Le Gabon n'arrive pas à se décider sur une date pour choisir les 143 députés de la 13ème législature de son Assemblée nationale. La première date initialement fixée à décembre 2016 avait été reportée au 29 juillet 2017 en raison de difficultés économiques du Gabon. Mais dix jours avant la tenue de cette dernière échéance, la Cour constitutionnelle de Marie-Madeleine Mborantsuo avait fixée la nouvelle date au 28 avril 2018 dans un verdict très interprétatif mettant en avant la nécessité de mettre en place les réformes issues du dialogue politique convoqué par Ali Bongo.
La date des législatives suspendue aux lèvres de l'équipe du CGE
Avec les postures des différents acteurs, le spectre d'un autre report plane encore sur ces législatives. « La détermination du calendrier électoral est du ressort du deuxième acteur du processus qui est le Centre gabonais des élections (CGE). C'est à cette structure de déterminer quand est-ce que les élections auront lieu dans notre pays. C'est une compétence qui ne relève pas du gouvernement », élude Lambert-Noël Matha, le ministre de l'Intérieur lorsque la question lui est posée frontalement.
Un flou d'autant mieux entretenu que le CGE qui remplace la très décriée Commission électorale nationale autonome et permanente (Cenap), n'a pas encore été mise en place. Principal écueil, la nomination à la présidence du CGE d'une personnalité consensuelle -et suffisamment impartiale- qui doit être désignée sur appel à candidatures par « un collège spécial » composé à parité par la majorité et l'opposition.
Au sein des tauliers de l'opposition où l'on rappelle le retard dans la révision, on a sorti les calculettes pour se convaincre d'un report imminent. Quarante cinq jours avant la tenue du scrutin, le ministère de l'Intérieur devrait prendre un arrêté pour lancer le processus. A moins de 40 jours, rien n'a été fait !
Calculs politiques pour un report
La majorité présidentielle qui détient 114 des 120 députés n'est pas prête à la bataille des urnes. Avec une légitimité entachée par la réélection contestée d'Ali Bongo à la présidentielle d'août 2016, la majorité tente une difficile reconnexion avec son électorat échaudé par des difficultés sociales des Gabonais, alimentées par la conjoncture économique difficile. La réorganisation du camp présidentiel et la guerre interne pour s'aligner sur les listes ne sont pas aussi négligeables dans l'analyse des multiples reports.
Au Palais du Bord de mer, le calcul est beaucoup plus simple. Largement majoritaire à l'Assemblée, il faut laisser aux 114 députés « présidentiels » suffisamment de temps pour profiter des avantages de leur fonction dont le mandat a expiré depuis février 2017. Une manière de fidéliser une clientèle politique et engranger leur soutien lors des joutes électorales. Retranché dans sa « tour du boycott systématique », Jean Ping, interdit de sortie du territoire, s'amuse du jeu de son ex-beau-frère devenu son ennemi politique. A demi seulement.
Les défections dans son propre camp l'ont peut-être convaincu de jouer la carte d'une vraie fausse ouverture. Ce mercredi, Zacharie Myboto, Guy Nzouba Ndama, Jean de Dieu Moukagni Iwangou, Louis Gaston Mayila et Michel Menga, des ténors de la garde rapprochée de Ping ont discrètement rencontré le ministre de l'Intérieur en empruntant la porte de service de son bureau du Delta Postal d'Angonjé (nord de Libreville).
Un possible dégel des relations glaciales entre l'opposant en chef et le camp présidentiel, s'interrogent les uns. Un arrangement pour avaler la pilule d'un nouveau report, analysent les autres. Dans l'un ou l'autre des cas, les premières manœuvres semblent être lancées pour que l'annonce de ce report ne suscite pas la surprise. Mais reste à savoir qui s'attendait à être surpris.
Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !