Côte d’Ivoire / législatives : le dimanche de tous les enjeux

Le barnum de l’hémicycle ivoirien n’est pas assez large pour accueillir les 1337 candidats officiels à un siège de député. La bousculade, à l’image de la campagne électorale et des arrangements internes des partis, promet de virulentes empoignades et de frustrantes éjections pour espérer arracher l'un des 255 sièges de députés de la première législature sous la IIIe République.
Ibrahima Bayo Jr.

Un mois après la promulgation de la nouvelle constitution qui limite le mandat des députés à 4 ans, les joutes verbales, les harangues de partisans et le démarchage d'électeurs au porte-à-porte laisseront place à l'ouverture des bureaux de vote dès la clôture officielle de la campagne électorale, ce vendredi 18 décembre à minuit. Ensuite, l'octroi d'un siège sera décidé par les 6,2 millions d'électeurs appelés aux urnes pour choisir leurs futurs représentants parmi cette pléthore de candidats dans ces législatives de tous les enjeux politiques.

La coalition d'ADO vacille mais veut se refaire

Le contexte politique n'est pas le même que celui des législatives de 2011 marquées par les stigmates de la crise post-électorale. Cette année-là, à la faveur de son installation au pouvoir, de son alliance avec le Parti démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI) d'Henri Konan Bédié et du boycott du Front populaire ivoirien créé par Laurent Gbagbo, le Rassemblement des républicains de Côte d'Ivoire (RDR) d'Alassane Dramane Ouattara (ADO) avait obtenu la majorité à la Chambre basse malgré une forte abstention.

Pas sûr cette fois-ci qu'Alassane Ouattara obtienne la « forte majorité » qu'il appelle de ses vœux. Sa coalition, le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP), a perdu de sa vigueur politique. Le choix de listes communes a provoqué des dissensions au sein des partis de la coalition qui ont poussé plusieurs pontes à cracher sur la « discipline de parti » pour s'aligner sur la liste des 740 candidats indépendants à ces élections. Malgré cette fronde massive qui ne manquera pas de raboter le nombre sièges du pouvoir, le RHDP compte bien former un groupe parlementaire. Mais aurait-il une majorité et surtout sera-t-elle soudée ? Dans tous les cas « le RDR compte sur un redécoupage territorial favorable », souffle un analyste de la scène politique ivoirienne qui pointe la répartition inéquitable du nombre de députés par circonscription.

Divisé, le FPI d'Affi Nguessan veut marquer son retour

En embuscade, les « Colombes » du Front populaire ivoirien (FPI) de Pascal Affi Nguessan comptent profiter du tohu-bohu au sein de cette coalition qui vacille pour marquer leur retour. Même s'il a obtenu le quitus de la justice ivoirienne en avril 2015 pour diriger le parti, le poids politique d'Affi Nguessan est à relativiser après sa déroute à la dernière présidentielle.

Mais la guerre intestine couve au sein du parti de Laurent Gbagbo. Les « Faucons », fidèles à l'ancien président, ne pardonnent pas à Affi Nguessan l'« affront » de sa normalisation avec le pouvoir en place alors que le fondateur du parti est jugé devant la CPI. Menés par Aboudramane Sangaré surnommé « le jumeau de Laurent Gbagbo », les Faucons militent pour une préservation de l'héritage de leur fondateur. Plus, ils refusent de se parer du même plumage que les « Colombes » pour « légitimer » le pouvoir d'Alassane Outtara et prêchent le boycott systématique de toutes les échéances électorales depuis 2011.

Face à cette clameur de la dissidence, Affi Nguessan fait la sourde oreille. Il table même sur une razzia de 30 à 50 sièges à l'Assemblée nationale, selon les estimations de son camp. « Impossible en l'état actuel des choses ! », rétorque-t-on du côté des dissidents, calculs à l'appui. « Le camp Affi Nguessan est dans une logique de figuration. Nous n'y allons pas dans un souci de cohérence », poursuit la même source. Le grand retour du FPI dans le jeu politique ivoirien tant chanté par le camp Affi Nguessan n'est pas pour demain.

Au-delà des querelles internes aux partis, les acteurs politiques se hâtent et se positionnent pour la recomposition de l'échiquier politique ivoirien. Tout le monde se prépare à une autre guerre : celle de la succession d'Alassane Dramane Ouattara qui entame son second et dernier mandat constitutionnel. En arbitres, les électeurs donneront le top-départ via les urnes au soir du dimanche 18 décembre.

Ibrahima Bayo Jr.

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