Afrique du Sud : 17 banques dans le box des accusés, la contre-attaque de Zuma ?

Le chassé-croisé entre Pretoria et les banques d’affaires qui exercent en Afrique du Sud se poursuit. Après la motion visant une protection contre l’interventionnisme de l’Etat sur la décision des banques de clôturer les comptes des proches de la famille Gupta, c’est maintenant au tour de Pretoria d’intenter une action en justice contre pas moins de 17 banques pour des pratiques anticoncurrentielles. Ces établissements auraient entretenu des liens pour altérer les cours de devises notamment sur les transactions dollars/rand.
Amine Ater
Zuma semble vouloir prendre sa revanche sur les banques ayant posé des motions à son encontre suite à l'affaire Gupta

Les enquêteurs de la « competition commission » d'Afrique du Sud viennent de déférer devant la justice sud-africaine un cas de connivences et de manipulation des cours du rand qui implique une douzaine de banques. Le régulateur a ainsi pointé du doigt, des établissements comme Bank of America, BNP Paribas, JP Morgan Chase & Co, JP Morgan Chase Bank N.A, Investec Ltd, Standard New York Securities Inc, HSBC Bank Plc, Standard Chartered Bank, Credit Suisse Group, Standard Bank of South Africa Ltd, Commerzbank AG, Australia and New Zealand Banking Group Limited, Nomura International Plc, Maquarie Bank Limited, ABSA Bank Limited, Barclays Capital Inc, Barclays Bank plc.

Reuters et Bloomberg, armes du crime

Ces établissements sont accusés par l'autorité de concurrence d'avoir conclus une entente de manière à fixer les prix et s'être entendu sur l'allocation du marché dans la négociation de parités de devises étrangères impliquant le rand depuis au moins 2007. Un cas qui sera jugé par un tribunal « antitrust » et qui devrait conclure l'investigation qui a démarrée en 2015. L'enquête a en effet, démarré en avril 2015, après que la « competition commission » ait constaté dès 2007 des similarités sur la cotation de la parité Dollar US/Rand.

Les prévenus se seraient mis d'accord sur une entente englobant les prix des offres, les offres en elles-mêmes et les écarts d'offre pour les opérations touchant le commerce de devises notamment sur la parité citée plus haut. La commission reproche également à ces banques de conclure des ententes qui leur permettaient de s'abstenir sur certaines négociations et de créer des offres fictives voire proposer des offres à des moments particuliers.

Un réseau anticoncurrentiel qui reposait sur des solutions de négociations telles que la plateforme de trading de devises de Reuters ou encore le système de messagerie instantanée (chatroom) de Bloomberg. S'y ajoutent des conversations téléphoniques et des réunions pour coordonner leurs activités commerciales bilatérales et multilatérales.

Des canaux de communications qui leur ont permis d'atteindre les prix souhaitées en coordonnant les temps de négociations. Les banques incriminées se sont également mis d'accord pour s'abstenir de négocier et se relayer dans les transactions. La solution de trading de Reuters a par ailleurs, permis à ces banques de créer des offres fictives ou faussant la demande et l'offre leur permettant ainsi d'atteindre les profits souhaités.

Revanche pour Zuma ?

Face à ce degré de préparation, la commission a sollicité la justice sud-africaine pour traduire les banques incriminées devant les juridictions encadrant la libre concurrence. Le régulateur a par ailleurs déposé une ordonnance devant les autorités compétentes pour que ces établissements bancaires s'acquittent d'une pénalité administrative égale à 10% de leur chiffre d'affaires annuel.

Les résultats de cette enquête coïncident avec la volonté de Pretoria de mettre la pression sur les 4 plus grands prêteurs du pays, dont les critères sont jugées discriminatoires envers leur clientèle noire par l'ANC. Jacob Zuma est par ailleurs en conflit ouvert avec un bon nombre des banques incriminées dans cette affaire. En effet, au lendemain de l'affaire Gupta qui a affaibli la présidence Sud-africaine, ces banques avaient rappelons-le, décidé de clôturer les comptes des entreprises lié à l'entourage présidentiel.

Même scénario aux Etats-Unis

L'action des autorités sud-africaines fait également suite à la condamnation prononcée par un juge fédéral américain en janvier contre Citigroup Inc., Barclays Plc, JP Morgan et Royal Bank of Scotland Group, qui ont plaidé coupable en mai 2015 pour la manipulation des taux de change. Dans le cadre d'un règlement global de 5,8 milliards de dollars avec de multiples organismes de réglementation, ils ont convenu de verser environ 2,5 milliards de dollars au département US de la Justice. La banque centrale sud-africaine a déclaré que l'enquête de la Commission de la concurrence portait principalement sur le commerce rand-dollar sur les marchés offshores.

Bien que la commission ait recommandé que les banques soient condamnées à une amende de 10% de leur chiffre d'affaires, le maximum autorisé, le tribunal déterminera une pénalité basée sur les « recettes affectées » de leurs unités de change et la période pendant laquelle les transgressions ont eu lieu.

La banque centrale sud-africaine a, par ailleurs, déclaré qu'elle considérait les allégations comme une affaire sérieuse et justifiait que les poursuites aillent jusqu'au bout. Quelque 30 % du chiffre d'affaires quotidien sur le rand a lieu en Afrique du Sud, dont 58% réalisé par les étrangers. En avril 2016, la moyenne quotidienne des échanges de devises à l'échelle mondiale dans le cadre du rand était d'environ 49 milliards de dollars, a-t-elle déclaré.

Amine Ater

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