L’économie des plateformes : le rôle des opérateurs de services

Lors de la 5ème conférence annuelle de la MIT initiative on the digital economy, le 14 juillet 2017 à Boston, le professeur Geoffrey Parker annonça un chiffre qui fit frémir les quelques européens ou africains alors présents : 75% de la valeur autour de l’économie des plateformes est aux USA … moins de 4% en Europe, 1% en Afrique ... 16 des 32 plus grandes marques mondiales, selon InterBrand, sont dans ce domaine aujourd’hui.
Jean-Michel Huet, associé BearingPoint

Les modèles économiques en rupture autour des plateformes ne concernent pas que les fameux Uber, Air BnB et autres Itunes. Ils impactent la quasi-totalité des entreprises qui veulent faire du digital et pour la plupart d'entre elle c'est une transformation profonde du modèle opératoire : passage de la vente de produit à la vente de service, passage du B2B au B(2B)2C. Le secteur public est aussi impacté avec le développement des smart cities par exemple.

Les opérateurs de services (ou CSP pour Communication Service Provider pour reprendre le terme des analystes) sont au cœur de cette transformation au travers de deux phénomènes clés.

2 dynamiques clés

Tout d'abord le développement de nouveaux business models. C'est via des offres Cloud, les API et la capacité des systèmes d'information à mettre en œuvre des modèles complexes de catalogue et de facturation que les opérateurs se distinguent et peuvent aider au développement de cette économie des plateformes. Pour cela les opérateurs doivent être capables d'aligner quatre avantages stratégiques :

-        La structuration d'un écosystème de partenaires capables d'apporter des services innovantes tels que la sécurité, les données, les applications mobiles, les algorithmes, la confiance via les  blockchain, etc. Cet écosystème peut voire doit inclure des start ups

-        La capacité à être agnostique en termes de services et technologies afin de créer et gérer des offres complexes sur l'ensemble de la chaine de l'innovation (créer des offres, les vendre, les valoriser, les distribuer, les monétiser) quelle que soit l'unité de compte (seconde, ko, kw, m3, etc.)

-        Le savoir-faire - historique des télécoms mais pas toujours gérer avec agilité - de gestion de modèle de revenus complexes et variés (combinaisons, seuils, options, etc.) avec des tarifs variés (grand public, professionnels, entreprise, wholesale, réallocation à des partenaires) selon différents modèles de diffusion (streaming, téléchargement, accès, licence, achat physique)

-        L'agilité avérée du système ... plus le temps d'attendre des « paliers de développement SI » de 6 mois. L'expérience utilisateurs concerne aussi les partenaires et la capacité à refaire régulièrement des offres, les aménager dans la nuit selon les impacts de l'environnement (concurrence, événement). C'est le prix à payer pour vraiment faire du digital

Ensuite, il faut que cela soit dans une véritable logique de plateforme à la fois pour les différents intervenants mais aussi pour supporter les changement technologiques (l'internet des objets, la 5G, etc.). Les communications au sens historique ne représenteront que 5% des revenus d'ici 10 ans, l'essentiel sera dans l'intelligence des services proposés et des cas d'usages monétisés. Pour cela les opérateurs devront proposés des approches en termes de plateforme basés sur 4 piliers

-        L'abstraction de service pour permettre une réelle convergence entre différents secteurs économiques (eau, électricité, télécom, voiture, service public, etc.)

-        La multi-tenancy (l'hébergement de plusieurs business models ensemble) pour permettre simplement le développement de plusieurs business models

-        L'utilisation d'Open API si possible standardisées (le « TM Forum » est l'instance mondiale de standardisation dans ces domaines) pour permettre de faire monter sur les plateformes de nouveaux partenaires et/ou services

-        La logique de place de marché pour permettre d'associer différents acteurs entre eux et de proposer la bonne proposition de valeur

Où en sont les Européens ? Quelques initiatives vont dans le bon sens : Telia et son offre autour du Digital Ecosystem Management, BT et son PCMS (Personalised Compute Management System) qui veut promouvoir le « business platform as a service » et donc adresser aussi bien des nouveaux modèles digitaux que des vrais écosystèmes autour de plateforme. Les autres opérateurs doivent rattraper leur retard.

Que peuvent en attendre les acteurs africains ? Paradoxalement pleins d'applications en termes d'usages. Cela peut-être un moyen de rendre économiquement viable des secteurs qui ne le sont pas (l'électricité par exemple), de développer des innovations dans d'autres (la récolte des déchets avec de premiers pilotes sur le continent), de permettre à certaines activités autour du digital de se développer (les opérateurs télécoms ont encore du travail dans le B2B de leur secteur), de donner une réalité financière aux projets dits de « smart city ».

L'histoire s'écrit maintenant il ne faut pas la rater....

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