Séjour à Londres : et si le patient Buhari nous renseignait sur une allergie africaine ?

Comme à chaque fois que le Premier des Nigérians prend l’avion en direction de Londres, les spéculations escortent son avion présidentiel. Muhammadu Buhari et ses équipes l’assurent: son court séjour médical dans la capitale britannique se fait pour un simple rendez-vous avec son médecin. Mais à l’heure où l’on prépare déjà la prochaine présidentielle, l’opinion publique semble s’être déjà fait s’être fait son avis. Mais au-delà du cas nigérian, la maladie de Buhari renseigne sur une allergie de la démocratie africaine.
Ibrahima Bayo Jr.
(Crédits : Reuters)

Un simple check-up médical sur « demande » de son médecin, assurent ses équipes de communication. Sans doute pour s'assurer que le patient Buhari réagit bien au traitement d'une maladie entouré du plus grand secret mais suffisamment grave pour être nimbé de mystère au grand public.

Simple check-up médical de quatre jours !

Dans ce cas, font vite de s'interroger les pourfendeurs du président, pourquoi le général-président n'a pas fait cette consultation lors de son escale à Londres sur le chemin de son retour de sa visite aux Etats-Unis ?

La réponse se trouve dans ce démenti de la présidence nigériane. L'escale au pays de la Reine a en effet donné le lieu à des rumeurs et spéculations sur une nouvelle hospitalisation du président nigérian, ce que l'Aso-Rock-Villa s'est empressée de balayer d'un revers de démenti. Muhammadu Buhari avait bien rencontré son médecin mais pas pour hospitalisation. « Le médecin a demandé au président de revenir pour une réunion, ce qu'il a accepté », avait fini par lâcher son porte-parole

A 75 ans, c'est donc à cette injonction médicale que le patient présidentiel répond avec ce nouveau séjour de quatre jours dans la capitale londonienne, comme le confirme la présidence nigériane qui ajoute chez nos confrères de Reuters: « c'est un simple examen de routine ». Revoilà donc le patient Buhari qui embarque pour une consultation à Londres après avoir passé cinq des douze mois de l'année dernière en séjour médical au Royaume-Uni.

Cette fois comme les autres fois, les spéculations escortent l'avion présidentiel depuis l'annonce de ce simple check-up qui a nécessité un voyage d'un pays à un autre avec tout ce que cela implique de charges. Pour autant ce n'est pas la facture mais le voyage en lui-même qui nourrit le scandale. « Il ne faut pas plus de 3 ans pour construire un seul centre d'excellence pour les cas médicaux les plus complexes. Dès les premiers jours de son mandat, il aurait pu nommer une personnalité mondiale du monde médical à la tête l'Administration de la sécurité sociale pour la mettre en place et il serait fonctionnel aujourd'hui», s'indigne un internaute nigérian sur Twitter.

Au-delà de Buhari, l'allergie des présidents à se plier au bilan médical

Une réaction qui résume l'exaspération de certains nigérians de voir leurs dirigeants-comme du reste partout ailleurs en Afrique- se soigner dans les centres médicaux étrangers au lieu de mettre à niveau ou construire des infrastructures sanitaires aux normes internationales. L'excuse de la préservation du secret médical présidentiel est ici irrecevable si les locataires des palais africains y mettent la volonté.

Dans cette autre partie de la rue, c'est plutôt le fait que, candidat à sa propre succession pour la présidentielle de 2019, Muhammadu Buhari présente déjà, à quelques mois de tournées à l'intérieur du pays, les premiers signes de fébrilité liée à sa santé là où ses soutiens affirmaient à qui veut l'entendre que l'homme au boubou avait recouvré la pleine santé. Ce «secret d'Etat» entourant la maladie cachée du président est d'autant plus incompréhensible pour les citoyens qu'une rumeur persistante fait état d'un possible empoisonnement de Buhari pour stopper sa lutte anti-corruption.

A l'analyse, l'affaire pose l'éternel débat sur la santé des présidents africains. Ces derniers à qui on ne reconnaît aucun pouvoir d'invulnérabilité, peuvent tomber malade à l'image de leurs mortels administrés. Seulement, aucun président africain n'ose se plier, à l'image des grandes démocraties dont ils miment les valeurs, à un bilan médical périodique qui renseignerait sur l'existence ou non d'une maladie qui entraverait l'exercice de leurs fonctions. Il faudrait vivre longtemps, dans une Afrique où maladie -même soignable- rime souvent avec marginalisation, pour voir les détenteurs du pouvoir et les aspirants se plier à cette règle.

Ibrahima Bayo Jr.

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Commentaire 1
à écrit le 08/05/2018 à 20:04
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Tous les africains n'ont pas les moyens de se faire soigner à Londres comme de se faire soigner chez elle ! Il m'a couté plus de 9000 euros pour faire hospitaliser et soigner ma belle soeur qui séjourna 13 mois dans un hospital en Afrique de l'Est ...

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