Gabon : la cour constitutionnelle invente la caution de contestation électorale

La pile de dossiers de recours électoraux qui déborde de sa table de travail, Marie-Madeleine Mborantsuo a trouvé le moyen de les limiter. Désormais pour contester le processus électoral avant le vote ou bien les résultats d'une élection, il faut d'abord déposer une caution comprise entre 500.000 Fcfa et 5 millions de Fcfa selon le type d'élections. Explication d'une mesure qui fait déjà jaser au sein de la classe politique gabonaise alors que se profilent les législatives d'octobre.
Marie Madeleine Mborantsuo, la présidente de la Cour Constitutionnelle gabonaise, aux côtés du président Ali Bongo.
Marie Madeleine Mborantsuo, la présidente de la Cour Constitutionnelle gabonaise, aux côtés du président Ali Bongo. (Crédits : DR)

On connaissait la caution de candidature pour faire partie des aspirants à une élection. Au Gabon, il faut aussi compter avec la «caution de contestation électorale». Sans lui donner ce nom, la Cour constitutionnelle a dévoilé une mesure qui s'y apparente.

5 millions pour la présidentielle, 500.000 pour les autres élections

Marie Madeleine Mborantsuo, la présidente de la Cour Constitutionnelle gabonaise a décidé, depuis ce mardi 11 septembre 2018, de fixer un montant pour que son institution instruise tout recours de contestation avant ou après des élections au Gabon. Pour les contestations concernant la présidentielle, le montant de cette caution est fixée à 5 millions de Fcfa. Ce sera 500.000 Fcfa pour des contestations concernant les autres élections.

Justifiée par une prolifération de recours déposés sur la table de son bureau, la présidente de la Cour constitutionnelle veut avoir les coudées franches afin d'assurer du respect de la Constitution gabonaise, notamment en cas de litige électoral. Près de 146 plaintes peuplent déjà les bureaux des 8 juges dont elle est la présidente. Une charge de travail que la Cour souhaite donc réduire en imposant une somme préalable et non-remboursable, pour se pencher sur les recours.

Coïncidence de timing

Tout comme les arguments du cautionnement pour des élections -réduction du nombre de candidats-, la mesure Mborantsuo fait jaser au sein de la classe politique gabonaise. Si certains y voient une manière de faire taire des pointeurs d'irrégularités, d'autres estiment que cette «caution de contestation électorale» ne protège que les droits des candidats nantis et installent même une discrimination entre les candidats. Dans les rangs du parti au pouvoir, on applaudit une mesure qui pourrait mettre fin aux recours fantaisistes des mauvais perdants.

En tout cas, la mesure Mborantsuo intervient à un mois des législatives jumelées aux locales, qui sont fixées au 6 octobre prochain. Plusieurs fois reportés, ces scrutins sont le premier grand test du Parti démocratique gabonais (PDG, au pouvoir), après la réélection contestée d'Ali Bongo en 2016, validée par une Cour constitutionnelle qui a écarté tous les recours. Certains font remarquer la coïncidence de timing entre la prise de la mesure sur la caution de contestation électorale et l'approche des joutes électorales. On n'est pas loin des vieilles accusations de «Tour de Pise», quolibet dont on flanque la Cour constitutionnelle pour sa propension supposée à pencher du côté du pouvoir. Mais ces accusations pourraient vite resurgir.

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