RDC : comment Kabila veut enrayer le Rassemblement d’opposition

Il sera le premier ministre le plus éphémère des 16 ans de règne de Joseph Kabila. A 54 ans, Samy Badibanga s’apprête à rendre le tablier en présentant sa démission sans avoir passé 100 jours à la primature et sans présenter son programme budgétaire. Son successeur devrait être choisi dans les rangs du Rassemblement d’opposition. Mais, aux portes de cette plateforme d’opposition, la dissidence gronde et accentue la crise interne de leadership. Avec l’annonce du remplacement de Samy Badibanga, Joseph Kabila veut-il lui asséner le coup de grâce ?
Ibrahima Bayo Jr.

Quarante-huit heures pour faire parvenir à Joseph Kabila, une liste de trois noms parmi lesquels le successeur de Samy Badibanga sera choisi, ce vendredi 7 avril 2017. Le délai est court pour aplanir des différends alimentés par des querelles d'égos et des luttes intestines au sein d'un clan que tout oppose. Le Rassemblement d'opposition passe ce vendredi de tous les dangers, l'épreuve de l'implosion. Au sein du Rassemblement, fratricide et sans merci, une guerre de position fait rage.

Dissidence et contre-dissidence

D'un côté, une aile mène la fronde. A sa tête, Joseph Olenghankoy, président des FONUS (Forces novatrices pour l'union et la solidarité). Il faut y ajouter, Roger Lumbala, président du Rassemblement congolais pour la démocratie-Nationaliste (RCDN). Bruno Tshibala est le désormais ex-secrétaire général adjoint de l'UDPS (parti de Tshisekedi) depuis son exclusion début mars pour soutien à la dissidence. Valentin Mubake a perdu son statut de délégué du Rassemblement. Il a payé sa témérité d'avoir bravé la ligne de parti en participant aux consultations initiées par Joseph Kabila. Il a été officiellement exclu de l'UDPS, ce 5 avril 2017.

De l'autre, l'aile du Rassemblement menée par Etienne Tshisekedi, son président et Pierre Lumbi, le président du conseil de sages, compte « mater » cette dissidence. Elle juge la « illégale », la représentativité du Rassemblement que veut incarner l'aile dissidente. Sur la question de la nomination du premier ministre de transition, elle compte proposer un seul nom -celui de Felix Tshisekedi- contre la volonté présidentielle de se voir proposer trois noms.

Accentuer la guerre des "frères ennemis", la stratégie Kabila?

Ces dissensions internes au Rassemblement sont d'autant plus exacerbées que l'aile dissidente de Joseph Olenghankoy a présenté une liste de cinq noms pour la course au fauteuil de la primature. Avec l'intransigeance de l'aile Tshisekedi qui a « ignoré» les consultations, il n'est pas exclu que Joseph Kabila joue sur ces querelles pour enrayer la dynamique de l'opposition revigorée par la journée « villes mortes ».

Et pour enchevêtrer les fils de l'équation déjà compliquée, des noms qui circulent sur la liste des prétendants possibles qui veulent enfiler le costume de premier ministre, des sources concordantes placent Raphaël Katebe dont le frère, Moïse Katumbi soutient Félix Tshisekedi.

En renvoyant les différents prétendants à soumettre une liste harmonisée de noms, Joseph Kabila pose la stratégie de jouer sur les égos pour enclencher une guerre entre les « frères ennemis ». Difficile d'entrevoir alors une cohésion de groupe qui placerait l'intérêt de la Nation au-dessus des prétentions carriéristes des candidats au poste.

Comme pour la nomination de Samy Badibanga « légitimée » par l'accord Edem Kodjo du 18 octobre, il ne serait pas étonnant qu'en l'absence d'une harmonie pour la présentation d'une liste commune du Rassemblement, Joseph Kabila ne désigne son Premier ministre parmi les candidats de la liste Olenghakoy. La rupture serait alors consommée et on s'éloignerait de l'essentiel : organiser des élections pour désigner le remplaçant de Joseph Kabila

Ibrahima Bayo Jr.

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