RDC / Mines : 20 jours après l'accablant rapport du Centre Carter, Gécamines contre-attaque

La Générale des carrières et des mines (Gécamines) aura attendu vingt jours pour se prononcer sur le rapport « à charge » publié en début de mois par le Centre Carter. Une enquête dont les conclusions sont rejetées par l’entreprise qui a qualifié les chiffres avancés « d’opportunément approximatifs ». La description faite par l’ONG serait « partielle et orientée » et aurait pour objectif de défendre une « vision idéologique » du secteur minier de RDC, riposte Gécamines.
Amine Ater

Dans le sillage de l'enquête rendue publique le 3 novembre 2017 par le Centre Carter, qui épingle la Gécamines pour manque de transparence, ainsi que pour n'avoir reversé que 5% du milliard et demi de dollars de revenus engrangés entre 2009 et 2014, la société mise en cause réagit. Selon l'enquête, 750 millions de dollars de recettes auraient disparus entre 2011 et 2014. La Gécamines est également accusée d'adopter un mode de gestion « court-termiste », au détriment de l'intérêt public et qui se traduirait par un accroissement de sa dette et des retards dans la mise en exploitation de certaines concessions.

Le Centre a par ailleurs recommandé aux bailleurs de fonds de la RDC d'exiger plus de transparence à l'entreprise voire à envisager des poursuites judiciaires et des sanctions. Le 21 juillet dernier, l'ONG Global Witness accusait l'entreprise de reverser une grande partie de ses bénéfices à l'entourage du président Joseph Kabila. Une étude intitulée « Distributeur automatiques de billets du régime; Comment les exportations en plein essor de la République démocratique du Congo ne profitent pas à ses habitants » que le management du groupe minier estime être « biaisée ».

Après avoir encaissé la tempête médiatique suscité par la publication le 3 novembre dernier du rapport de la fondation Carter, intitulé « Affaire d'Etat : Privatisation du secteur du cuivre en République Démocratique du Congo », la Générale des carrières et des mines (Gécamines) vient de lancer sa contre-attaque contre ce qu'elle décrit comme « un rapport à charge contre Gécamines ».

Chiffres erronés ?

Accusé par l'ONG de percevoir et dépenser d'importantes sommes d'argents en l'absence de mécanisme de contrôle interne ou externe, de n'apporter qu'une modeste contribution au budget de l'Etat ou à son propre redressement, ces mêmes sommes seraient détournées à d'autres fins grâce à un traitement dérogatoire. Des accusations qui ne semblent pas inquiéter outre-mesure le management de Gécamines.

Dans sa contre-attaque, l'opérateur minier a critiqué en premier « l'exploitation opportunément approximative des chiffres et données statistiques ». L'entreprise a ainsi qualifié l'argumentaire présenté par la fondation de « contre-vérités », notamment les revenus issus des partenariats conclus entre 2009 et 2014 dont l'enquête aurait attribué à tort près de 281 millions de dollars. Gécamines remet également en cause le chiffre avancé par l'ONG concernant sa contribution au budget de l'Etat qu'elle revendique être 100 fois plus important que dans le rapport.

Description orientée ?

« Gécamines regrette que le Centre Carter profère des accusations aussi graves contre Gécamines, censées édifier l'opinion publique mondiale, sur la foi d'estimations dont il apparaît qu'elles sont manifestement erronées. Gécamines tient enfin à rappeler qu'elle rend compte à tout moment à son actionnaire unique, qui contrôle son action et dûment représenté au sein des organes sociaux de la société », se défend le management de l'entreprise dans un communiqué.

L'opérateur a par ailleurs tenu à préciser que ses états financiers étaient « non seulement certifiés par un commissaire aux comptes mais aussi audités par les plus grands cabinets d'audit au monde ». Le groupe estime que cette enquête est perçue comme une « description partielle et orientée du statut de Gécamines », et réfute toute action qui aurait pour conséquence de distordre la concurrence entre les opérateurs, alors que selon le management, la quasi-totalité de la production minière de la RDC est dévolue aux partenaires extérieurs.

Idéologie

Le rapport de l'ONG est ainsi taxé de « vision idéologique » de la production minière en RDC. Le management de l'entreprise pointe ainsi la recommandation du centre qui l'incite à abandonner son statut de producteur et se cantonner à celui de gestionnaire de portefeuille de participation minoritaires. Une recommandation que l'entreprise aurait déjà adopté depuis près de 15 ans et n'aurait conduit qu'à l'appauvrissement de la RDC.

Le groupe minier rappelle que les participations minoritaires ne « produisent pas de dividendes depuis près de 15 ans, alors que certains partenaires génèrent un chiffre d'affaires de plusieurs milliards de dollars ». Pour le management du groupe, le Centre Carter aurait volontairement omis de prendre en considération les pratiques et politiques de gestion des partenaires extérieurs « ayant pour effet de minorer artificiellement leurs résultats tels que révélées à la faveur d'audits indépendants commandés par Gécamines. De façons surprenante, ce déséquilibre et ces pratiques ne sont jamais dénoncées et sont encore moins l'objet de rapports tonitruants comme celui publié par le Centre Carter ».

Amine Ater

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