L’ESSEC lance Generation Africa, un nouveau programme destiné aux managers africains

Par Marie-France Réveillard  |   |  977  mots
(Crédits : DR.)
Après l'ouverture d'un campus à Rabat en 2017, l'ESSEC Business School poursuit sa percée en Afrique et lance l'Executive Certificate Generation Africa à Abidjan, pour accompagner les managers en matière de développement des affaires. De Harvard à la LES en passant par HEC ou L'INSEAD, les plus prestigieuses universités multiplient les offres de formation en Afrique où la bataille des cadres bat son plein.

Chaque année, entre 11 et 13 milliers de jeunes diplômés africains arrivent sur le marché de l'emploi. En 2020, 60 % de sa population africaine était âgée de moins de 24 ans (soit environ 800 000 millions de personnes), selon les Nations unies. L'Afrique comptait 540 millions d'enfants de moins de 14 ans, en comptera 800 millions en 2050 et 930 millions en 2100. « L'âge médian de la population africaine est de 19 ans », a rappelé Benoît Chervalier, le banquier d'affaires qui est aussi enseignant à l'ESSEC Africa de Rabat, à l'occasion d'un point presse qui s'est tenu le 27 septembre dernier, au Cercle Interallié de Paris.

Les carences en ressources humaines de profils qualifiés, jusqu'au plus haut niveau de la pyramide managériale, se font cruellement ressentir en Afrique et attirent les principaux acteurs de la formation à l'international. Depuis quelques années, les plus prestigieuses universités proposent formations initiales ou « accélérées » aux publics africains. « L'Afrique s'est internationalisée et le monde s'africanise aujourd'hui », explique Xavier Leroy, Associé Partner d'Egon Zehnder (société internationale de conseil en gestion et de recrutement de managers), en duplex depuis Abidjan.

Depuis 2017, Harvard Business School (HBS) a ouvert un centre de recherche sur l'Afrique à Johannesburg puis un bureau à Lagos en 2019, afin de développer ses relations avec les chefs d'entreprises d'Afrique subsaharienne (l'Afrique du Nord étant couverte par le bureau MENA de HBS, basé à Istanbul). La London School of Economics (LSE), Wharton, tout comme l'Institut européen d'administration des affaires (INSEAD) ou HEC proposent désormais aux étudiants africains de suivre leur MBA, véritable sésame des décideurs à l'international.

Generation Africa : du « sur-mesure » pour les managers

En douze jours répartis sur trois mois entre Paris et Abidjan, l'ESSEC lancera à partir de la fin du mois de novembre 2022, un programme à 50 % dématérialisé, destiné aux cadres africains disposant de dix ans d'expérience au minimum. Le coût de la formation sera pris en charge par l'employeur (ETI, PME, multinationale ou institution).

« Cette formation s'intéresse au volet financement et au business development et s'adresse à des profils déjà confirmés », précise Benoît Chervalier qui avance « la qualité des partenariats de l'ESSEC » face à la concurrence mondiale, mais aussi la dimension « en présentiel » du programme, qui constitue encore un  gage de qualité pour les cadres supérieurs africains et favorise le networking. « L'international » est devenu le label de cette école française née en au début du siècle dernier (1907), qui campe aujourd'hui parmi les meilleures Business School au monde.

« Nous avons fait le choix d'un format hybride (numérique et présentiel) reposant sur une dimension internationale. Notre internationalisation s'est révélée en Asie avec l'ouverture de notre campus en 2005 à Singapour, elle s'est poursuivie en 2017 avec la construction d'un campus au Maroc et se renforce aujourd'hui, avec le lancement de Generation Africa en Côte d'Ivoire », explique Benoît Chervalier.

En mai 2020, le Financial Times classait l'ESSEC à la cinquième position des institutions mondiales en matière de formation continue (Executive Education).

Sur le continent, c'est l'Afrique du Sud qui abrite les établissements les plus prestigieux. L'Université de Cape Town (UCT) est en tête des palmarès africains (selon US News & World Report, 7 universités sud-africaines figurent dans le top 10 continental), suivi par l'Egypte et son Université américaine du Caire. Au Maroc, l'ISCAE et l'HEM Business School se taillent la part du lion. De la Pan-Atlantic University au Nigeria à la Strathmore Business School au Kenya,  en passant par l'Ecole supérieure algérienne des affaires (ESAA), le Ghana Institute of management and public administration (GIMPA) et le groupe ISM au Sénégal, on ne compte plus les formations made in Africa de haut niveau.

Selon Quacquarelli Symonds (QS), en 2022, 5 écoles africaines proposaient les meilleurs MBA parmi quelque 286 établissements répertoriés. La Graduate School of Business de l'Université du Cap en Afrique du Sud et la School of Business de l'Université américaine du Caire, arrivent en tête des formations africaines.

Comment retenir les talents sur le continent ?

« Dans l'année qui suit leur formation, nous avons observé que près de 50% des managers partaient vers une autre entreprise », explique Xavier Leroy d'Egon Zehnder, pour qui les incitations ne sont jamais trop nombreuses (facilité d'accès au capital, formation, promotion et rémunération attractive). « Nous rencontrons des difficultés pour retenir nos talents, c'est la raison pour laquelle nous avons mis en place des systèmes de « talent pool » qui représentent des viviers dans lesquels nous pouvons nous alimenter (...) Par ailleurs, partant du principe que l'attractivité à l'international reste importante, nous envoyons nos profils dans nos filiales à l'étranger », explique Lamia Ferguène, directrice des ressources humaines (DRH) Afrique et Moyen-Orient de Natixis.

Chez Deloitte aussi, la crise des talents se fait ressentir depuis quelques années. « Chez nous, c'est la guerre des talents », affirme Bénédicte Agostini, DRH chez Deloitte Afrique. « L'audit attire beaucoup moins qu'avant, c'est la raison pour laquelle nous priorisons le développement de carrière en interne. 70 % de nos profils sont recrutés au niveau junior. Pour nous, la formation relève d'une stratégie assumée de rétention des talents », poursuit-elle. Les exigences de l'environnement des grands cabinets d'audit et de conseil qui faisaient rêver au début des années 2000 cadrent de moins en moins avec la qualité de vie au travail et la quête de sens, revendiquées aujourd'hui par les Millenials.

La nouvelle formation proposée par l'ESSEC commencera en novembre à Paris et s'achèvera en février 2023. La promotion devrait compter entre 20 et 30 promotionnaires. « Nous avons opté pour Abidjan qui dispose d'un écosystème entrepreneurial très dynamique. Par ailleurs, nous voulions affirmer notre présence en Afrique subsaharienne, c'est pourquoi nous avons choisi la Côte d'Ivoire pour lancer Generation Africa », a précisé Benoît Chervalier.