13e édition de l’ODI - Spécial ESG : les entreprises françaises doivent intégrer les considérations ESG dans leurs stratégies à l'international

Depuis 13 ans, dans le cadre de son Observatoire du Développement International (ODI), BearingPoint et ses partenaires HEC Paris, La Tribune Afrique et le CIAN, interrogent des chefs d'entreprises sur les enjeux du développement international. A l'occasion de la 13ème édition de l'Observatoire du Développement International, BearingPoint a décidé de porter une attention particulière sur l'intégration des problématiques E S G dans les stratégies de développement à l'international des entreprises françaises.
Jean-Michel Huet, Associé Afrfique et Développement International chez BearingPoint.
Jean-Michel Huet, Associé Afrfique et Développement International chez BearingPoint. (Crédits : BearingPoint)

Un cadre réglementaire ESG imposé d'office aux entreprises françaises

Le cadre normatif, qu'il soit recommandé par les groupes de travail volontaires ou imposé par les États et les autorités régulatrices nationales et supranationales, ont donné lieu à une approche normalisée des critères ESG. Néanmoins, on observe une hétérogénéité entre les cadres réglementaires concernant les critères ESG selon les régions du monde.

Ainsi, 38% des entreprises interrogées considèrent que l'Europe et les USA constituent les régions comme les plus contraignantes en matière de réglementations ESG. Cela s'explique notamment par le fait que les pays occidentaux, par le biais de L'OCDE, ont été précurseurs en la matière. C'est dès 1976 que l'institution s'est emparée du sujet et a élaboré ses Principes directeurs, mais non contraignants, à l'attention des multinationales. Les Principes directeurs recommandés par l'OCDE s'inscrivent en complémentarité des initiatives réglementaires de l'Union Européenne. En effet, l'institution a, ces dernières années, instauré divers cadres pour l'ensemble de ses États membres et des entreprises œuvrant dans son espace. En exemple, les innovations réglementaires, bien qu'elles soient pour l'heure réservées aux grandes entreprises (plus de 500 employés) de l'UE, s'adresseront à termes à l'ensemble des entreprises, y compris celles non-européennes cotées sur des marchés réglementés européens, ainsi que les filiales européennes d'entreprises internationales. En effet, à partir de 2023, la réglementation dite CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive), étendra l'obligation de reporting RSE extra financier aux PME côtés en bourse, et les grandes entreprises de 250 employés, côtés ou non.

En ce qui concerne la région de l'Asie, vaste territoire où un grand nombre d'entreprises interrogées au cours de l'étude sont implantées, 62% de celles-ci jugent que la réglementation en Asie reste peu contraignante pour l'heure. En effet, la réglementation s'avère surtout avancée au sein des grandes puissances régionales, telles que la Chine et l'Inde. Les acteurs de la société civile donnent une véritable impulsion pour faire évoluer les cadres réglementaires en faveur des droits humains et environnementaux.
En conséquence, on observe de grandes inégalités entre les réglementations selon les régions, posant ainsi les défis de l'harmonisation des cadres réglementaires.

Le diagnostic de l'écosystème où les entreprises françaises envisagent de s'implanter conditionne leur stratégie de développement

Une analyse aux multiples critères est essentielle pour qu'une entreprise s'implante à l'international. Selon l'étude menée, sur une échelle de 1 à 10, la moyenne l'intégration des critères ESG dans les stratégies de développement par les entreprises françaises reste timide : elle se hisse à 6,75 sur 10.

Au-delà du contexte politique et d'un environnement des affaires favorable pour une installation pérenne, d'autres critères doivent être évalués pour garantir le respect à l'international des critères ESG des entreprises françaises. La qualité des infrastructures disponibles, le niveau de corruption et plus généralement les barrières à l'entrée, ou encore les politiques environnementales sont des données qui conditionneront la stratégie ESG de développement à l'international d'une entreprise.
Ainsi, Une analyse par le prisme des critères ESG est nécessaire pour une conformité aux engagements ESG de l'entreprise.

Notre étude a mis en lumière quatre thématiques ESG à investiguer pour une analyse de l'environnement :

La première est la thématique environnementale : selon les entreprises interrogées, la composante « Environnement » est considérée comme la plus importante à intégrer dans les stratégies de développement à l'international. Cela démontre une forte sensibilité de ces entreprises face aux alertes et risques climatiques grandissants. Le changement climatique affecte ainsi particulièrement les choix stratégiques faits par les entreprises en matière de stratégie de développement à l'international. De plus en plus sensibles aux questions environnementales en raison de la pression de la société civile et de l'évolution de la réglementation, les entreprises peuvent être ainsi confrontées aux limites écologiques d'un territoire, notamment émergents.

La seconde est l'adaptation culturelle de l'entreprise et la disponibilité et qualification des ressources humaines : Le niveau d'éducation et le facteur culturel ont un impact particulièrement conséquent sur la performance d'une entreprise et sur la gestion des RH. Les entreprises françaises implantées à l'international doivent faire face aux défis des différences culturelles qui se manifestent au sein de leur filiale à l'étranger.

La troisième composante concerne la sécurité et durabilité des infrastructures existantes : La qualité et le niveau de capacité des infrastructures de transport, énergétique, et téléphonique d'un pays sont des critères que les sociétés doivent prendre en compte, car la performance des entreprises dépend fortement de l'efficacité et la qualité des infrastructures. En effet, les risques liés à des infrastructures caduques sont très importants. Le respect des normes internationales des infrastructures dans la chaîne de valeur est une condition primordiale pour le respect de la main d'œuvre et pour prévenir les risques en matière de droits de l'homme et de l'environnement.

Enfin, la quatrième composante concerne l'environnement des affaires et le niveau de corruption : en effet, l'analyse du niveau de corruption d'un Etat et de l'environnement des affaires du pays en question doit faire l'objet d'une attention particulière. La corruption reste un fléau prégnant sur le fonctionnement des entreprises.

L'intégration des critères ESG doit être poursuivie comme élément majeur dans la définition des stratégies à l'international.

L'identification des risques ESG, étape essentielle dans l'analyse de l'environnement

Face à l'évolution d'un environnement multiforme, difficilement maîtrisable et de plus en plus imprévisible et susceptible de porter atteinte à la réalisation des objectifs des entreprises, celles-ci ont tout intérêt à mettre en place des mécanismes en matière d'identification, d'évaluation et de gestion des risques, qu'ils soient réels ou potentiels dans un avenir proche ou lointain. La présente étude conduite a permis de classer par ordre de criticité les risques potentiels auxquels une entreprise pourrait être confrontée : les risques politiques, sécuritaires et monétaires sont considérés comme les risques les plus critiques par les entreprises interrogées. Viennent ensuite les risques sociaux et sanitaires en seconde place, puis on retrouve en dernier les risques climatiques.

La stratégie de développement à l'international doit prendre appui sur une stratégie de mitigation des risques solide.

En prenant l'exemple de la dimension environnementale, le changement climatique, dû et accru par les activités humaines, peut fortement impacter les réseaux de supply chain dans divers secteurs (le secteur viticole impacté par les vagues de gel en période hivernal, la production d'électricité hydraulique impactée par la réduction des débits des cours d'eau, etc.). La multiplication des catastrophes naturelles liées au changement climatique, telles que les incendies et les inondations, menacent le transport des marchandises et les infrastructures de tout type.

En ce qui concerne le domaine social, les réglementations en la matière sont de plus en plus poussées à évoluer en raison de la surveillance accrue de la société civile sur les agissements des entreprises envers leurs salariés, les employés impliqués dans la supply chain, ou encore les communautés impactées par leurs activités. Plus encore, on observe en effet une grande préoccupation de la part de la clientèle, soucieuse d'une consommation plus responsable. Les produits et services éthiques et respectueux de l'environnement et des normes sociales sont de plus en plus recherchés.

Ainsi, l'anticipation et la prise en compte des risques ESG dans la stratégie de développement et de mitigation des risques, notamment par le suivi de l'évolution de la réglementation, permet à l'entreprise de construire une stratégie résiliente et durable et d'attirer tout un vivier de compétences et de protéger l'image de marque en concordance avec sa déontologie et ses valeurs.

(*), (**); (***) BearingPoint

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