Côte d’Ivoire : bataille serrée pour le perchoir de l'assemblée

Alors que le pays se remet lentement de la frayeur de l’épisode de la mutinerie des casernes, la session parlementaire s’ouvre ce lundi. Les premiers députés de la Troisième République devront choisir le premier président de l’Assemblée nationale ivoirienne de cette première législature. Selon la préséance des personnalités au sommet de l’Etat, ce poste est presque honorifique et les pronostics semblent joués d'avance. Mais avec les événements de ces derniers jours, on est pas à l'abri d'une surprise !
Ibrahima Bayo Jr.
Le siège du président de l'Assemblée nationale ivoirienne

Alea jacta est -le sort en est jeté en latin- ! Pour certains, la désignation du président de l'Assemblée nationale, est jouée d'avance. A l'ouverture de la session parlementaire ce lundi 09 janvier 2017, les 255 nouveaux députés de l'Assemblée nationale ivoirienne doivent choisir celui qui siègera au perchoir de l'hémicycle entre deux candidats qui se bousculent au fauteuil.

Guillaume Soro, candidat pour un « parapluie judiciaire »

« J'annonce officiellement ma candidature pour un deuxième mandat à la présidence de l'Assemblée nationale ». C'est par cette brève annonce que Guillaume Soro a informé de sa volonté de rempiler au perchoir qu'il occupe depuis 2012 avec l'arrivée d'Alassane Ouattara au pouvoir. A 44 ans, il est le grandissime favori pour la course à la présidence de l'Assemblée nationale, conforter en cela par une promesse d'Alassane Ouattara qui lui aurait assuré qu'il aurait le poste.

Surnommé le « Che » pour son passage remarqué à la Fédération estudiantine et scolaire de Côte d'Ivoire (FESCI), Guillaume Soro a intégré les rebelles de Forces Nouvelles après être tombé en disgrâce auprès de Robert Gueï qui mena un coup d'Etat en 1999 contre Henri Konan Bédié. Premier ministre de Gbagbo après l'accord de réconciliation, Guillaume Soro participe à la fusion de l'armée régulière avec les forces rebelles puis devient premier ministre d'Alassane Outtara après la crise post-électorale de 2010. Il est porté à la présidence de l'assemblée nationale deux ans plus tard.

Bogotha -son second surnom est aussi éclaboussé ou directement en mis en cause par plusieurs scandales notamment celui des écoutes téléphoniques dans le coup d'Etat de 2015 contre Blaise Compaoré. Un rapport de l'Onu laisse même entendre que Guillaume Soro aurait violé l'embargo international en se constituant un arsenal militaire. Des accusations très vite démenties en remettant en cause la crédibilité des experts onusiens, sans vraiment convaincre.

Bien parti pour être élu, Guillaume Soro a entamé ses tractations avec les députés n'hésitant pas à courtiser des députés de l'opposition en faisant une chasse aux voix sur les terres du Front populaire ivoirien de Pascal Affi N'guessan. Certains commentateurs voient dans la volonté de Soro de se faire réélire sur le perchoir, un « parapluie judiciaire » pour se protéger des affaires judiciaires dans lesquelles, il est souvent cité.

Evariste Méambly, le « David » qui veut terrasser Goliath

En face, Evariste Edouard Méambly Tié croit en toutes ses chances d'éjecter le président sortant de son fauteuil. Réélu député de Facobly en indépendant, le président du Conseil régional du Guemon a constitué « Agir pour le peuple », son groupe parlementaire pour se porter candidat. Mais plus que ce soutien politique, il joue la carte géopolitique pour justifier sa candidature.

« J'ai décidé, après l'appel de mes parents du grand Ouest, d'être candidat à la présidence de l'Assemblée nationale de Côte d'Ivoire. J'ai décidé d'être candidat au nom de la géopolitique. Quand vous regardez la liste des 12 grandes Institutions de la République, vous vous rendez compte aisément qu'aucun cadre du Grand Ouest n'est à la tête d'aucune de ces Institutions », a annoncé ce membre du comité du Parti démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI).

Le député est assuré d'avoir le soutien de son président, Henri Konan Bédié, membre de la coalition au pouvoir. La rencontre, ce 3 janvier, entre les deux hommes a sans doute été décisive dans la définition de la stratégie pour l'élection à la présidence de l'Assemblée nationale. Evariste Méambly avait présenté la liste des députés de son groupe parlementaire à son « papa » Bédié.

Mais certains reprochent à Evariste Méambly, cette position de se présenter pour le Grand Ouest et non pour le mandat au nom du peuple. D'autres y voient une façon de se faire une notoriété politique. Pourtant au-delà des effets d'annonce, « David » Evariste compte bien terrasser le « Goliath » Soro. Selon des indiscrétions, nombreux sont ceux qui plaident en coulisses pour faire évincer Soro, ce qui pourrait profiter à Méambly.

Parviendra-t-il à recueillir le maximum de voix pour réaliser son exploit ? Dans une vie politique ivoirienne qui n'est pas à l'abri des coups de théâtre, il faut souvent se garder de faire des pronostics. Mais à coup sûr, les 253 députés convoqués (l'élection doit être reprise dans deux localités) donneront le verdict ce lundi même au Plateau.

Ibrahima Bayo Jr.

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