Afrique du Sud : les charges contre le ministre des Finances abandonnées

Alors qu'il devait comparaître, ce mercredi devant la justice, Pravin Gordhan, le ministre sud-africain des Finances ne répondra pas à cette citation. Le procureur général a décidé d'abandonner les charges de fraudes retenues contre lui. Une décision qui pose la question d'éventuelles pressions d'acteurs économiques et politiques. Pire encore, cette affaire traîne dans son ombre un autre scandale qui vise le ministre.
Ibrahima Bayo Jr.
Shaun Abrahams, le procureur général lors d'une conférence de presse à Pretoria

Décidément, le revirement dans cette affaire politico-judiciaire se fait au gré des déclarations du tonitruant procureur général. Pas plus tard que ce dimanche 30 octobre, Shaun Abrahams faisait taire les « rumeurs » dans la presse locale faisant état d'un possible abandon des charges de fraudes retenues contre le ministre sud-africain des Finances Pravin Gordhan. Il semble qu'entre temps, le possible soit devenu le vrai.

Charges abandonnées, sans convaincre

Ce lundi lors d'une conférence de presse à Pretoria, le procureur général sud-africain a mis fin au suspense qui tenu en haleine toute la Nation arc-en-ciel et donné lieu à des joutes orales entre l'ANC, le parti au pouvoir et l'opposition. « J'ai décidé de renoncer à la décision de poursuivre M. Gordhan et ses deux coaccusés », a assené Shaun Abrahams à la presse sans vraiment convaincre.

Lire aussi : Afrique du sud: accusations de fraude contre le ministre des Finances

 Pour motiver sa décision, le procureur avance que la décision de poursuivre le ministre des Finances n'est pas la sienne. Selon lui, il apparaît que Pravin Gordhan, alors chef du service des revenus à la South African Revenue Service, l'agence étatique chargée des impôts, n'avait pas une intention d'agir illégalement en octroyant une pension anticipée à un ex-fonctionnaire, co-accusé dans cette affaire. Qu'à cela ne tienne !

Shaun Abrahams

Pour comprendre les tenants et les aboutissants de cette affaire rocambolesque il faut remonter à début octobre. L'affaire qui éclate à cette date met au jour un vieux cas presque oublié. Entre 1999 et 2009, Pravin Gordhan occupe le poste de chef des revenus au niveau de l'Administration fiscale sud-africaine et aurait approuvé de façon frauduleuse, le versement d'une pension de retraite anticipée de 1,1 million de rands (environ 80.000 dollars) au commissaire adjoint à l'impôt, Ivan Pillay. Par la suite, le même commissaire a été à nouveau recruté en tant que consultant pour l'Administration fiscale.

Des pressions sur le procureur ?

L'affaire avait rattrapé Pravin Gordhan, devenu ministre des Finances et avait provoqué des dissensions au sein même du gouvernement mais aussi entre l'opposition et l'ANC, le parti au pouvoir. Certains réclamaient la démission du ministre pour s'expliquer tandis que d'autres lui ont signifié leur soutien. Le scandale avait même impacté le rand, la devise sud-africaine qui a vu son cours chuter de 4%.

Pravin Gordhan

Dans le volet judiciaire, le procureur s'était saisi de l'affaire. Mais un groupe de 80 chefs d'entreprises ont signé, la semaine dernière, une tribune mettant en garde contre les possibles répercussions sur l'économie sud-africaine de ce scandale politico-judiciaire. Des vétérans de l'ANC s'étaient engouffrés dans la brèche pour pondre un communiqué daté du vendredi 28 octobre, dans lequel ils ont réclamé l'abandon des charges. Faut-il voir dans l'annonce de l'abandon des charges, des pressions venues de ces acteurs économiques et ces militants de la lutte contre l'Apartheid, très influents ?

A l'ombre de cette affaire, un autre scandale

Toujours est-il que le ministre des Finances Pravin Gordhan sort blanchi et renforcé de ce scandale à l'heure où son parti, l'ANC affaibli par les dernières élections municipales, aurait pâti de cet énième scandale qui porte (encore!) le visage de Pravin Gordhan. Mais cette affaire fait resurgir un autre scandale impliquant l'actuel ministre sud-africain des Finances. En août dernier, il avait été convoqué par une unité d'élite de la police, surnommée les Hawks (les Faucons) pour une enquête ouverte en 2015. L'homme était accusé d'avoir fait partie d'une unité au sein des services du fisc sud-africain qui aurait espionné des hommes politiques, dont l'actuel président sud-africain Jacob Zuma. Comme quoi, un scandale peut en cacher un autre !

Ibrahima Bayo Jr.

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