Fiscalité : en quête de ressources, le Nigeria durcit le ton face à la fraude

L’exécutif nigérian semble décidé à muscler son dispositif de lutte contre la fraude fiscale et menace de « traîner » devant la justice les fraudeurs qui ne soldent pas leurs comptes dans le cadre de l’amnistie fiscale en cours. Ce durcissement vise à résorber un déficit de 25 milliards de dollars qui grève le budget alloué aux infrastructures.
(Crédits : Reuters)

Le ministère des Finances nigérian compte durcir sa position vis-à-vis de la fraude fiscale et menace de traduire en justice les fraudeurs qui décident de pas se conformer aux termes de l'amnistie fiscale qui a été prolongée. Une mesure de fermeté qui vise à démontrer la détermination de l'exécutif à combler le déficit budgétaire qui freine la croissance du géant africain, comme en témoigne le déficit 25 milliards de dollars qui handicape le financement des infrastructures.

Faire un exemple

Selon le Trésor nigérian, l'amnistie fiscale qui dure depuis neuf mois a vue certains fraudeurs apurer leurs arriérés, mais sans pour autant qu'ils s'acquittent d'intérêts, ni de pénalités. Mais ceux qui n'adhèrent pas à ce mouvement restent nombreux. Face à cette défiance, le département des Finances a annoncé « travailler sur une stratégie de contentieux, car dans certains cas nous devrons passer à l'action ».

« Si l'amnistie fiscale se termine et nous avons des informations qui montrent très clairement que vous évitez l'impôt, nous passerons aux poursuites en faisant un exemple de quelques personnes. Nous avons une population de 180 millions de personnes, dont nous devons satisfaire les besoins fondamentaux », a menacé dans une déclaration à la presse, Kemi Adeosun, ministre des Finances.

Cette attitude guerrière de l'exécutif vise à permettre Nigeria de doubler son ratio impôt/PIB brut d'ici 2020.

La proportion actuelle de ce ratio est l'une des plus faibles au monde, s'établissant à 6%, contre 26% en Afrique du Sud et près de 16% chez son voisin ghanéen. Un renforcement de la collecte d'impôts permettra à Abuja de dégager plus de liquidités pour stimuler l'activité économique qui s'est contractée en 2016 suite à la baisse de production de pétrole. Un secteur qui représente 10% de l'économie nigériane, mais qui contribue à près des deux tiers de revenus du gouvernement.

Rente pétrolière et guerres freinent la collecte d'impôts

Face à la baisse des revenus pétroliers, l'exécutif a dans un premier temps décidé la réduction de sa masse salariale, économisant quelques 69 millions de dollars par mois. Le gouvernement a par la suite mis en œuvre l'enregistrement biométrique des comptes bancaires, pour renforcer la traçabilité des flux bancaires. Une dénonciation a également permis aux agents du Trésor de saisir 38 millions de dollars en espèces dans un appartement à Lagos en avril dernier.

La collecte d'impôts au Nigeria était plus efficace il y'a plus de cinq décennie, avant l'afflux des pétrodollars. Les contribuables s'acquittaient à l'époque, de taxes sur les biens y compris le bétail, notamment dans le nord du pays, alors qu'au Sud c'étaient les cultures qui étaient taxées. La détérioration de la collecte d'impôts ne se limite pas aux effets de la ruée vers le pétrole, l'appauvrissement de millions de personnes au nord-est du pays, une région déchirée par la guerre s'est également fait ressentir sur les recettes fiscales.

« Maintenant, sur une population de 71 millions d'adultes, nous ne recensons que 14 millions de contribuables. Le pétrole est apparu est nous avons juste décidé que nous n'avions plus besoin de mobiliser des revenus. L'héritage de tout cela est que vous avez eu toute une génération de personnes qui n'ont jamais vraiment dû payer une taxe appropriée et cela se reflète dans nos chiffres », souligne la ministre des Finances.

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