissance et d'innovation, encore faut-il la paix. C'est le combat de Donia Kaouach, directrice générale des Leaders pour la paix, une organisation co-créée avec Jean-Pierre Raffarin, qui a mis sur pied une Ecole itinérante de la paix dont la vocation est de favoriser l'émergence de classes dirigeantes dans divers pays. Concrètement, « nous donnons à de jeunes leaders, dont de nombreux en Afrique, des outils pour retrouver la capacité de discernement, sortir de la radicalité et aborder le monde complexe dans lequel nous vivons », explique Donia Kaouach. « Nous nous installons dans un pays et nous formons des jeunes leaders qui sont sélectionnés par une université locale, les meilleurs et ceux qui ont appétence pour la vie publique et nous espérons que sur une promotion de 500 étudiants, peut-être quatre ou cinq prendront des responsabilités », poursuit-elle. Et ce, à travers des formations construites avec des universitaires, le personnel politique et des intellectuels, une « école d'été » à Genève pour former un réseau de même qu'en leur donnant des rôles modèles. Pour la jeune femme, fondatrice par ailleurs du think tank Tunisiennes Fières, « dans ce monde, l'Afrique doit prendre une nouvelle place ». Enseigner la culture africaine en Europe, créer un Erasmus africain permettant aux talents d'y venir étudier et construire les infrastructures sont autant de propositions qu'elle porte pour développer les liens entre les deux continents.

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