Soudan : sur un chemin pavé de défis, la transition post-El Béchir en marche !

Il faut désormais régler les modalités du transfert du pouvoir aux civils en plus de celles de mise en place d’un nouveau cadre législatif. Mais pour l’heure, le processus est presque achevé pour organiser le pays après la chute en avril dernier d’Omar El Béchir. Après plusieurs atermoiements, militaires et civils on conclu un accord avant de le parapher dans la foulée. Avec une signature officiellement prévue le 17 août, le pays devrait tourner dès le lendemain, une page importante de son histoire.
Ibrahima Bayo Jr.
(Crédits : Reuters)

Le temps des faux-fuyants et de la méfiance semble être passé. Civils, opposition et militaires souhaitent laisser passer la période de la fête musulmane de Aïd al-Adha avant d'engager les choses sérieuses. En attendant, Mohamed El Hassan Ould Lebbat, médiateur pour le compte de l'Union africaine (UA); semble avoir réussi à mettre les parties sur la même longueur d'ondes.

Problème africain, solutions africaines!

Ce samedi 3 août, le diplomate mauritanien et Mohamed Dreir, émissaire du Premier ministre éthiopien, sont parvenus à arracher la conclusion d'un Accord sur la transition au Soudan. Ce qui vaut à Mohamed Dreir ce commentaire abondamment repris par toute la presse continentale: «Nous avons montré au monde que les Africains peuvent résoudre leurs problèmes par des solutions africaines sans ingérence extérieure».

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Et c'est peu dire des avancées dans l'épineux dossier de la transition politique après la chute d'Omar El Béchir. Le lendemain de cette victoire diplomatique pour l'Union africaine, les médiateurs ont fait parapher le texte. Que contient-il ? De ce qui a transpiré du conclave, un calendrier des dispositions et des engagements des deux parties pour doter le pays d'un nouveau système inclusif de gestion des affaires. Ce nouveau système, qui sera mis en place dès la signature de l'Accord prévue le 17 août, s'articule autour de plusieurs axes.

Sur le volet institutionnel, l'architecture des différents organes de pouvoir place la transition sous trois pôles de décision. Il y a d'abord le Conseil souverain en remplacement du Conseil militaire de transition (CMT). A sa tête, cinq militaires siégeront à côté de six civils issus de l'opposition et de la plateforme qui a mené la contestation. Ce conseil représentant les différentes sensibilités sera complété par la nomination d'un Premier ministre désigné par les civils. Il faudra ensuite compter 90 jours pour voir la mise en place d'un Parlement pour préparer l'avènement d'une nouvelle Constitution qui devra verrouiller le système politique et préparer le transfert du pouvoir aux civils.

Des défis pour tourner une page importante de l'histoire du Soudan

Loin d'un catalogue de bonnes intentions, l'Accord global ouvrirait la voie aux Soudanais pour tourner une page importante de leur histoire. Avant sa chute en avril dernier, Omar El Béchir régnait sans partage depuis son arrivée au pouvoir par les armes en 1989 en déposant le Premier ministre Sadeq Al-Mahdi. Constitué de milices et de soldats réguliers, le CMT qui l'a contraint à la démission après des mois de contestation populaire n'a guère fait mieux avec des accusations de répressions et d'exactions sur les contestataires sans tenue. «Nous ne nous reposerons pas jusqu'à ce que tous les coupables de violation du droit du peuple soudanais soient punis», a prévenu, Mohammad Hamdan Daglo, vice-président du Conseil militaire.

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Pourtant, plusieurs défis jalonnent cette marche vers la transition. La question du respect des engagements contenus dans l'accord se pose avec acuité. Pour les militaires qui doivent céder la main à des civils, il faudra régler la question des milices que l'on devra désarmer pour éloigner la menace d'un brusque coup d'arrêt de la transition. La réintégration des milices dans les rangs de l'armée est une piste sérieusement envisagée. Elle s'accompagne d'une inquiétude sur la «républicanisation» d'une armée soudanaise qui a toujours été aux commandes du pays.

Autre défi majeur, la question de la justice transitionnelle post-Omar El Béchir : si l'ancien président soudanais est aujourd'hui devant la justice, il ne peut être tenu pour seul responsable des exactions présumées qui ont ponctué son règne trentenaire. Outre les nombreux morts et blessés lors de la contestation, les protestataires réclament que les responsables de crimes économiques soient eux aussi traduits devant la justice et que leurs avoirs rapatriés pour financer une partie des projets pour l'avenir. Le premier pas semble être posé dans la signature de l'accord. Son application apportera la réponse à toutes ces questions.

Ibrahima Bayo Jr.

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