Guinée : Alpha Condé et la tentation du troisième mandat

Ballon de sonde ou véritable volonté? La polémique enfle en Guinée sur l'éventualité de voir Alpha Condé rempiler pour un troisième mandat à la tête du pays. Le débat a été lancé par plusieurs déclarations dans l'entourage présidentiel face aux protestations de l'opposition. Pendant ce temps Alpha Condé entretient le mystère, ajoutant du sel au débat déjà houleux alors que la prochaine présidentielle est prévue en 2020.
Ibrahima Bayo Jr.
Affiche de campagne pour la présidentielle 2015 où le président sortant Alpha Condé était candidat à sa propre succession

C'est le sujet qui barre la Une de certains journaux guinéens et qui alimente toutes les discussions de Boké à Nzérékoré en passant par Conakry. Des spéculations qui prennent la forme d'une intrigante question : Alpha Condé est-il tenté de modifier la constitution pour briguer un troisième mandat ?

Silence présidentiel et ballons d'essai de son entourage

Le président guinéen, élu en 2010 après un quart de siècle d'opposition puis réélu en 2015, entretient le flou sur son intention de briguer ou non un troisième mandat. En guise de réponse à cette question qui taraude les esprits, le chef de l'Etat soumet cette éventualité au nihil obstat du peuple et laisse le soin à ses proches collaborateurs de lancer des ballons d'essai.

Dépêché en novembre par le parti au pouvoir pour régler des anicroches entre sections du parti au pouvoir, Bangaly Kourouma, le directeur général de la police a été le premier à sonder les esprits. « Lorsque nous aurons la force, nous pourrons dire que l'affaire de deux mandats engage ceux qui l'ont dit. Tant qu'Alpha Condé est en vie, il sera le président de la Guinée », avait déclaré le premier flic de Guinée.

Sans aller jusqu'à plaider le mandat à vie, des membres du Rassemblement du Peuple de Guinée (RPG, au pouvoir) ont récupéré cette sortie de réserve inhabituelle du patron de police. Hadja Nantenin Chérif Konaté, la coordinatrice nationale du RPG s'est empressée de présenter l'intention d'Alpha Condé de briguer un troisième mandat comme une demande du peuple guinéen. « Le peuple va demander un troisième mandat à Alpha Condé ! », tranche-t-elle.

Le front anti 3ème mandat de l'opposition

Cette agitation politique d'un éventuel troisième mandat intervient alors que la popularité du chef de l'Etat guinéen est à nouveau boostée par sa désignation comme président en exercice de l'Union africaine. De retour en Guinée du 28ème sommet de l'organisation panafricaine, Alpha Condé s'était livré à une véritable parade dans les villes guinéennes où les notables et une partie du peuple sont venus le féliciter pour cette désignation à la présidence tournante de l'UA.

Pourtant, la constitution guinéenne est très claire. Son article 27 limite catégoriquement à deux, le nombre de quinquennat que peut exercer un président élu.

« Le président de la République est élu au suffrage universel direct. La durée de son mandat est de cinq ans, renouvelable une fois. En aucun cas, nul ne peut exercer plus de deux mandats présidentiels, consécutifs ou non ». Constitution guinéenne.

L'éventualité de cette modification constitutionnelle a hérissé les poils d'une opposition, vent debout dans un front anti-troisième mandat.

« Ici, le premier objectif, c'est de demander à Monsieur le président de la République de se prononcer, de réitérer son engagement de se conformer à la Constitution et de ne pas vouloir la tripatouiller. Le deuxième objectif, si vraiment son intention est de modifier la Constitution, c'est d'organiser, à ce moment-là, la lutte pour refuser le tripatouillage de la Constitution », a expliqué à RFI, Cellou Dalein Diallo, chef de file de l'Union des Forces Démocratiques de Guinée (UFDG), principal parti d'opposition en Guinée.

Avec d'autres partis d'opposition et des membres de la société civile guinéenne, l'opposition a annoncé la création d'un front pour contrer cette initiative. Pour l'heure, le chef de l'Etat s'est muré dans le silence. Une façon peut-être pour lui d'observer la perception de cette idée au sein de la population, ce qui ne manque pas d'exacerber les spéculations.

Pourtant, c'est la médiation du président guinéen a été décisive dans la crise post-électorale gambienne, pour convaincre Yahya Jammeh de quitter le pouvoir. Cette médiation n'a-t-elle pas servi de leçon à Alpha Condé devant l'intransigeance de la Cedeao des présidents qui joueraient les trouble-fêtes démocratiques ?

Ibrahima Bayo Jr.

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Commentaires 2
à écrit le 08/03/2019 à 12:37
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vue la situation guinéenne le président Alpha condé doit être réélu dans notre pays car c'est la seule personne capable de régler les problèmes guinéen nous savons tous qu'elle était notre position avant qu'il ne devienne président nous aussi nous sa...

à écrit le 09/02/2017 à 17:06
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Le professeur Alpha Conde ne peut pas se permettre de devenir la risee et la honte de l AFRIQUE de l Ouest! La Guinee ne doit etre ni le Cameroun , ni l,Angola ni le zimbabwe. Le Ghana, le Benin, la Namibie Sont les modeles de democratie qui...

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