Guinée : contre une révision de la Constitution, Cheick Sako démissionne

Par courrier daté du 4 avril, Cheick Sako avait demandé à être remplacé dans ses fonctions de ministre de la Justice qu’il occupe depuis 2014. Mais le courrier remis en marge d’une entrevue avec Alpha Condé était en train de jaunir dans les tiroirs du bureau présidentiel. Sans réponse depuis cette date, le désormais ex-Garde des Sceaux a présenté sa lettre de démission le 20 mai dernier. Même si la missive ne s’ébruite qu’une semaine plus tard, cet ancien avocat justifie son retrait unilatéral du gouvernement par le projet de révision de la Constitution.
(Crédits : Reuters)

Pour justifier son départ du gouvernement qu'il a intégré depuis 2014, Cheick Sako fournit deux arguments presque imparables. «(...)Je n'ai pas été associé à la rédaction de la nouvelle Constitution en ma qualité de Garde des Sceaux et compte tenu de ma position personnelle contre toute modification ou changement de la Constitution en vigueur, vous comprendrez que je ne puisse plus continuer à exercer la fonction de Ministre de la Justice, Garde des Sceaux», écrit Cheick Sako dans un courrier daté du 20 mai 2019, révélé par nos confrères de Jeune Afrique.

Agitée en ballon de sonde ou volonté fantasmée d'Alpha Condé, l'idée d'une révision de la loi fondamentale fait son chemin en Guinée. En creux, la réponse à cette spéculation devrait permettre de savoir si l'actuel chef de l'Etat, élu en 2010 puis réélu en 2015, va tenter de faire sauter le verrou constitutionnel pour se porter candidat à la présidentielle de 2020. Si désormais plusieurs responsables du pouvoir ont crevé l'abcès du tabou, l'opposition anticipée à un troisième mandat du président sortant a donné naissance à un mouvement dirigé par l'écrivain et économiste Ibrahima SanohLes manifestations que ce dernier a inspirées à des jeunes les ont conduits à la case prison.

Silence présidentiel

Sans attendre une prise de position tranchée de son patron, Cheick Sako a rendu son maroquin de ministre de la Justice. Désormais débarrassé de ses responsabilités gouvernementales, l'avocat inscrit au barreau de Montpellier a fourni une autre explication qui tient plus à la forme qu'au fond. A en croire sa lettre de démission, le 4 avril dernier, l'ancien Garde des Sceaux a rencontré Alpha Condé pour lui remettre une lettre dans laquelle il demandait à être dessaisi de ses fonctions. Le silence présidentiel depuis cette entrevue a vraisemblablement précipité la démission de Cheick Sako.

Son retrait du gouvernement semble être porté par sa conviction de ne pas être la caution morale d'une révision constitutionnelle imminente à laquelle il est opposé, en plus de n'avoir pas été consulté. Même si d'autres évoquent des pressions sur Cheick Sako, sa lettre fournit encore, s'il en fallait encore, qu'en haut lieu, on semble s'être déjà fait à l'idée que le projet de doter la Guinée d'une nouvelle Constitution est déjà acté.

Plus loin, sa lettre devrait faire monter l'opposition à un troisième mandat d'un cran. Alors que la fin 2019 devrait être une année préélectorale très houleuse avec le test des législatives, la question du troisième mandat devrait polariser les débats.

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