BAD : le trio irlando-africain chargé de la revue indépendante visant Akinwumi Adesina

Après plusieurs semaines de pourparlers, le bureau du conseil des gouverneurs de la Banque africaine de développement (BAD) a finalement désigné l’ancienne présidente de la République d’Irlande Mary Robinson à la tête d’un panel également constitué du juge gambien Hassan Bubacar Jallow et le Sud-africain Leonard F. McCarthy. Ils ont « deux à quatre semaines » pour présenter les résultats de la revue indépendante du rapport du comité d’éthique de la Banque suite aux allégations qui pèsent contre le président de la BAD, le Nigerian Akinwumi Adesina.
Ristel Tchounand
Mary Robinson, avocate et ancienne Présidente de la République d'Irlande; Hassan Bubacar Jallow, juge gambien et Président de la Cour suprême de Gambie; Leonard F. McCarthy, Président de LFMcCarthy Associates et ex- Vice-Président pour l'intégrité à la Banque mondiale.
Mary Robinson, avocate et ancienne Présidente de la République d'Irlande; Hassan Bubacar Jallow, juge gambien et Président de la Cour suprême de Gambie; Leonard F. McCarthy, Président de LFMcCarthy Associates et ex- Vice-Président pour l'intégrité à la Banque mondiale. (Crédits : DR/LTA)

C'est un trio irlando-africain qui réalise la revue indépendante du rapport d'enquête interne du comité d'éthique de la Banque africaine de développement (BAD) dans le cadre de l'affaire visant le président Akinwumi Adesina depuis plusieurs mois. Mary Robinson, avocate et ancienne présidente de la République d'Irlande préside ce panel également composé du juge gambien Hassan Bubacar Jallow et du Sud-africain Leonard F. McCarthy, précise un communiqué de la BAD transmis à la presse à l'issue de la réunion, mercredi 1er juillet en soirée, du bureau du conseil des gouverneurs de la Banque.

Quatre semaines Top chrono !

Le rapport de la revue indépendante est attendu d'ici « deux à quatre semaines maximum », précise la note signée Kaba Niale, ministre ivoirienne du Plan et du Développement et présidente du bureau du conseil des gouverneurs de la BAD. Elle souligne également l'« entière confiance [du conseil des gouverneurs] dans la capacité du panel à mener à bien cette importante mission ».

Depuis une dizaine de jours, l'attribution de cette mission hautement décisive pour l'avenir de la BAD à Mary Robinson bruissait. A ce moment il se disait aussi que plusieurs personnalités africaines auraient été écartées. L'association de Hassan Bubacar Jallow et Leonard F. McCarthy vient comme pour lever l'équivoque à ce propos et tranche avec ce qui avait été annoncé plus tôt, puisque initialement, une seule personnalité devait procéder à cette revue.

Aux côtés de Robinson, deux autres fins experts

Président de la Cour suprême de Gambie et président honoraire du World Justice Project, Jallow a une quarantaine d'années d'expérience dans les couloirs de la justice gambienne et internationale. Ex-procureur général et ex-ministre de la Justice dans son pays, il a notamment été aux Nations Unies premier procureur du Mécanisme international résiduel pour les tribunaux pénaux entre 2003 et 2015 et procureur auprès du Tribunal pénal international des Nations Unies pour le Rwanda. Il a notamment joué un rôle important dans la longue traque judiciaire contre Félicien Kabuga, le « banquier » du génocide arrêté en France récemment.

Leonard F. McCarthy est quant à lui ce qu'on pourrait qualifier d'expert des questions d'intégrité. Président de sa propre société de gestion des risques d'intégrité, ce Sud-africain a notamment été directeur des poursuites pénales et directeur du bureau des infractions économiques dans son pays, avant de passer neuf ans à la Banque mondiale en tant que Vice-Président pour l'intégrité.

Sous le leadership de Mary Robinson, ces deux ténors des questions judiciaires devront décrypter le rapport du comité d'éthique de la BAD qui a blanchi, en mai, le président Akinwumi Adesina, de toutes les allégations des lanceurs d'alerte. Ces derniers qui, rappelons-le, l'accusent entre autres de favoritisme envers ses compatriotes au sein de la BAD, de nomination de personnes parfois reconnues coupables de corruption ou encore d'irrégularités présumées dans l'attribution de contrats.

Suspens à moins de deux mois des élections

Alors que le leader nigérian a toujours nié toutes ces allégations, une véritable crise s'est récemment installée au sein de la BAD, débouchant entre autres sur une opposition de camps entre Etats-membres notamment le Nigeria et les Etats-Unis, respectivement premier et deuxième actionnaires de la Banque. Alors que Washington a insisté pour l'ouverture d'une enquête indépendante visant Adesina, l'opposition radicale d'Abuja ralliant à sa cause quelques présidents (et anciens) africains a emmené le bureau du conseil des gouverneurs à décider début juin d'une revue indépendante du rapport du comité d'éthique de la BAD. Ce qui se profilait en décision du juste milieu. Si plusieurs analystes estimaient qu'en cas de conclusion négative de la revue indépendante, cette affaire ne puisse plus échapper à une enquête indépendante, l'annonce quelque jours plus tard du départ surprise d'une très proche collaboratrice d'Adesina, l'Américano-suisse Jennifer Blanke suscitait de nombreuses interrogations. Un départ qui, d'ailleurs, devrait être effectif à compter de ce 4 juillet.

Les résultats de la revue indépendante menée par le trio irlando-africain -qui devraient dire si le rapport d'enquête interne du comité d'éthique a été rédigé dans le respect des règles de l'art- seront décisifs pour l'avenir d'Akinwumi Adesina à la tête de la BAD, lui qui est candidat à sa propre réélection. Le vote est attendu fin août. A suivre.

Article mis à jour le 02/07/2020 à 12:07.

Ristel Tchounand

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