Très « chères » terres !

Avec ses 65%  du stock mondial de terres arables non cultivées, l'Afrique attise la convoitise des investisseurs internationaux. L'ampleur prise par l'accaparement des terres sur le continent inquiète la société civile et menace la priorité fondamentale d'assurer la sécurité alimentaire.

C'est à un véritable combat de David contre Goliath que l'on assiste ces derniers temps en Afrique entre les populations locales, soutenues par des ONG, et les investisseurs internationaux qui bénéficient de l'appui des Etats. La pomme de discorde, la ruée des sociétés internationales vers les terres africaines. Le continent dispose en effet, de près de 65% des terres arables non cultivées au monde soit de quoi nourrir  quelques 9 milliards de personnes à condition qu'elles soient mises en valeur. Devant la faiblesse des investissements publics, plusieurs pays du continent ont eu recours à des firmes multinationales.

Si le continent n'est pas la seule région au monde à attiser la convoitise des promoteurs financiers internationaux, son exposition a pris ces derniers temps, une proportion inquiétante. C'est ce que relève, d'ailleurs, l'ONG internationale CCFD-Terre Solidaire dans un de ces derniers rapports sur ce phénomène qui s'est traduit par de vives réactions hostiles à certains endroits.

«Achetés, loués ou concédés, des millions d'hectares sont arrachés aux communautés paysannes de nombreux pays du sud. Ils passent aux mains de sociétés agroindustrielles, d'Etats tiers et de fonds d'investissements» a relevé l'organisation très active sur le sujet.

Spéculation foncière

En soi, l'attractivité du continent pour les investisseurs internationaux est une opportunité pour les pays africains. La mise en valeur de ces terres peut permettre à l'Afrique de réduire ses importations en produits alimentaires et progressivement atteindre les objectifs de sécurité alimentaire et d'industrialisation du secteur. Selon la FAO, l'Afrique subsaharienne importe actuellement environ 20% de ses besoins céréaliers, et cela pourrait augmenter pour passer à au moins 50% d'ici 2050.

Le problème qui se pose toutefois, c'est que cette ruée vers les terres africaines aboutit dans la plus part des cas à de la spoliation qui ne tient pas compte des intérêts des populations locales si ce n'est pas que les terres sont affectées à d'autres usage que le développement de l'agriculture.

«Des terres, qui assuraient l'alimentation des populations locales, sont détournées de leur fonction et dédiées à des monocultures d'exportation, à la production d'agro-carburants et, de plus en plus, à la spéculation foncière» pointent ainsi du doigt CCFD-Terre Solidaire.

Les mises en garde des experts et de la société civile ainsi que les mouvements de révolte populaire qui éclatent assez souvent sur le continent, ne sont pas prêt de stopper le mouvement. Selon le dernier rapport «Land Matrix Analytical Report», publié en octobre dernier, 42% des achats de terres agricoles réalisés à l'échelle mondiale depuis l'an 2000, sont le fait des pays africains. Le rapport, une initiative d'un collectif d'ONG qui recense les transactions foncières au niveau mondial, a ainsi mis en évidence que les acquisitions à grande échelle des terres agricoles touchent majoritairement le continent africain avec leurs lots d'impacts directs sur les populations locales.

1 million d'hectares vendus en 4 ans

Selon, Land Matrix Report, c'est l'Ethiopie qui vient en tête des pays les plus attractifs du continent avec, sur la période 2012-2016, 40 contrats ayant porté sur 1 million d'hectares (ha) de terres. Le pays qui se classe à la 7e place mondiale est suivie par le Ghana, le Soudan du sud, le Maroc et la RDC avec, entre 700 et 800.000 hectares de terres agricoles ayant fait l'objet de transactions. Depuis peu, plusieurs pays du continent se sont inscrit dans la même dynamique, au mépris, des objectifs contenus dans l'accord de Paris en faveur du climat qui a reconnu dans son préambule  «la priorité fondamentale consistant à protéger la sécurité alimentaire et à venir à bout de la faim, et la vulnérabilité particulière des systèmes de production alimentaire aux effets néfastes des changements climatiques».

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Commentaires 4
à écrit le 09/01/2017 à 12:32
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Existe-t-il encore des gouvernements, des institutions ayant des scrupules ? Une éthique ? Si oui, il est impératif qu’une mobilisation s’organise afin de stopper l’accaparement des terres ! QUE FAIT L’ONU ? Se ruer sur les sols encore fertiles, ch...

à écrit le 03/01/2017 à 11:11
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C'est inadmissible ! Moi j'ai une autre solution pour développer l'agriculture en Afrique. Il faut un gigantesque plan Marshall sur 40 ou 50 ans pour l'Afrique, financé par tous les pays riches. Ce plan ne visera que deux secteurs : l'agriculture et ...

à écrit le 02/01/2017 à 14:36
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La France aussi est bradée au Quatar , aux oligarques russes ... Que voulez vous faire contre la corruption et l'irresponsabilité des états ( africains et occidentaux d'ailleurs ?...) car nos états et gouvernements occidentaux sont devenus également ...

à écrit le 02/01/2017 à 11:33
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Excellent article, ça c'est du journalisme d'information c'est pas de la camelote, merci beaucoup. Oui il est évident que les rapaces milliardaires via leurs multinationales sont un véritable danger sachant d'autant que les politiciens africains ...

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