Afrique du Sud : Cyril Ramaphosa devient président après 11 ans d’attente

Il aura fallu 3 mois à Cyril Ramaphosa pour avoir la tête de Jacob Zuma et occuper le poste qui lui était promis et lui avait échappé en 1997. Perçu comme le sauveur de l’ANC, ce bras droit de Mandela a lui-même été évincé par l’état-major du parti qui lui préférait Thabo Mbeki, près de 11 ans plus tard et un crochet mouvementé par les affaires, c’est à son tour de pousser vers la sortie Jacob Zuma.
Cyril Ramaphosa tout sourire après avoir reçu l'aval des parlementaires pour accéder à la magistrature suprême en Afrique du Sud.
Cyril Ramaphosa tout sourire après avoir reçu l'aval des parlementaires pour accéder à la magistrature suprême en Afrique du Sud. (Crédits : Reuters)

Cyril Rampahosa vient d'être élu nouveau président de la République sud-africaine, après avoir poussé Jacob Zuma à la démission. Celui qui s'est hissé à la tête de l'ANC le 18 décembre dernier est issu d'une famille modeste et fait partie des « héros » de la lutte contre l'apartheid. Cet homme d'affaires de 65 ans est arrivé à se positionner comme le sauveur de l'ANC dont la domination sur le champs politique sud-africain commence à faiblir.

Bras droit de Madiba

Né en 1952 en Johannesburg, Ramaphosa a grandi dans le township de Soweto. Arrivé à l'université, il opte pour des études de droits et s'engage très tôt dans la lutte contre l'apartheid et fait quelques passages en prison avant de devenir avocat. Cet actuel propriétaire de mines a participé à la fondation du Syndicat national des mineurs (NUM), qui devient rapidement la plus importante centrale syndicale du pays, regroupant 300.000 adhérents.

Ramaphosa Mandela

Ce qui lui a permis de faire parler de lui, lors des grèves de 1987 où il tiendra tête au patronat blanc. Cyril Ramaphosa était pour rappel le bras droit de Nelson Mandela et se tenait à ses côtés au moment de sa libération en février 1990. Madiba l'avait même désigné comme l'artisan de sa libération et un personnage clé de la transition démocratique. Il sera nommé à la tête de l'assemblée constituante et dirigera la rédaction de la Constitution actuellement en vigueur et adoptée en 1996.

Ecarté par le parti en 1997

Contre toutes les attentes, ce ne sera pas lui qui succédera à Madiba en 1997, l'état-major de l'ANC lui préferant Thabo Mbeki. Un revers qui le pousse à quitter le parti pour se lancer dans les affaires. Il sera l'un des premiers à bénéficier de la politique de discrimination positive qui vise à créer une classe d'entrepreneurs noirs. Une reconversion dans les affaires qui serait une sorte de compensation au revirement de Mandela et de l'ANC.

A la tête du fonds d'investissement Shanduka, Ramaphosa investira dans les mines, dans l'immobilier et dans les filiales sud-africaines de géants comme McDonald's et Coca-Cola. Au début des années 2000, Ramaphosa incarne la nouvelle élite économique noire, apparaissant dans le top 50 des richesses africaines de Forbes en 2005 avec une fortune estimée à l'époque à 450 millions de dollars.

La page noire de Marikana

Bien qu'il soit dépeint maintenant comme le sauveur de l'ANC après les deux mandats tumultueux de Jacob Zuma. Cyril Ramaphosa, ancien syndicaliste a sollicité une intervention policière en 2012 en tant que membre du conseil d'administration de la mine de Marikana qui était en grève. Cet ordre a débouché sur une intervention musclée de la police faisant 34 morts par balles chez les mineurs.

Lors de la même année, Ramapahosa revient au-devant de la scène politique et partisane en se faisant parachuter comme vice-président de l'ANC, sur demande de Jacob Zuma qui entamait la campagne électorale pour sa réélection et qui devait faire face aux premières accusations de corruption. En 2014, il fera son entrée au gouvernement en tant que vice-président et restera en dehors des scandales de collusions et de corruptions qui éclaboussent l'entourage présidentiel dès 2015.

3 mois pour venir à bout de Zuma

La rupture entre les deux hommes sera consommée avec l'affaire Gordhan. Le choc frontal entre les deux caciques du parti s'est produit le 16 décembre dernier où Ramaphosa réussit à obtenir trois décisions de justice disqualifiant 100 délégués fidèles à Zuma. Le nouveau président a également réussi à retourner des délégués de provinces clés, ce qui lui permis de remporter les élections internes à 52% face à Nkosazane Dlamini-Zuma, ex-épouse et dauphine désignée par Zuma.

Zuma Ramaphosa

En deux mois, Ramaphosa s'est employé à noyauter le Comité exécutif national (NEC) de l'ANC, puis à prendre en main une partie de l'exécutif, notamment la justice déçu par les années Zuma, à l'international il présidera la délégation sud-africaine au Forum de Davos. Dans un premier temps, Ramaphosa cherche à ménager son prédécesseur et à lui éviter une « humiliation » et opte pour des négociations discrètes pour décrocher sa démission.

Face à la résistance de Jacob Zuma et son refus d'engager de réelles discussions sur les modalités de son départ selon le NEC. Le parti repris en main par Ramaphosa a opté pour la manière forte, ordonnant à Jacob Zuma de présenter sa démission, déclenchant une opération policière musclée contre les Gupta et programmant une motion de censure. Ce qui a poussé Jacob Zuma à annoncer sa démission à la télévision publique dans la nuit de ce mercredi 14 février.

Une passation de pouvoir aux airs de tragédie romaine qui pour rappel est en passe de devenir un rituel en Afrique du Sud et notamment au sein de l'ANC. A l'exception de Nelson Mandela, tant Thabo Mbeki que Jacob Zuma ont perdu leurs postes suite à des manœuvres partisanes.

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