Automobile : voitures « Made in Algérie », la désillusion du gouvernement

Par La Tribune Afrique  |   |  653  mots
Le moteur a-t-il calé dans le secteur de la fabrication des voitures en Algérie ? En tout cas, pour le gouvernement qui compte sur le secteur pour un redressement économique du pays, la fabrication de voitures en Algérie est au bord de la panne. Le ministre algérien de l’Industrie, Mahdjoub Bedda, avait sèchement critiqué les producteurs locaux. Pour lui, il s'agit d'« importations déguisées » de la part des constructeurs!

Le constat est bien amer pour les autorités algériennes. Pour palier la chute mondiale des cours du pétrole, l'Algérie -dont les recettes pétrolières représentent 95% des rentrées de devises- lançait en 2014, des voiture « Made in Algérie ». Trois ans après son lancement, le secteur automobile affiche aujourd'hui des résultats décevants pour le gouvernement .

Des importations déguisées à la place d'une production locale

Mahdjoub Bedda, le ministre algérien de l'Industrie brosse tableau plutôt sombre du secteur. Premier constat du ministre : des « importations déguisées » de la part des constructeurs du fait que « la voiture [produite en Algérie] coûte plus cher que dans les pays de provenance ! », une chose inconcevable pour lui.

Chez les concessionnaires par exemple, la Renault Symbol coûte environ 200.000 dinars (environ 1.600 euros) de plus que sa version importée, la Dacia Logan. Même constat pour la petite Hyundai i10, fabriquée sur place, qui coûte presque 2.000 euros plus cher qu'en France.

Sur les six premiers mois de l'année, la forte chute du nombre de véhicules importés (-78% en glissement annuel) a été curieusement compensée par l'importation de pièces à monter sur les chaînes en Algérie. Ce qui a poussé Mahdjoub Bedda à un coup de gueule faisant remarquer que le secteur n'a aucun impact sur les réserves de change ou la création d'emplois, mais plutôt constitue un coût important pour l'Etat en termes d'aides et d'avantages fiscaux.

Quelques jours après l'inauguration d'une usine d'assemblage par Volkswagen à Relizane (300 km d'Alger), le ministre qui avait promis de « mettre un terme au mode actuel de production » automobile dans le pays, ce qui avait poussé le gouvernement à menacer de suspendre, à partir du 31 juillet 2017, tout nouveau projet de montage de véhicules.

Les autorités algériennes comptaient sur la production de voitures pour relever l'économie mise à mal par la chute des cours mondiaux du pétrole. La taille du marché doté d'une forte demande de 400.000 voitures par an (605.000 en 2012) le permettait. Elles avaient amené alors les concessionnaires automobiles du pays qui exerçaient depuis 2012 à se doter d'une unité de production locale et ont mis sur pied des mécanismes en termes d'aides et d'avantages fiscaux.

Le système du semi knocked down mis en cause

Et pourtant, les raisons de l'échec de la production de voitures en Algérie sont peut-être à trouver dans les dysfonctionnements pointés dans la stratégie de développement du secteur. Certains observateurs pointent le SKD (semi knocked down) qui consiste à importer le véhicule en kits pré-montés, simplement rivetés ou boulonnés sur place. « Le véhicule arrive semi ou complètement fini, donc il n'y a rien à assembler », expliquait début juillet au quotidien El-Watan, Mohamed Baïri, patron d'Ival qui importe la marque Iveco.

En mars dernier, les images de plusieurs voitures arrivées à l'usine Hyundai quasi-montées en dehors des roues, avaient déclenché un tollé national. Le scandale avait attiré l'attention du gouvernement qui a mis en place une commission d'enquête pour mieux comprendre le problème.

Autre problème mis en avant par les producteurs, le très faible « taux d'intégration » de 15% de pièces produites localement, imposé aux industriels. Afin de remédier aux préoccupations, le gouvernement a annoncé récemment l'élaboration d'un nouveau cahier des charges et la création « d'un vrai marché de la sous-traitance » destiné à fournir aux usines les pièces fabriquées en Algérie.

« Nous avons grillé plusieurs étapes, il fallait d'abord former le personnel, bâtir un réseau de sous-traitance avant de se lancer dans le montage de véhicules », souligne Mohamed Baïri. Le gouvernement que l'on accuse d'avoir voulu mettre les roues avant le moteur, a ici toute la latitude d'avoir un nouveau départ.