Après la dérobade de Raila Odinga, la fin de la contestation post-électorale ?

C’est un cadeau d’indépendance arraché au prix de pressions de médiateurs nationaux et internationaux. Alors que le Kenya fête ce mardi 12 décembre son 56e anniversaire, Raila Odinga, le candidat malheureux à la présidentielle a renoncé à son investiture parallèle, programmée le même jour. Pour autant, cette dérobade de dernière minute marque-t-elle la fin de la contestation post-électorale ?
Ibrahima Bayo Jr.
Le 7 décembre, le procureur général Githu Muigaidu avait estimé que le projet d'investiture de Raila Odinga serait «un crime de haute trahison selon la loi pénale de la République du Kenya».

Githu Muigai, le procureur général du Kenya, avait même brandi la menace d'une condamnation à la peine de mort pour «haute trahison» contre l'opposant . Moins provocante, la médiation d'ambassadeurs accrédités à Nairobi, d'hommes religieux et même de gouvernements de la sous-région se sont succédé pour infléchir la position de Raila Odinga. Il semble qu'au final leurs efforts conjugués ont porté leur fruit.

Investiture reportée «à une date ultérieure»

Au final, pour le 56e anniversaire de son indépendance, le Kenya n'assistera pas à une investiture parallèle de Raila Odinga. A 72 ans, l'opposant historique avait choisi de saisir cette commémoration pour se faire adouber «président élu du peuple», dans la lignée de ces «homologues» opposants, le Gabonais Jean-Ping et le Gambien Adama Barrow.

Alors que les préparatifs battaient leur plein dans les quartiers acquis à sa cause, le camp politique de Raila Odinga s'est fendu d'un communiqué qui a provoqué la désillusion de ses partisans.«Après d'approfondies consultations internes et des discussions avec de nombreux interlocuteurs nationaux et internationaux, l'investiture de M. Odinga est reportée à une date ultérieure», écrit le texte repris par la presse locale.

Et pourtant, malgré son prêche de bonne intention, le texte laisse largement ouverte la possibilité à une reprogrammation de cette «cérémonie d'investiture Bis» à laquelle on ne croit plus vraiment, surtout dans le propre camp d'Odinga. Mais cela ouvre-t-il la voie à la fin de la contestation par Raila Odinga, de la réélection de son rival Uhuru Kenyatta lors d'une présidentielle épique, deux fois jouée et deux fois perdue ?

La contestation, un moyen d'exister pour Raila Odinga ?

Pour l'heure, le nouveau président kényan qui a prêté serment fin novembre dernier en compagnie de son colistier, William Ruto, gouverne sans se soucier de la capacité de nuisance de son opposant de toujours. Ragaillardi par le blanc-seing de la Cour suprême, celle-là même qui avait ordonné un remake de la première joute électorale, Uhuru Kenyatta a pu remporter l'élection avec le score stalinien de 98,2% des voix à la faveur de la politique de la «chaise vide» adoptée par Raila Odinga.

Lorsque Kenyatta quittera le State House en 2022 au terme de son quinquennat, Raila Odinga sera peut-être très âgé (77 ans) pour envisager de porter sa candidature pour la magistrature suprême. Opposant depuis 1992 lorsqu'il perd la course à la direction du parti présidé par son père, Raila Odinga semble être frappé par la «malédiction» des présidentielles qu'il a toujours perdues dans la contestation depuis 1997.

Cette ultime défaite de 2017 pour laquelle Raila Odinga a joué son va-tout semble pour l'heure difficile à digérer. Le seul espace méditico-politique pour permettre à l'opposant d'exister est la contestation. Personne ne doute désormais qu'il continue de l'entretenir au péril de son parti.

Ibrahima Bayo Jr.

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