Fêtes de fin d’année en Afrique : des cadeaux à tout prix !

La saisie cette semaine au Nigéria d’une cargaison de sacs de riz en plastique destiné au marché local à l’occasion des fêtes de fin d’années remet au goût du jour la montée de la contrefaçon sur les marchés africains en cette période. Aucune capitale n’y échappe et les conséquences peuvent parfois être cruelles sur l’économie et la santé des usagers.
Ristel Tchounand
Des fausses bouteilles de champagne de la marque belge André détruites le 8 janvier 2008, après avoir été saisies au port d'Anvers en provenance des Etats-Unis et à destination de l'Afrique.

Produits alimentaires, boissons, bijoux, vêtements, cosmétiques... tout y passe ! La période des fêtes, période de prédilection pour la distribution des cadeaux et des grands repas familiaux également est l'une, sinon celle, des périodes des plus grandes commercialisations de produits contrefaits ou périmés. Ce qui s'est passé cette semaine en est illustration. La douane nigériane a en effet saisi à Ikeja, un quartier de Lagos, 102 sacs de 25 kg, de riz présumé... en plastique. La cargaison était destinée à approvisionner le marché local pendant les fêtes qui interviennent cette année dans un contexte de flambée des prix des denrées alimentaires en général et du riz en particulier, très consommé par les Nigérians.

Faux produits, dates de péremption modifiées, ...

Toujours cette semaine en Côte d'Ivoire, des lots de canettes de boissons gazeuses à la date de péremption retouchée ont été saisis dans un magasin à Abidjan. « Les canettes devaient périmer le 28 décembre 2016, mais les commerçants ont refait la date pour inscrire le 28 décembre 2017 », explique à La Tribune Afrique Moustapha Tiamiyu, président de la Centrale des commerçants de Côte d'Ivoire. « Il suffisait de passer le doigt sur la date pour se rendre compte de la supercherie », ajoute-t-il.

En Côte d'Ivoire d'après ce responsable, la contrefaçon en période de fêtes concerne tous types de produits, mais les produits alimentaires sont généralement les premiers concernés.

« C'est ce que nous constatons chaque année, mais les choses s'empirent avec le temps. Il y a trop de produits contrefaits : lait, sucre, boissons alcoolisées... les fêtes de fin d'années constituent une période de forte consommation. Du coup, certains commerçants [qui trouvent le moyen de faire du chiffre] ramènent de faux produits, d'autres prolongent les dates de péremption de leurs marchandises. Quand les commerçants n'arrivent pas à épuiser les stocks, ils ne veulent pas perdre, alors ils procèdent ainsi », explique M. Tiamiyu.

La santé publique sous alerte rouge

Le perdant dans l'histoire ? Le consommateur (Naturellement !). Au Nigéria actuellement, les associations de consommateurs tentent, via les médias notamment, de sensibiliser les populations à plus de vigilance.

De leurs côtés, les autorités se veulent encore prudentes pour l'instant. Alors que la douane a affirmé avoir réalisé des tests sur le riz mis à ébullition qui y ont révélé l'existence de plastique, le ministre de la Santé Isaac Adewole, indiquait jeudi en fin de journée que les tests préliminaires « révèlent qu'il n'y a pas de preuve évidente de la présence du plastique dans le riz saisi ». Pourtant, selon le témoignage de Martin Patience, journaliste chez BBC Afrique, qui vu le riz saisi, celui-ci ne semblait présenter aucune anomalie au regard. « Mais à l'approche du nez, une odeur de produit chimique s'en dégage », avait-il tweeté mercredi.

Quoi qu'il en soit, l'alerte nigériane impose la vigilance chez les pays voisins qui importent également beaucoup de denrées alimentaires en cette période de fêtes. D'autant plus que les malversations se font tant dans le secteur formel et l'informel. A Abidjan, la Centrale des commerçants de Côte d'Ivoire dit ne pas disposer de moyens suffisants pour mener à bien un travail de contrôle pointu. « Nous n'avons pas de subventions. C'est assez difficile », confie M. Tiamiyu, soulignant l'impact de ce fléau sur la santé des citoyens, des plus alarmants. « les gens développent de plus en plus de maladies en consommant ou en étant au contact des produits contrefaits ou périmés, c'est grave ! »

L'économie, l'autre perdante

Outre la santé publique, il y a le coût de la contrefaçon pour les économies africaines. Au Cameroun où le fait est également très saillant à titre d'exemple, la facture s'élèverait à plus de 250 milliards de Fcfa par an, selon un rapport de la Chambre de commerce et d'industrie publié en 2014. Rien que concernant les médicaments -dont la contrefaçon en Afrique fait l'actualité ces dernières semaines- la Côte d'Ivoire perd 50 milliards de Fcfa chaque année.

Une rencontre initiée par l'Organisation africaine de la propriété intellectuelle s'est récemment tenue à Yaoundé (Cameroun) pour discuter des voies et moyens visant à lutter efficacement contre le fléau de la contrefaçon en Afrique francophone. Mais jusqu'à présent, organisations et gouvernements semblent encore loins de tenir les clés qui fermeraient les portes de cette menace grandissante.

Ristel Tchounand

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