Exsangue, le Soudan ferme 13 de ses ambassades et 4 consulats

Cost-killing au plus haut sommet de l’Etat soudanais ! Ce mercredi 02 mai 2018, Omar El Béchir, le président soudanais a signé un décret couperet diffusé tard dans la soirée. Celui-ci ordonne la fermeture de 13 ambassades soudanaises à l’étranger et ainsi que de 4 consulats du pays. Le texte signe une réduction des effectifs dans la quasi-totalité des représentations diplomatiques ou consulaires du Soudan à l’étranger. Une restructuration de la diplomatie du pays que l’on explique officiellement par la crise financière que traverse Khartoum. Mais pas que...
Ibrahima Bayo Jr.
Selon le décret du président soudanais, Omar El Béchir, le pays va procéder à une réduction drastique de ses effectifs diplomatiques.
Selon le décret du président soudanais, Omar El Béchir, le pays va procéder à une réduction drastique de ses effectifs diplomatiques. (Crédits : Reuters)

«Pendant des mois, les diplomates soudanais n'ont pas reçu de salaire et il y a aussi des retards de paiement du loyer des ambassades». Lorsque Ibrahim Ghandour, alors ministre des Affaires étrangères s'est fait le syndicaliste des diplomates soudanais en poste à l'étranger avec cette déclaration fracassante en mars, Omar El Béchir l'avait remercié sans ménagement.

Exit 13 ambassades et 4 consulats du Soudan

Il semble désormais que le décret présidentiel rendu public ce mercredi 2 mai tard dans la soirée lui ait donné raison. Par une sentence couperet qui a surpris tant à Khartoum qu'à l'étranger, le président Omar El Béchir a ordonné la fermeture immédiate de 13 ambassades soudanaises et 4 consulats du Soudan à l'étranger, selon une dépêche de l'agence officielle Suna.

Sans précision des ambassades et consulats concernés par cette fermeture, il faut imaginer que la mesure présidentielle devrait acter une sous-représentativité de la diplomatie soudanaise représentées par près de 70 ambassades et une demi-douzaine de consulats à l'étranger. Toujours selon le décret d'Omar El Béchir, le Soudan va procéder à une réduction drastique de ses effectifs diplomatiques.

Depuis la parution du décret, le Soudan ne sera plus représenté que par un seul diplomate avec «rang d'ambassadeur» dans chaque ambassade sauf dans quatre. Les «vols bleus» - terme diplomatique désignant un rapatriement de diplomate avant la fin de sa mission- devraient également concerner la plupart des attachés économiques et commerciaux, les attachés de presse des missions diplomatiques des ambassades soudanaises. Une exception a été ajoutée pour le bureau d'Abu Dhabi aux Emirats Arabes Unis, qui prépare la participation du Soudan à l'Expo 2020.

Entre les lignes, ce sont d'abord les représentations soudanaises en Afrique et en Asie qui devraient être concernées par la réduction des ressources humaines de la diplomatie soudanaise. L'on imagine assez mal Khartoum fermer ses représentations diplomatiques en Europe où se trouvent la plupart des partenaires internationaux liés aux Nations Unies ou encore ses consulats à New-York, Riyad ou Abu Dhabi, trois pays où la diaspora soudanaise est la plus significative.

Cost-killing diplomatique et mise sous coupe de la diplomatie

Toutefois la décision présidentielle est officiellement justifiée par du cost-killing destiné à juguler la crise économique que traverse le pays. «La décision a été prise de façon à faire des économies vu la situation économique», justifie l'agence Suna dans sa dépêche, sans détail sur le personnel concerné par cette réduction des effectifs. Dans une déclaration au parlement au mois de mars dernier, Ibrahim Ghandour, le ministre des Affaires étrangères avait pointé le fait que les loyers et les salaires des diplomates en poste à l'étranger n'étaient pas payés depuis sept mois.

En crise économique et monétaire, le Soudan ploie sous le poids des sanctions des Etats-Unis qui l'ont placé sur la liste des «Etats parias», soutenant le terrorisme. Sur le plan social, les émeutes du pain entretenues par la crise économique, ont poussé le gouvernement à adopter la très polémique mesure de privatiser les importations de céréales. Sourde aux recommandations des organismes internationaux, le pays ne voit pas encore le bout du tunnel avec cette apnée de la livre soudanaise.

Pour autant la crise économique n'est pas la seule explication de la réduction du personnel diplomatique. Beaucoup de commentateurs y voient la volonté affichée d'Omar El Béchir de dompter et maîtriser sa diplomatie en la plaçant sous la férule du Conseil national de la politique étrangère. Une décision destinée, selon les mêmes commentateurs, à éviter les conflits entre le ministère des Affaires étrangères et des membres du premier cercle présidentiel, qui se disputent la préséance à l'heure où le Soudan va recevoir des investissements conséquents de plusieurs puissances.

Ibrahima Bayo Jr.

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