Gambie : ce que cache l’incroyable volte-face de Yahya Jammeh

Pendant un instant, le monde a presque cru que le dictateur avait revêtu les vêtements du démocrate. Vendredi dernier, tard dans la soirée et après vingt-deux ans d’un pouvoir sans partage, Yahya Jammeh reconnaissait sa défaite à l’élection présidentielle face à l’homme d’affaires Adama Barrow, laissant entrevoir une lueur d’espoir pour une alternance démocratique en Gambie. Une semaine plus tard jour pour jour, le fantasque et imprévisible Président Gambien rejette désormais les résultats à travers une annonce télévisée, faisant craindre le pire pour ce pays que d’aucuns commençaient – un peu vite- à considérer comme un exemple de transition réussie. Revue de détail de la semaine de tous les dangers pour la Gambie.

Derrière la volte-face de Jammeh, que certains estimaient déjà prévisible tant l'annonce de sa concession avait pris de court tous les spécialistes de la région, il y a une succession d'événements qui l'ont vraisemblablement conduit à vouloir s'accrocher à son siège. Bien que se réfugiant dans son discours d'hier derrière un  argumentaire « technique » relatif à la non-comptabilisation de certains votes par la commission électorale indépendante ou invoquant des manœuvres de l'opposition pour pousser les électeurs à l'abstention, Yahya Jammeh semble jouer désormais son va-tout et se prépare à un énième rapport de force avec l'opposition. Toutefois, selon des sources proches de la présidence actuelle, Jammeh n' « aurait pas eu d'autre choix » que de revenir sur sa concession.

Incertitudes sur son avenir et déclarations contradictoires du Président élu

La première série d'événements qui aurait motivé sa décision porte sur le sort qui lui serait réservé une fois qu'il aurait quitté le palais Présidentiel en Janvier prochain. Lors de l'entretien téléphonique entre les deux candidats à l'élection présidentielle la semaine dernière -diffusé par la télévision gambienne- ces derniers avaient fait assaut d'amabilités et avaient voulu se montrer rassurants. Jammeh avait ainsi brièvement indiqué à son successeur potentiel qu'il se retirerait dans son village natal de Kanilai pour y devenir agriculteur. Barrow, quant à lui, s'était montré très tempéré dans ses premières déclarations à la presse internationale quant à ses intentions vis-à-vis de son bouillonnant prédécesseur, accusé de multiples exactions au cours de son règne. Mercredi dernier, changement de ton. Lors d'une déclaration, Adama Barrow se montre menaçant à l'endroit de celui qui est encore pour quelques semaines le maître de Banjul : « Je n'ai pas dit que Jammeh ne sera pas traduit devant la Cour pénale internationale. (...)Mais, dès que notre gouvernement va commencer à fonctionner, s'il y a des choses à étudier, la Justice le fera, conformément à la loi ».

Affolement au palais présidentiel et "conspirationnite" aigûe

Au palais présidentiel, c'est l'affolement suite à ces affirmations qui sonnent comme une déclaration de guerre. Selon des informations fiables obtenues par La Tribune Afrique, Yahya Jammeh réunit sur le champs un pré-carré de fidèles irréductibles autour du  général de brigade Joseph Bassène, proche des indépendantistes du MFDC, afin d'examiner les options qui s'offrent à lui. A ce stade, Jammeh sait que l'armée est divisée, et qu'il ne peut plus totalement compter sur le chef d'Etat Major Ousmane Badjie, qui pencherait du côté de Barrow. A ses interlocuteurs, Jammeh tient un discours extrêmement agressif, estimant que la « Gambie est en danger, au bord de la guerre civile », et que son adversaire serait « soutenu par les service secrets britanniques et aurait disposé de moyens considérables pour truquer les résultats de l'élection ». Autour de la table, personne n'est dupe, le Président craint un sort similaire à celui de Hissène Habré, et ne veut plus du tout quitter le pouvoir. Toutefois, le général Bassène assure Jammeh du contrôle de la partie de l'armée sous son commandement, et de son soutien « quelle que soit la décision qu'il prendrait ».

Accélération vendredi

Après avoir passé la journée de jeudi à promettre prébendes à ses alliés potentiels et à tenter de sécuriser un bloc homogène au sein de l'armée, Jammeh convoque officiellement au palais présidentiel vendredi après midi l'ensemble des patrons de l'armée, des services de sécurité et de l'appareil de renseignement, afin de leur faire part de son intention de contester les résultats de l'élection présidentielle. Selon un participant à cette réunion : « L'ambiance est à couper au couteau, et les protagonistes présents se jugent, se toisent, chacun essayant de décrypter les intentions de l'autre et de savoir s'il est encore loyal au président, sans qu'aucun ne prenne la parole pour le défier ».

Dans la soirée, la messe est dite, la Gambie entre à nouveau dans l'incertitude.

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Commentaires 21
à écrit le 15/12/2016 à 11:32
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je peux comprendre les nombreuses familles qui ont perdues pendant 22 années tout ce qui comptait à leurs yeux, mais si je me réfère à ce que MOZO a écrit, rien ne sert de vouloir à tout prix rendre la monnaie dès fois il suffit juste de dire, je te ...

à écrit le 14/12/2016 à 16:38
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Au delà du respect et l'honneur, la politique à c'est contour que nul est celui qui ne pratique pas cet art ne peut comprendre, on est tous stupéfait du volte face, mais Barrow à prouve que c'est n'est pas lui qui est au commande, ils ya ceux qui en ...

à écrit le 13/12/2016 à 1:05
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Très étonnant chers amis

à écrit le 12/12/2016 à 19:16
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Jammeh devrait moralement avoir honte de lui-même et quitter le pouvoir, il doit répondre de toutes les exactions qu'il a commis durant son mandat. "Qu'on accepte d'assumer ses responsabilités quand-même en Afrique "

à écrit le 12/12/2016 à 11:44
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Personne de sensé ne peut blâmer Jammeh. Ton ennemi vient de dire que demain matin il viendra te tuer. Que feras-tu? Attendre le lendemain matin pour voir s'il est au sérieux ou prendre des décisions pour ta survie? Celui qui est franc envers lu...

à écrit le 11/12/2016 à 21:32
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Barrow a fait preuve légèreté pour quelqu'un qui veut un pays. En face d'un militaire qui a 22 ans de règne sans partage , un sage serait parti avec prudence, consolidé son pouvoir Evan d'envisager les poursuites contre JAMMEH. Il semble clairement ...

à écrit le 11/12/2016 à 20:43
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Que le peuple de Gambie réclame le droit en s'imposant farouchement contre toutes formes d'oppositions à la voix des urnes. Vive la démocratie même à prix du sang.

le 30/01/2017 à 19:17
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tout a fait.vive la democratie des urnes.

à écrit le 11/12/2016 à 18:09
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Le volte-face de Yahya a pour cause le manque de maturité et de diplomatie de la part de son adversaire, le Président élu qui n'a pas pu gérer le sort du sortant juste le temps pour lui de prendre les rênes de pouvoir. Vite et bien ne vont guère en e...

à écrit le 11/12/2016 à 16:19
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Rien de surprenant ! L'alternance est une mesure occidentale, la Gambie en est elle une province ? Moi je donnerai raison à Jammey ds la mesure où quelqu'un ne peut pas vous promettre la la mort avec la même arme dont vous detenez entre vos mains, e...

le 11/12/2016 à 22:10
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MOIS A MON AVIS BARROW A TROP PRÉCIPITER LES CHOSES LES DÉCLARATIONS QUI 'IL A ENCHAÎNER L'URGENCE N’ÉTAIS PAS DE JUGER JAMMEH MAIS PLUTÔT COMMENT AIDER CETTE POPULATION QUI A TANT SOUFFERT CHAQUE CHOSE EN SON TEMPS ADAMA

à écrit le 11/12/2016 à 16:09
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Il falait etre dupe pour croire a la sincerite de JAmmeh lorsqu'il dit avoir reconnu sa defaite. C'est pas maintenant Yahyah s'en ira. Et il ne s'en ira pas tant qu'on lui casse pas la gueule.

à écrit le 11/12/2016 à 10:28
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Moi je remarque sur les africains 'l'impatience dans les affaires ' l'égoîsme au Premier rang ; celui qui accepte liberer son peuple ; sachant qu'il a causé tant de tort négocie une façon d' anmystie ' vous refusé alors que le pouvoir lui appartien...

le 12/12/2016 à 8:04
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Bien dit mon frère, le temps où les Africains comprendront ça, on sera sauvé !!

à écrit le 11/12/2016 à 6:58
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Je pense que Barrow, ne mérite pas d'etre président de la République, quand bien même qu'il est l'élu du peuple. Pour moi, ses premiers pas montré qu'il est nul en politique. Il sera pire que Jameh et la Gambie va perdre ses acquis

à écrit le 10/12/2016 à 23:08
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BAROW DONNE L'IMPRESSION D'ÊTRE MANIPULÉ QUE YAYA CONTINUE CAR ON VEUT UNE AFRIQUE DÉBARRASSER DE TOUT COMPLEXE ET C'EST PAS L'ÉLECTION QUI VAS INSTANTANÉMENT FAIRE CHANGER UN HOMME LUI ACCORDER LES QUALITÉS LES VERTUS QU'IL N'A PAS NON

à écrit le 10/12/2016 à 17:23
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C'est le vainqueur Barow qui a été victime de son insolence en se hatent à offrir la tête de Yaya aux occidentaux sans même avoir pris le contrôle. Les nouveaux dirigeants africains sont trop revanchards. On espère que ces deux ne sombrent pas la ...

le 10/12/2016 à 21:08
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Aujourd'hui les africains ne veulent plus de la CPI. DONC c'est une erreur de Barrow. Djameh est obligé de sauver sa peau et sa place je n'aurais pas fait autrement.

à écrit le 10/12/2016 à 16:10
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Cette attitude de James ne nous surprend guère mais plutôt s'il s'etais retirer ses coup férir. Une synergie de l'ensemble du peuple avec le soutiende la communauté internationale lui feront reculer

à écrit le 10/12/2016 à 11:43
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JAMMEH a pleinement raison . C est quoi cette affaire de CPI. Eh bien Barrow a cherche , il a bien trouve . N importe quoi !

le 13/12/2016 à 13:58
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c'est la commission électoral elle qui reconnue avoir eu des failles dans son système et des anomalies dans le déroulement de l’élection ...a partir de ce instant il a pleinement le droit de rejeter les résultats de l’élection puisqu'ils ne sont plus...

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