Passeport diplomatique : le Congo veut mettre fin au trafic

Le texte signé depuis le 20 février par Denis Sassou Nguesso dormait dans un des tiroirs du bureau présidentiel à Brazzaville. Lorsqu’il est révélé, le décret présidentiel s’attaque aux modalités de délivrance et limite la liste des bénéficiaires du passeport diplomatique dont la délivrance est minée par la fraude et le trafic. Pour conjurer ce haro presque général sur le précieux sésame, le gouvernement a décidé de sévir. Mais une faille dans la distribution prend des allures de «cadeau du président».
(Crédits : DR)

Une restriction à coup de décret ! Depuis ce 20 février, la liste des détenteurs du passeport diplomatique congolais est moins surchargée. Exit les anciens ministres, les députés, les sénateurs et les membres des institutions de la République et leurs familles qui ont été rayés de la liste. La mesure restrictive frappe également les fonctionnaires du ministère des Affaires étrangères.

Une mesure restrictive contre la fraude et le trafic au passeport

Principal argument derrière cette restriction, la lutte contre la fraude et le trafic du passeport diplomatique via des réseaux impliquant parfois des cadres du ministère des Affaires étrangères, préposés à la délivrance du précieux sésame. «Ces pratiques font que des personnes non autorisées sont comptées parmi les détentrices du passeport diplomatique», explique Cyprien Sylvestre Mamina, le secrétaire général du ministère des Affaires étrangères et de la coopération.

Via ces réseaux, des personnes non éligibles à l'obtention d'un passeport diplomatique, hommes d'affaires, entrepreneurs et même étudiants ont décroché le document moyennant une contrepartie financière pouvant atteindre 4 millions de Fcfa. Les voyageurs avec un passeport diplomatique pouvaient ainsi se rendre dans plusieurs pays sans visa et sans fouille dans les aéroports étrangers. Une situation qui a provoqué l'ire des partenaires du Congo qui ont menacé de retirer l'exemption de visa pour les passeports diplomatiques.

«Pour rassurer ses partenaires et mettre fin à certaines pratiques, le ministère des Affaires étrangères a détruit, en 2017, un lot d'anciens passeports diplomatiques en présence des ambassadeurs de quelques pays partenaires. Malgré toutes ces précautions, le mal a continué et il fallait le détruire à la racine. D'où la nécessité de revoir les dispositions concernant l'attribution de ce document», explique encore Cyprien Mamina.

Pouvoir discrétionnaire pour «raisons d'Etat»

Après le décret présidentiel, qui peut désormais bénéficier du passeport diplomatique ? Après une période transitoire de trois mois, le passeport diplomatique congolais ne sera plus délivré que pour les ambassadeurs et les fonctionnaires congolais en poste à l'étranger. Petite ouverture, le chef de l'opposition congolaise fait partie de la liste des bénéficiaires.

Pour autant, en signant le décret, Denis Sassou Nguesso laisse une porte dérobée dans la délivrance des passeports. Le président congolais comme le ministère des Affaires étrangères peuvent invoquer des «raisons d'Etat» pour délivrer ce passeport à une personne ne faisant pas partie de la liste des bénéficiaires.

Un pouvoir discrétionnaire qui ouvre la porte à l'octroi de ce passeport aux membres du cercle présidentiel ou à ses proches. La fraude et le trafic sont peut-être en partie écartés, mais le risque de clientélisme au passeport reste ouvert.

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