Mali : le report des législatives ne fait pas l’unanimité

Alors que la Cour constitutionnelle vient de donner son aval à un report des législatives, jusqu’en juin 2019, certaines voix s’élèvent pour contester la prorogation du mandat des députés. Au sein de la classe politique, les avis divergent sur l’opportunité de ce report, malgré des arguments qui plaident en faveur de l’impossibilité de tenir le scrutin dans les temps.
(Crédits : DR)

C'est désormais presque une certitude, les élections législatives ne se tiendront pas comme initialement prévu en décembre prochain. La Cour constitutionnelle, saisie par l'Assemblée nationale, a donné un avis favorable à la demande de prorogation de six mois, du mandat des députés qui arrivent à échéance en fin d'année. Il s'agit certes et pour le moment, d'un avis qui n'engage pas le gouvernement, mais en septembre dernier, c'est l'exécutif même qui a sollicité la Cour constitutionnelle à cette fin. Autant dire que le gouvernement de Soumeylou Bioubèye Maiga y est favorable et entamera, dans les prochains jours, la procédure prévue en la matière par les textes notamment l'adoption d'un projet de loi qui sera par la suite soumise à la validation du Parlement.

Il faudrait donc attendre juin 2019 pour la tenue de ce scrutin même si un nouveau report pourrait encore être envisagée si les conditions de la tenue du scrutin ne sont pas encore réunies à cette date.

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Contexte peu favorable

Le report des législatives était dans l'air du temps depuis le lendemain de la présidentielle d'août-septembre dernier. Le scrutin a été certes remportée par le président sortant, Ibrahim Boubacar Keita (IBK), mais l'opposition a fortement critiqué le processus qui est selon elle, « entaché d'irrégularités et de fraudes de grandes ampleurs ». La preuve, le principal challenger d'IBK, Soumaila Cissé qui est arrivé au second tour, continue toujours de contester la légitimité du chef de l'Etat. A la tête d'une nouvelle coalition de partis politiques, le Front pour la sauvegarde de la démocratie (FSD), l'ancien commissaire de l'UEMOA, tient désormais à ce que toutes les conditions soient réunis pour un scrutin transparent. Ce qui nécessite des réformes et donc va prendre du temps.

De son côté, le gouvernement lui-même n'est pas prêt pour organiser un scrutin qui intervient dans un contexte sécuritaire des plus alarmants. Plusieurs réformes sont en effet en cours notamment un redécoupage administratif avec la mise place de nouvelles régions, ainsi que l'adoption des lois permettant le vote et donc la représentation de la diaspora. Et pour ne pas arranger les choses, la grève des magistrats qui déjà fait repousser le scrutin du 28 octobre au 25 novembre, se poursuit toujours alors que l'administration judiciaire est un acteur central du processus électoral.

Autant d'arguments qui plaident donc en faveur d'un report du scrutin, ce qui pourtant n'empêche pas certaines voix de contester ce report.

Voix discordantes

La principale coalition de l'opposition, le FSD, devrait se prononcer ce mercredi 17 octobre avant que la conférence de presse de ses leaders ne soit reportée à jeudi 18 octobre. Toutefois, plusieurs autres formations politiques se sont déjà prononcées contre le report. C'est le cas du parti Yelema, « le changement », de l'ancien premier ministre Moussa Mara. Dans une déclaration de presse, en date du 16 octobre, il a tenu à réitérer sa position, maintes fois exprimée, du maintien à date constitutionnelle des élections législatives. Tout en exprimant, « son opposition par principe au report de cette consultation », Yelema, rappelle que la Cour constitutionnelle a déjà clairement affirmé qu'il n'existe aucune possibilité constitutionnelle de reporter les élections législatives et de proroger par voie de conséquence le mandat des députés.

Le parti de Moussa Mara a par conséquent invité le gouvernement à assumer, « sa responsabilité d'organiser des élections permettant de respecter la Constitution et les lois comme il l'a fait à l'occasion du scrutin présidentiel ». Bien qu'il reconnait la pertinence des arguments pour un report des législatives, la formation, qui a prévenu sur les risques d'une énième crise politique, a estimé que « cette situation constitue un échec pour le gouvernement et conduit à un vide qui ne saurait être couvert par un quelconque acte juridique ou judiciaire ». Le parti de Mara n'est pas le seul à s'opposer au report des législatives. Plusieurs autres formations, notamment de la majorité présidentielle, comme La Codem, l'Adéma/PASJ ou le Mouvement pour le Mali, sont réticents face à ce report qui se traduira par une prorogation du mandat des députés.

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