Maroc-UE : l'avocat de la Cour de justice européenne contre un renouvellement de l’accord de pêche

Le renouvellement de l’accord de pêche liant le Maroc à l’UE risquerait de ne pas aboutir, après que l’avocat général de la CJUE a jugé « invalide » l’accord actuellement en application. Cet avis a fait sauter toutes les alarmes chez le gouvernement espagnol, alors que Rabat et Bruxelles restent de marbre.
(Crédits : Reuters)

«L'accord de pêche avec le Maroc est invalide parce qu'il ne respecte pas les droits des personnes dans la région contestée du Sahara occidental ». Par cette déclaration, Melchior Wathelet, avocat général de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a lancé un branle-bas de combat à Rabat, Bruxelles, Madrid ou encore Séville, Saint Jacques-de Compostelle et aux Canaries.

Branle-bas de combat dans la péninsule ibérique

Cet avis a été justifié par «le manquement fait par l'Europe à l'obligation de reconnaître l'illégalité de cette situation qui résulte de l'affaiblissement du droit à l'autodétermination de la population sahraouie par le Maroc». Rarement l'opinion de l'avocat général de la CJUE n'aura eu autant d'impact politique et diplomatique. En réaction, le gouvernement espagnol comme les régions autonomes d'Andalousie, de Galice et des Canaries se sont réunis d'urgence.

Cet accord de pêche entre le Maroc et l'UE est stratégique pour Madrid dont les chalutiers représentent 80% des bâtiments de pêche autorisés à lancer leurs filets au large des côtes marocaines. Cette sortie de Wathelet est par ailleurs en contradiction avec la position de la Commission européenne qui, un jour avant, avait adopté la résolution visant à obtenir l'autorisation pour renouveler l'accord de pêche avec le Maroc.

Rabat garde son calme

Rabat garde de son côté une position de «wait and see». En effet, le silence de la diplomatie marocaine s'explique par le fait que la CJUE n'est pas tenue de respecter l'opinion de l'avocat général dans la formulation de ses sentences. Il n'empêche que la Cour a jusqu'à aujourd'hui respecté les orientations de l'avocat général dans 80% des cas qu'elle a traités. Une réponse officielle du Maroc reste donc conditionnée au verdict des juges de la CJUE qui est attendu pour mai prochain.

Selon la presse marocaine, les autorités ne donneraient que peu d'importance aux conclusions de Whatelet. «Les pratiques précédentes sur l'affaire de l'Accord agricole montrent que les conclusions de l'avocat général ne sont pas toujours prises en compte ou suivies par la CJUE. Il s'agit donc d'une phase préliminaire à la décision de la Cour sans aucun impact juridique», a déclaré un responsable des Affaires étrangères marocaines à la presse locale.

Bruxelles prise entre deux feux

La Commission européenne a réaffirmé de son côté que «le Maroc est un partenaire clé dans son voisinage méridional avec lequel nous avons développé un partenariat riche et varié sur une période de plusieurs années. Notre volonté est non seulement de préserver la relation privilégiée que nous partageons, mais aussi de la renforcer». La possibilité d'un verdict négatif de la CJUE est loin d'être la meilleure option pour Bruxelles.

Ce scénario implique des turbulences entre Rabat et la Commission européenne d'un côté et cette dernière et Madrid de l'autre. L'Espagne qui a longtemps bataillé pour la préservation de cet accord reste la partie ayant le plus à craindre d'une décision négative de la Cour. L'accord de pêche lie Rabat à l'UE depuis 2007 et a été renouvelé à deux reprises en 11 ans et, comme une grande partie des accords commerciaux liant le Maroc à Bruxelles, fait l'objet d'une «guéguerre juridique», menée par les séparatistes du Polisario et d'ONG et parlementaires européens acquis à leur cause.

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