Crise en RDC : la mission désespérée de l’Eglise catholique chez Sassou

Dénoncer une dictature chez un autocrate. C’est peut-être la phrase qui résume le mieux la mission presque paradoxale de la délégation de la Conférence épiscopale nationale du Congo qui a rencontré ce mardi le président congolais Denis Sassou Nguesso. A Brazzaville, les hommes en soutane espèrent une implication du chef de l'Etat de ce pays voisin en sa qualité de président de la Conférence des Grands Lacs. Mais le médiateur de l’autre rive est-il la personnalité indiquée pour faire reculer Joseph Kabila ?
Ibrahima Bayo Jr.
Joseph Kabila, président de la RDC, et Denis Sassou Nguesso, président du Congo et président en exercice de la Conférence internationale de la région des Grands Lacs (CIRGL).
Joseph Kabila, président de la RDC, et Denis Sassou Nguesso, président du Congo et président en exercice de la Conférence internationale de la région des Grands Lacs (CIRGL). (Crédits : DR)

Les évêques de la Conférence épiscopale nationale du Congo (Cenco) ont dû être désespérés. En colère aussi après la répression particulièrement violente de paroissiens lors des manifestations du 31 décembre dernier qui a fait plusieurs morts. Mais leur courroux ou leur consternation justifient-ils pour autant de traverser les trois kilomètres qui séparent les deux Congo pour tenter d'apaiser la crise politique avec l'aide de ... Denis Sassou Nguesso ?

Sassou en médiateur pour «éviter le pire» chez Kabila

Ce mardi 9 janvier, une délégation de l'Eglise catholique, menée par l'Abbé Donatien Nsholé, s'est entretenue avec Denis Sassou Nguesso lors d'une audience au Palais du peuple situé dans le quartier du Plateau. Officiellement, les évêques qui veulent «éviter le pire» dans le pays sont venus voir Sassou Nguesso en sa qualité de président du Mécanisme de paix et de sécurité pour la Conférence internationale de la région des Grands Lacs (CIRGL).

L'objectif serait double : obtenir du chef de l'Etat du Congo-Brazzaville qu'il use de sa position pour calmer la crise politique qui dure depuis plus d'un an chez son voisin, et qu'il mène une mission de bons offices afin que les élections présidentielles, locales et provinciales, que les évêques jugent «tenables», se tiennent à la date annoncée du 23 décembre prochain.

Sans douter de la bonne foi de la démarche des évêques, c'est à se demander si l'Eglise catholique a bien pesé la portée de sa mission chez le voisin de l'autre rive du fleuve. En termes caricaturaux, la délégation épiscopale est partie mener une mission de dénonciation d'une dictature chez un autocrate.

Dénonciation d'une dictature chez un autocrate

Au pouvoir depuis un total cumulé de plus de trois décennies, Denis Sassou Nguesso s'est fait réélire dès le premier tour sous les protestations lors de la présidentielle contestée de mars 2016, après un «tripatouillage» constitutionnel mené un an plus tôt qui a validé sa candidature à un troisième mandat. Les opposants qui ont dénoncé le score de 60% avec lequel le président congolais a été réélu peuplent aujourd'hui les prisons ou les cimetières.

C'est chez ce président, accusé de bafouer les droits de l'homme, d'emprisonner des opposants même lorsqu'ils ont purgé leur peine et qui réprime les manifestations qui lui sont hostiles que les évêques sont partis chercher de l'aide pour faire revenir Joseph Kabila et son pouvoir à la raison. Mais le conclave avec le locataire du Palais du peuple de Brazzaville n'a pas laissé échapper de fumée blanche.

A part une oreille prêtée à leur homélie sur la situation en RDC, Denis Sassou Nguesso s'est borné à promettre de faire tout ce qui est en son pouvoir pour faire aboutir le calendrier électoral. En espéraient-ils plus que cette réponse polie de la part de ce président encarté au club des autocrates qui peuplent les palais présidentiels d'Afrique centrale ?

Ibrahima Bayo Jr.

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