Sénégal : la (tardive) réplique de l'opposition à la réforme de Macky Sall

Sans doute prise de cours comme la plupart des observateurs de la vie politique du pays, l’opposition sénégalaise s’était jusque-là murée dans un étonnant mutisme qui a pris fin ce 25 avril. Dans un communiqué Idrissa Seck, Ousmane Sonko, Madické Niang et El Hadji Issa Sall, les quatre candidats malheureux lors de la présidentielle du 24 février dernier, ont apporté leur réponse au projet de suppression du poste de Premier ministre. Annoncée par Macky Sall peu après sa réélection, la réforme devrait entraîner un changement de régime politique qui ne laisse pas l’opposition indifférente.
Ibrahima Bayo Jr.
(Crédits : Reuters)

Faut-il y voir la raison qui explique le mutisme de l'opposition? La réplique de l'opposition à la réforme voulue par le président Macky Sall intervient quarante-huit heures après le dépôt au Bureau de l'Assemblée nationale du projet de révision de la Constitution préalablement validé en Conseil des ministres. L'objectif est d'activer la commission technique qui devra plancher sur un texte à soumettre aux députés lors d'une séance plénière.

«Nouvelle consultation du peuple»

Avant le dépôt de ce texte, le plus grand flou entourait en effet le projet de suppression du poste de Premier ministre. Jusque-là inscrite dans un mutisme interrogateur, l'opposition a dû puiser ses arguments dans les 22 dispositions prévues pour réorganiser l'Exécutif sénégalais. Ce 25 avril, c'est par voie de communiqué, qu'Idrissa Seck, Ousmane Sonko, Madické Niang et El Hadji Issa Sall ont officiellement apporté leur premier commentaire de cette réforme annoncée à la surprise générale par le président Macky Sall au lendemain de sa réélection par «coup K.O».

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Réunis en front de l'opposition, les 4 candidats malheureux à la présidentielle du 24 février «réprouvent le fait que des modifications aussi substantielles de la Constitution aient été initiées en l'absence de toute forme de concertation», écrivent-ils dans leur communiqué daté du 25 avril. «Ils estiment aussi que des réformes d'une si grande ampleur ne seraient légitimes que si elles sont effectuées par voie référendaire».

« En effet, pour une Constitution modifiée par référendum seulement en 2016, l'initiative de supprimer le poste de Premier Ministre exige une nouvelle consultation du Peuple souverain, d'autant plus que ce projet n'a été mentionné dans aucun des programmes proposés aux sénégalais lors de l'élection présidentielle du 24 février 2019». Extrait du communiqué de Seck, Sonko, Niang et d'Issa Sall.

Une qualification pour le futur nouveau régime

Au lendemain de sa réélection, Macky Sall a chargé Mahammed Boun Abdallah Dionne, le locataire de la primature, de conduire la suppression du poste de premier ministre. Officiellement justifiée par une volonté du chef de l'Etat sénégalais de mettre fin aux lenteurs dans une administration qu'il veut inscrire en «mode fast-track», la réforme est présentée devant l'Assemblée nationale. Un vote de 3/5èmes des députés 165 députés pour être validée.

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Selon les observateurs, il faudrait supprimer ou retoucher près d'une vingtaine d'articles de la constitution déjà révisée via référendum en 2016. En tout cas, dans l'hypothèse d'une validation de la réforme, la nouvelle constitution issue de la révision devrait faire basculer le Sénégal dans un nouveau régime. Depuis la présentation de l'exposé des motifs, les experts ne se sont pas encore mis d'accord sur la qualification exacte du nouveau régime politique: «présidentiel», «présidentialiste»... les adjectifs fusent pour tenter de qualifier le futur nouveau régime.

A l'Assemblée nationale, les débats promettent déjà d'être houleux. En attendant, les quatre opposants «condamnent la démarche entreprise pour modifier à nouveau la Constitution, sans concertation préalable et par voie parlementaire». Non sans promettre de revenir sur d'autres axes de cette réforme constitutionnelle qui inaugure le dernier mandat de Macky Sall.

Ibrahima Bayo Jr.

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