Jean-Pierre Raffarin réunit les «Leaders pour la Paix» à Paris

Les 14 et 15 mai derniers, les «Leaders pour la Paix» (LPP) ont tenu leur première conférence annuelle au ministère de l'Europe et des Affaires étrangères de Paris. Jean-Pierre Raffarin avait réuni les 26 représentants «VIP» de son ONG pour présenter le rapport annuel, tout en alertant l'opinion publique internationale sur les risques de crises à venir...
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Malgré les absences remarquées de Ban Ki-Moon ou de Romano Prodi, de nombreuses personnalités avaient répondu présentes au rendez-vous parisien des «Leaders pour la Paix», comme Tertius Zongo l'ancien Premier ministre du Burkina Faso, Irina Bokova, ancienne Directrice Générale de l'UNESCO, Antony Blinken, ex secrétaire d'État adjoint de Barack Obama, Jean Charest, ancien Premier ministre du Québec ou encore Ngozi Onkojo-Iweala, ancienne Directrice Générale de la Banque mondiale.

En marge des discussions, les membres de LPP ont pu croiser Laurent Fabius ou Hubert Védrine dans les couloirs du Quai d'Orsay. Ils ont été reçus à Matignon par le Premier ministre, Edouard Philippe, avant de rejoindre le dîner prévu à leur attention au Sénat, où ils ont rencontré son président, Gérard Larcher mais aussi la présidente de la Région Ile-de-France, Valérie Pécresse, le maire de Nice, Christian Estrosi ou encore Claude Chirac...

Lors de ces rencontres qui se sont tenues sur fond de crises iranienne et israélo-palestinienne, les débats ont principalement porté sur la prévention des crises et la sensibilisation de l'opinion publique à la paix.

L'événement a été l'occasion pour les participants, de finaliser le rapport annuel, rédigé par le diplomate français Pierre Vimont, qui s'est penché sur trois sujets de crise : les dérèglements climatiques en Asie, l'instabilité à la frontière entre la Tunisie et la Libye et la criminalité à la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique.

Eviter la banalisation des risques

«Les grandes nations sont en guerre mais vivent en paix. On fait la guerre contre tout» annonce Jean-Pierre Raffarin dans le préambule du rapport Vimont intitulé «Pour un effort de Paix». L'ancien Premier ministre insiste sur l'insouciance de l'opinion publique, jugée peu réceptive aux signes de crise : «Aujourd'hui, il existe un risque de banalisation des risques dans l'opinion publique» a-t-il poursuivi. «Le trait commun de ces crises est que nous ne les avons pas vues venir» peut-on lire dans le rapport qui s'intéresse non seulement aux causes profondes des crises et à leur règlement mais également à la sensibilisation de l'opinion publique. La presse internationale était d'ailleurs venue nombreuse pour suivre les «leaders» sous les ors de la République française.

Revenant sur la situation de la Libye qui impacte actuellement la Tunisie à sa frontière, les « leaders » préconisent des coopérations sécuritaire et migratoire ainsi qu'une stratégie commune qui s'attaque aux trafics régionaux, avec l'appui des pays voisins. Ils invitent par ailleurs, la communauté internationale à soutenir l'économie tunisienne et à poursuivre la sensibilisation contre tout risque de radicalisation.

Les «leaders» se sont ensuite penchés sur les migrations et la criminalité, à la frontière entre le Mexique et les Etats-Unis qui concentre l'essentiel des migrations régionales. Près de 400.000 ressortissants d'Amérique centrale cherchent chaque année, à rejoindre les Etats-Unis depuis la frontière mexicaine, devenue une véritable plaque tournante du crime organisé. Le rapport souligne les «contradictions de l'action américaine», expliquant que la politique de Donald Trump menace d'«affaiblir considérablement son voisin et d'approfondir la crise actuelle plutôt que de la réduire.» Pierre Vimont propose notamment de définir la «gestion coordonnée du nouveau statut de pays de transit».

Enfin, l'étude répertorie les différentes menaces de dérèglements climatiques en Asie et leurs conséquences sur la stabilité régionale. Le rapport met en exergue leur multiplicité (renforcement de tensions politiques et diplomatiques, déplacements de populations, multiplication des désordres internes...) qui suppose une réponse concertée à l'échelle internationale.

Pour le retour du multilatéralisme

Les questions liées aux migrations étaient de tous les débats car elles réunissent plusieurs facteurs de crises directs ou indirects et appellent à des actions conjointes, comme l'a indiqué Ngozi Onkojo-Iweala : « L'Afrique reçoit un très grand nombre de réfugiés, au Kenya ou en Ouganda par exemple, sans aucune aide internationale (...) nous devons être transparents » a-t-elle prévenu : « les conflits viennent parfois de l'extérieur donc la communauté internationale a des responsabilités dans la gestion des crises ».

C'est également le constat d'Irina Bokova, l'ex Directrice générale de l'UNESCO qui a précisé -au-delà de la question politique-, que «la responsabilité commune s'appelle la solidarité

LPP veut promouvoir la paix et la solidarité à l'heure où l'administration Trump menace de quitter l'UNESCO et où les Nations-Unies font l'objet de critiques de plus en plus nombreuses. Jean-Pierre Raffarin a rappelé que «le grand risque aujourd'hui est la faiblesse du multilatéralisme (...) une réponse qui associerait la France, l'Allemagne, la Chine et la Russie représenterait une forme de multilatéralisme géographique partiel qui donnerait une certaine puissance aux messages envoyés aux Etats-Unis, pour prendre un exemple...»

Donald Trump était en effet, de toutes les conversations avec le retrait des Etats-Unis de l'Accord sur le nucléaire iranien et l'ouverture de l'Ambassade américaine à Jérusalem. Cette tribune médiatique donna notamment l'occasion à Anthony Blinken, l'ancien secrétaire d'État adjoint de Barack Obama de s'exprimer sur les événements du 14 mai dans la bande de Gaza: «Il semblait déjà difficile de trouver un accord de paix ; maintenant, c'est mission impossible.»

A l'heure où Vladimir Poutine décide de jouer «cavalier seul» en Ukraine et où Donald Trump réintègre une forme d'unilatéralisme relevant du «hard power» américain, les «Leaders pour la Paix» ont choisi d'avancer à contre-courant sur la voie du multilatéralisme...

Raffarin refuse le «choc des civilisations»

Les «Leaders pour la Paix» s'intéressent essentiellement à l'étude des crises peu relayées dans les médias. L'association cherche à pallier cet écueil pour «éveiller les consciences» selon son fondateur qui tient à expliquer la «dangerosité d'un monde qui connaît des crises chaudes comme la Corée du Nord ou la Syrie et des crises moins évidentes comme la guerre civile en Libye qui menace la stabilité de la Tunisie».

A travers les «Leaders pour la Paix», Raffarin s'engage contre toute forme de repli communautaire, plaide pour le «métissage» et refuse la théorie de Huntington du «choc des civilisations» qui conduirait inévitablement à la confrontation des mondes occidental et arabo-musulman...

Concernant l'Afrique, LPP s'emploi à cartographier les problématiques du continent. «L'Afrique est en train d'émerger et il faut l'accompagner en ouvrant les frontières de l'emploi... dès l'an prochain, nous aurons un regard assez approfondi sur le développement à long terme du continent» a précisé Jean-Pierre Raffarin.

Dans un contexte géopolitique particulièrement sensible, l'ancien Premier ministre plaide pour le retour du dialogue entre les peuples, une position dont il assume l'héritage: «Je reste chiraquien... La guerre, même s'il elle donne quelquefois une victoire militaire, crée un terrorisme, des révoltes. Il n'y a pas une violence acceptée et une violence qui ne l'est pas!»

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